Un BEP hôtellerie pour Science Po : « Rien ne presse, en attendant mon CV s’étoffe »
Un BEP hôtellerie pour Science Po : « Rien ne presse, en attendant mon CV s’étoffe »
Se tromper, arrêter ses études, les reprendre. Voici la clé d’une bonne orientation selon Thomas, qui, après un BEP, un bac STG et des études de droit, travaille en attendant de postuler à nouveau en master à Sciences Po.
Thomas, 25 ans. / La ZEP
Voix d’orientation. Le Monde Campus et La ZEP, média jeune et participatif, s’associent pour faire témoigner lycéens et étudiants de leurs parcours d’orientation. Cette semaine, Thomas, 25 ans, juriste à Montpellier.
Qui a la clé de la bonne orientation ? Pour Thomas, l’important est de bien se connaître. Faire des erreurs, arrêter ses études, les reprendre… cela fait partie du processus. Titulaire d’un BEP dans l’hôtellerie. Le voilà en route pour un master à Sciences Po.
« Pour pouvoir bien s’orienter, il faut bien se connaître. On a le droit de ne pas se connaître à 15, 18 ou même 20 ans. On a le droit de se tromper, d’essayer, de passer par des chemins de traverse, d’arrêter et de reprendre ses études. Rien de plus démotivant que l’idée toute faite de la “voie royale” selon laquelle le meilleur chemin reste de passer son bac, de préférence sans avoir redoublé, de faire ses cinq (ou plus) années d’études dans la même filière sans interruption, et de travailler après un ou deux stages plus ou moins bien rémunérés.
Après la troisième, mes résultats scolaires étaient trop mauvais pour envisager un passage en seconde. C’était le redoublement ou une orientation en filière professionnelle. Autant dire le cauchemar pour ma pauvre mère, un scénario de cancre, de raté. Je me souviens encore du visage résigné des profs qui me voyaient déjà finir avec un CAP coiffure ou boulangerie.
Gagner de l’argent, produire quelque chose
J’ai choisi de faire un BEP dans l’hôtellerie, à Toulon. Je n’avais plus envie d’aller à l’école, je voulais travailler vite, gagner de l’argent, produire quelque chose.
Je garde un souvenir extraordinaire de mes deux années de BEP. J’y ai rencontré des gens ouverts d’esprit, aux préoccupations d’adultes. Loin des bons à rien vaguement butés que l’enseignement professionnel a l’injuste réputation de drainer.
Mais la restauration n’est pas ma vocation. Ce secteur offre un panel de métiers géniaux mais exigeants, et il faut être un tout petit peu passionné pour y prendre du plaisir. Je suis donc retourné dans mon ancien collège, qui est aussi un lycée, et j’ai rencontré le proviseur pour le convaincre de m’offrir une place.
Je l’ai convaincu et je me suis retrouvé en première STG (devenue depuis STMG). Là, c’est devenu le grand flou, les cours m’intéressaient mais je ne me voyais pas devenir comptable. Alors, après le bac, j’ai choisi une licence AES à l’IAE de Lyon. Et là, catastrophe, l’échec total. Non seulement je ne m’y suis pas senti bien, mais au bout de deux mois, je me suis carrément demandé ce que je faisais là. En plus, les extras que je faisais dans un restaurant à côté des cours m’épuisaient.
La lumière s’est matérialisée avec le droit. Les quelques cours que j’avais en AES me passionnaient et, ça peut paraître bête, mais moi aussi j’avais envie de me promener toute la journée avec un code Dalloz sous le bras. A 19 ans, je trouvais que ça en jetait.
Donc, ce fut le droit. Manque de bol, les places en première année sont très demandées et les néobacheliers (ceux qui venaient d’avoir le bac) étaient alors prioritaires. J’ai donc dû attendre une année de plus pendant laquelle je me suis contenté de mes extras avant de pouvoir m’inscrire, grâce au programme d’études à distance de l’université Paris-II.
Ma licence avec mention
Travailler le droit à distance, seul devant son ordinateur, sans faire partie d’une promo, n’est pas facile. Mais j’ai quand même pu décrocher (sans vraiment briller, je l’avoue) deux années de licence. Pour la troisième, j’ai sauté sur l’occasion de l’apprentissage avec une licence d’administration publique de l’IPAG de Montpellier. J’avais toujours besoin d’argent et j’ai gardé du lycée hôtelier l’idée qu’on n’apprend jamais mieux que dans un contexte professionnel. Cela m’a motivé pour réussir à décrocher un apprentissage, et j’ai obtenu ma licence avec mention.
Depuis un an, je travaille comme juriste. Une nouvelle pause dans mes études due à mon échec à l’examen d’entrée en master à Sciences Po Paris, l’an dernier. Mais rien ne presse, je compte retenter le concours cette année. Et en attendant, mon CV s’étoffe.
On a tendance à se focaliser sur les diplômes, les cours et les stages. Mon avis est qu’il est aussi très sain de tenter d’autres choses, de travailler, de s’engager dans des associations ou même en politique. Les activités extrascolaires façonnent la personnalité, permettent de développer d’autres compétences et surtout de rencontrer beaucoup de monde.
Aujourd’hui, j’espère pouvoir entrer à Sciences Po pour y finir mes études, avant de vraiment commencer ma carrière. En attendant, je peux dire que j’ai vécu pas mal de choses et que j’ai passé du bon temps. Parce qu’elle est là la seule donnée importante : le temps. Et l’important n’est pas forcément de traverser la période étudiante en en perdant le moins possible, au contraire. »
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La Zone d’expression prioritaire (ZEP) accompagne la prise de parole des 15-25 ans
La Zone d’expression prioritaire (ZEP) est un dispositif d’accompagnement à l’expression des jeunes de 15 à 25 ans par des journalistes professionnels. Via des ateliers d’écriture dans des lycées, universités, associations étudiantes ou encore dans des structures d’insertion, ils témoignent de leur quotidien et de l’actualité qui les concernent.
Tous leurs récits sont à retrouver sur la-zep.fr.
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Pour aider les 16-25 ans, leurs familles et les enseignants à se formuler les bonnes questions lors du choix des études supérieures, Le Monde organise la seconde saison d’« O21 / S’orienter au 21e siècle », avec cinq dates. Après Nancy (1er- 2 décembre), Lille (19 - 20 janvier), Nantes (16-17 février) et Bordeaux (2-3 mars), rendez-vous à Paris (samedi 17 et dimanche 18 mars 2018, à la Cité des sciences et de l’industrie).
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Il reste des places pour O21 Paris ! Entrée libre sur inscription.
En images : les temps forts d’O21, nos conférences pour s’orienter au 21e siècle, à Nancy
Pour inscrire un groupe de participants, merci d’envoyer un e-mail à education-O21@lemonde.fr. L’éducation nationale étant partenaire de l’événement, les lycées peuvent organiser la venue de leurs élèves durant le temps scolaire.