Ovation pour les ministres interprètes des « Monologues du vagin »
Ovation pour les ministres interprètes des « Monologues du vagin »
Par Gaëlle Dupont
Marlène Schiappa, Roselyne Bachelot et Myriam El Khomri interprétaient la pièce d’Eve Ensler au théâtre mercredi soir.
De gauche à droite : Roselyne Bachelot, Marlène Schiappa et Myriam El Khomri, dans les « Monologues du vagin », à Bobino (Paris 14e), mercredi 7 mars. / Svend Andersen
L’image est saisissante. Celle d’une secrétaire d’Etat en exercice, en robe noire et talons aiguilles rouges, lançant, depuis la scène d’un théâtre parisien : « Mon vagin sent très bon, merci ! » Entre les questions au gouvernement et le comité interministériel sur les droits des femmes du 8 mars, Marlène Schiappa, chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes au sein du gouvernement, a interprété, mercredi 7 mars, avec l’ancienne ministre de la santé Roselyne Bachelot et l’ancienne ministre du travail Myriam El Khomri Les Monologues du vagin, d’Eve Ensler, à Bobino, à Paris (14e). Un texte devenu un phénomène depuis sa création, en 1996, joué dans 140 pays et en 48 langues.
C’est justement l’effet visé par la pièce, qui martèle ce mot « qui ne sonnera jamais comme il faut », pour briser le tabou, le dépeindre dans toutes les situations, et, à travers lui, décrire l’oppression vécue par les femmes, leurs aspirations, leur plaisir. Tour à tour tragique et drôle, il décrit le désarroi d’une épouse que son mari oblige à se raser le sexe, celui d’une dame âgée qui parle « d’une cave où on n’a pas envie d’aller voir », ou encore le désespoir d’une femme violée, qui sent « un animal mort cousu par un épais fil de pêche noir » là où autrefois se trouvait « une douce prairie scintillante de rosée ». Le texte, constamment réactualisé, évoque le sort des femmes excisées, emprisonnées dans des burqas, assassinées…
Mais aussi la jouissance, à travers notamment le récit de l’amante de Fred, un adorateur du vagin, de celui d’une travailleuse du sexe lesbienne, ou du fantasme d’une culotte imaginaire équipée d’un « titilleur intégré », qui permettrait d’avoir des orgasmes « au supermarché, dans le métro, à l’Assemblée… » – la dernière mention a été ajoutée par la metteuse en scène Coralie Miller à destination de Marlène Schiappa, qui interprétait cette partie du texte. Le tout clos par un répertoire de gémissements d’anthologie.
Preuve, s’il en était besoin, que politique et théâtralité entretiennent des liens étroits, les interprètes d’un soir ont fait merveille dans l’exercice, déclenchant rires, applaudissements et une standing ovation finale. Chacune dans son registre, émouvant pour Myriam El Khomri, impertinent pour Marlène Schiappa, gouailleur et cabotin pour Roselyne Bachelot.
La place de ces femmes politiques était-elle sur la scène d’un théâtre ? Leur message est politique, répondent-elles. « Tous les moyens sont bons pour parler de l’égalité des femmes et des hommes à la veille du 8 mars, affirmait Marlène Schiappa à l’issue de la représentation. Y compris en dehors des endroits traditionnels comme les colloques sur les droits des femmes. » La pièce, rappelait Roselyne Bachelot « a une histoire citoyenne incroyable. En plus des comédiennes professionnelles, des femmes engagées l’ont toujours interprétée. Nous nous inscrivons dans cette filiation ». Les bénéfices de la soirée, organisée à l’initiative de Jean-Marc Dumontet, propriétaire du théâtre, ont été versés au Collectif féministe contre le viol.