TV – « Nox », les martyrs des catacombes
TV – « Nox », les martyrs des catacombes
Par Véronique Cauhapé
Notre choix du soir. La nouvelle série policière de Canal+ entraîne ses personnages dans les profondeurs de Paris et le téléspectateurs dans un voyage étouffant (sur Canal+ à 21 heures).
NOX - Le casting de la série dévoilé ! (bande annonce)
Durée : 00:26
Plusieurs impératifs ont guidé la création et l’écriture de Nox, la nouvelle série policière de Canal+. Les deux principaux étant de répondre à « l’appétit des abonnés pour le thriller » – en respectant, par conséquent, les figures imposées du genre – et de raconter une histoire circonscrite dans le temps, avec un début et une fin. Comprendre : sans que les auteurs aient à se préoccuper d’une éventuelle suite.
Ainsi se retrouve-t-on au cœur d’une intrigue dont les ramifications, tout comme les lieux où elle se tient, se liguent pour nous faire perdre le nord, et ce à plus d’un titre. Car il s’agit bel et bien dans Nox de nous mettre sens dessus dessous, au propre comme au figuré. En nous brinquebalant, de la surface aux profondeurs, de la lumière à l’obscurité, d’un Paris lumineux aux égouts nauséabonds. Là où disparaît un jour Julie Susini (Maïwenn) – bonne flic au caractère fougueux –, alors qu’elle est en train de poursuivre un gang de braqueurs de distributeurs de billets.
Rien à perdre
Sa mère, Catherine (Nathalie Baye), ex-membre de la police judiciaire mise à la retraite pour insubordination, amère, butée, persuadée de l’incompétence de la police, décide de foncer, entraînant au passage Raphaël (Malik Zidi), le coéquipier de Julie. Catherine prend tous les risques, bafoue les règles, passe outre les interdictions des responsables officiels. Elle n’a plus rien à perdre. Pas plus que Raphaël, fragile, indécis mais capable aussi d’une détermination d’égaré qui émeut.
C’est essentiellement sur ce duo que s’établissent les bases du récit, durant deux épisodes qui se donnent le temps de peaufiner la psychologie des personnages et la nature des liens qu’elle autorise. D’abord chien et chat, Raphaël et Catherine finissent par trouver leur point de rencontre dans le sentiment de culpabilité qu’ils ont en commun. Le premier parce qu’il se sent responsable de la disparition de Julie. La seconde parce qu’elle n’a jamais été très maternelle. Ces deux-là partagent aussi une pudeur des sentiments qui empêche une complicité immédiate. De leurs blessures ils tireront néanmoins le parti de ne rien craindre, tout comme celui de comprendre la noirceur humaine.
NOX - Une nouvelle enquête sur CANAL+ (bande annonce)
Durée : 00:25
Hélas, passé les deux épisodes, Nox bifurque. Négligeant la dimension psychologique au profit de l’action et du suspense, la série opère une plongée de plus en plus profonde dans les carrières souterraines parisiennes, ces entrailles urbaines où finissent les oubliés et les rejetés, SDF, sans-papiers… qui ne trouvent pas leur place en surface ; et où agissent les monstres, tortionnaires, tueurs et disséqueurs de cadavres.
Dans ce labyrinthe dont nous découvrons les zones, les recoins et les trappes en même temps que les protagonistes, dans le faisceau de leurs lampes torches, la mise en scène de Mabrouk El Mechri – qui privilégie dans ce décor restreint et accidenté les mouvements de caméra et les changements d’angle – donne le tournis. Une sensation physique que le réalisateur a sciemment choisi de nous faire vivre. Dommage qu’à trop vouloir étreindre il ait perdu le sens de l’équilibre. Et les auteurs, celui de la mesure. Le scénario ayant mérité qu’on le décharge des fausses ou inutiles pistes, personnages et artifices qui l’émaillent, dans le seul but, semble-t-il, de retarder le dénouement.
Nox, série créée par Frédéric Cavayé, Quoc Dang Tran et Jérôme Fansten. Réalisée par Mabrouk El Mechri. Avec Nathalie Baye, Malik Zidi, Maïwenn, Frédéric Pierrot (Fr., 2018, 6 × 50 min).