L’Assemblée nationale se penche sur le référendum calédonien
L’Assemblée nationale se penche sur le référendum calédonien
Par Patrick Roger
A la tête d’une mission d’information, Manuel Valls souhaite que la Nouvelle-Calédonie reste dans la République. Les députés examinent mardi le projet de loi organisant la consultation en novembre.
L’Assemblée nationale examine, mardi 13 mars, le projet de loi organisant la consultation sur l’accession à la pleine souveraineté de la Nouvelle-Calédonie, qui devrait avoir lieu le 4 novembre. L’ensemble des groupes politiques a approuvé en commission des lois, sur la base du rapport présenté par Manuel Valls, député (apparenté LRM) de l’Essonne, le texte qui avait été adopté par le Sénat le 20 février.
Le sujet du corps électoral appelé à prendre part au référendum étant ainsi évacué, le comité des signataires de l’accord de Nouméa du 5 mai 1998, qui se réunira le 27 mars à Matignon sous l’égide du premier ministre, Edouard Philippe, devrait à présent pouvoir se pencher sur la formulation de la question qui sera soumise à la consultation. Une deuxième étape importante.
A cet effet, M. Valls, également président de la mission d’information sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie, s’est rendu sur le territoire du 19 au 23 février, en compagnie du rapporteur, Christian Jacob (LR), de la présidente de la commission des lois, Yaël Braun-Pivet (LRM), et de Naïma Moutchou (LRM), porte-parole du groupe sur ce texte.
« Une démarche à la québécoise »
Une mission, comme il le dit lui-même, destinée à « déblayer le terrain avant le déplacement du président de la République », qui devrait aller en Nouvelle-Calédonie début mai. Là-bas, l’ancien premier ministre n’a pas hésité à exprimer publiquement son souhait que la Nouvelle-Calédonie reste française, au risque de braquer ses interlocuteurs indépendantistes. « A titre personnel », tient-il à préciser, mais le propos n’avait rien d’anodin.
« Pourquoi j’ai fait ça ?, poursuit le député de l’Essonne. Parce qu’il faut chercher à enjamber le référendum. Or, tout ce qui n’aura pas été traité avant la consultation sera plus difficile à traiter après. Et je crains que, si le non à l’indépendance est fort, les tenants du non demandent à en tirer mandat pour les élections territoriales de 2019. »
L’ancien rocardien – Michel Rocard avait été l’artisan des premiers accords de Matignon du 26 juin 1988 entre Jacques Lafleur et Jean-Marie Tjibaou – puis conseiller de Lionel Jospin lorsque celui-ci, à Matignon, conclut l’accord de Nouméa, estime qu’« il faut savoir s’émanciper des accords qui ont conduit l’évolution de la Nouvelle-Calédonie depuis trente ans. S’il faut garder tous les acquis, il faut accepter l’idée qu’une période s’achève ».
Lui-même, quand il était à Matignon, confesse avoir « caressé l’idée d’un troisième accord mais ça n’a pas été possible ». Si M. Valls pense qu’il faut laisser aux Kanaks la possibilité d’un droit à l’autodétermination – « une démarche à la québécoise » –, il ne croit pas, en revanche, que, « dans l’avenir, on puisse continuer à vivre avec les textes actuels, trois types de citoyenneté, trois listes électorales ».
« Valls a quand même quelques atouts »
M. Jacob n’est pas loin de rejoindre M. Valls. En tout cas quand il s’agit de se prononcer pour le maintien de la Nouvelle-Calédonie dans le giron de la République française. « La prise de position de notre mission a suscité le débat, se félicite le président du groupe LR de l’Assemblée nationale. Tant mieux. » Il souhaite que M. Macron, lorsqu’il se rendra sur place, prenne clairement position.
« Imaginez que le référendum ait lieu en métropole et que le président de la République n’ait pas un avis sur le rattachement à la France. Ce n’est pas possible », défend-il. Et il sait gré à l’ancien premier ministre de ne pas avoir dissimulé son opinion : « Valls a quand même quelques atouts, il connaît la Nouvelle-Calédonie et il connaît les gens. Ça lui donne une stature particulière. Et il n’est pas timide. »
En tant que présidente de la commission des lois, Mme Braun-Pivet, elle, est plus réservée. « L’objet de la mission n’est pas de prendre position. En aucun cas, nous ne sommes là pour orienter ou influencer les décisions du gouvernement ou le choix de la consultation. En même temps, il est difficile de demander à des personnalités comme l’ancien premier ministre ou le président du principal groupe d’opposition de ne pas dire ce qu’ils pensent », reconnaît-elle, fataliste.