Incendie meurtrier en Sibérie : les Russes manifestent pour réclamer la tête des autorités locales
Incendie meurtrier en Sibérie : les Russes manifestent pour réclamer la tête des autorités locales
Le Monde.fr avec AFP
Le feu s’est déclaré dimanche dans un centre commercial au cœur de Kemerovo. Le bilan est d’au moins 64 morts. Une journée de deuil national a été décrétée mercredi.
Les Russes réclamaient la tête des autorités locales et exigeaient justice à Kemerovo, alors que le pays observe mercredi 28 mars une journée de deuil après l’incendie meurtrier d’un centre commercial dû à des violations choquantes des règles de sécurité.
En visite à Kemerovo, ville industrielle de Sibérie de 550 000 habitants, le président Vladimir Poutine avait dénoncé la veille une « négligence criminelle » dans cette tragédie qui a fait dimanche 25 mars au moins 64 morts, dont 41 enfants.
Des manifestants demandent à ce que la sécurité soit améliorée, pour éviter qu’un nouveau drame ne se produise. / SERGEI KARPUKHIN / REUTERS
Des milliers de manifestants exigent des explications
Des milliers de manifestants s’étaient rassemblés mardi 27 mars sur la place centrale de Kemerovo pour pleurer les disparus et exiger des explications de la part des autorités.
« Qui est vraiment responsable ? », « Combien de victimes, réellement ? », « Des lampistes vont être condamnés, les rois s’en tireront », pouvait-on lire sur les pancartes des manifestants, parmi lesquels se trouvaient des proches des victimes ainsi que des rescapés.
L’annonce de l’arrestation de cinq personnes, parmi lesquelles des responsables du centre commercial et un membre de la sécurité, n’a pas suffi à calmer la colère des habitants qui craignent que les vrais coupables ne soient jamais punis et exigent le limogeage des responsables de la région.
Des rumeurs insistantes ayant fait état d’un nombre de victimes plus élevé qu’annoncé officiellement, le maire de la ville, Ilia Serediouk, a dû donner l’accès aux morgues à un groupe de protestataires.
Lorsque le vice-gouverneur de la région, Sergueï Tsiviliov, a rejoint les manifestants, il s’est fait interpeller par un homme, Igor Vostrikov, qui a affirmé avoir perdu sa femme, ses trois enfants et sa sœur dans l’incendie, et qui l’a accusé de « traiter les gens comme du bétail ».
« Jeune homme, qu’est-ce que vous voulez ? Vous faire de la publicité grâce à l’affliction générale ? », lui a lancé le vice-gouverneur, avant de demander plus tard pardon à genoux à la population et de promettre de punir les responsables.
Furieux, Igor Vostrikov, dont l’intervention a fait le tour d’Internet et des médias, a appelé les habitants de Kemerovo a se rassembler de nouveau samedi 31 mars.
Des manifestations dénonçant la « corruption meurtrière » et exigeant une enquête transparente ont également eu lieu mardi à Moscou et Saint-Pétersbourg.
Le centre commercial de Kemerovo, après l’incendie. / AP
Une série de négligences et de violations des normes
Issues de secours bloquées, salles de cinéma fermées à clé, système d’alarme en panne, membres de la sécurité incompétents, système anti-incendie défaillant : la liste des « violations flagrantes » relevées par les enquêteurs a suscité l’incompréhension et la colère dans un pays où des incendies meurtriers se produisent chaque année.
Les premiers résultats de l’enquête ont montré que les dirigeants du centre commercial avaient bénéficié d’une tolérance coupable de la part des autorités locales.
Le centre avait pu ouvrir en 2013 malgré des manques constatés dans la sécurité anti-incendie puis, sans difficulté, ignorer les injonctions faites par le ministère des situations d’urgence lors d’une inspection en 2016. Enfin, le lieu était officiellement enregistré comme entreprise de moins de 100 salariés, pour éviter d’être trop fréquemment contrôlé.
Par ailleurs, selon ce même comité d’enquête, plusieurs employés chargés de la sécurité du centre commercial ont fui les lieux au début de l’incendie, au lieu de prévenir les clients et d’organiser les évacuations.