Ecole de mode cherche apprentis tricoteurs
Ecole de mode cherche apprentis tricoteurs
Par Juliette Garnier
L’école de mode La Fabrique lance une formation aux métiers de la maille, pour remédier à la pénurie de personnels dans les ateliers de confection.
Aujourd’hui, la mode utilise plus de maille, notamment grâce au sportswear, par opposition au chaine et trame des chemises et tailleurs. / PASCAL PAVANI / AFP
La Fabrique, école de mode parisienne, inaugure, jeudi 12 avril, un nouveau département d’enseignement dévolu aux techniques de confection en maille. Quatorze étudiants devraient former la première promotion en septembre. Objectif : satisfaire le besoin des fabricants textiles pour pourvoir des postes techniques et de management au sein de leurs ateliers. Une formation au métier de programmateur sur machine à tricoter devrait suivre.
« La mode utilise plus de maille aujourd’hui », notamment grâce au sportswear, par opposition au chaine et trame des chemises et tailleurs, explique Chantal Fouqué, directrice de cette école née en 2013 de la réunion des programmes de formation de l’Ecole supérieure des industries du vêtement (ESIV) au management de la mode, des Ateliers Grégoire pour les métiers de la maroquinerie et de Novancia-IFA Adolphe Chauvin pour la scénographie des lieux de vente.
Titulaires d’un bac +3, les étudiants du département maille de La Fabrique suivront huit cents heures de formation technique pendant un an, puis ils seront formés, en alternance, pendant une autre année, à raison d’une semaine à l’école pour trois semaines en entreprise.
« Trop de stylistes et de marketeurs de la mode »
La Fabrique a investi dans une batterie de machines japonaises pour former ses étudiants aux tricotages linéaire et circulaire. « Au total, le budget s’élève à 300 000 euros », chiffre Mme Fouqué, en espérant que ces diplômés intégreront de grandes maisons françaises à des postes de management. Leur insertion professionnelle ne devrait guère poser de problèmes. « Près de 90 % des diplômés de l’école La Fabrique [350 élèves par an] trouvent un emploi », fait valoir Mme Fouqué.
Il lui reste à trouver les candidats à cette formation technique. Et ce n’est pas si simple, à en croire cette directrice d’école. « Les jeunes et leurs parents ignorent souvent les taux d’insertion obtenus après ce type de formation », constate cette dernière en déplorant un système d’enseignement supérieur, qui, dans le secteur de l’habillement, forme « trop de stylistes et de marketeurs de la mode et pas assez de techniciens ».
La difficulté de l’école La Fabrique à attirer des candidats est à l’image de celle qu’éprouvent nombre de fabricants textiles en France. Leurs carnets de commandes sont pleins. Mais ils peinent à remplir leur grille de planning de travail, tant ils ont du mal à former, recruter et conserver leur personnel.
Redonner « le goût du travail manuel »
Hervé Coulombel fait partie de ces patrons dépités. Celui qui, avec son associé, Xavier Lépine, a repris, en 2016, à la barre du tribunal Royal Mer, fabricant de vêtement en tricot et de pulls installé à La Regrippière (Loire-Atlantique), cherche des « coupeuses et un responsable de finition ». Concurrente de Saint James et Armor Lux, la marque fondée en 1946 est pourtant en pleine renaissance. Après une levée de fonds d’un million d’euros auprès du fonds Siparex, la direction de Royal Mer espère atteindre bientôt 3 millions d’euros de ventes.
En septembre, M. Coulombel projette d’embaucher une douzaine de personnes pour les former à ses machines et surtout les garder. « C’est le plus difficile », reconnaît le dirigeant. Lors de sa dernière phase d’embauches, « 54 personnes ont visité l’entreprise, 30 ont passé des tests, 20 ont été retenues et 12 ont été embauchées », se rappelle-t-il. Un an et demi après, compte tenu des démissions, « il n’en reste plus que 6 dans l’entreprise », déplore-t-il.
Dès lors, la création d’un département maille, au sein de La Fabrique, fusse-t-il dans une école parisienne située à 400 km de ses ateliers, pourrait être salutaire. Redonner « le goût du travail manuel » et modifier « la façon de les percevoir » doivent être une priorité en France, estime ce dirigeant. Toutefois, convient-il, réhabiliter ces métiers aux yeux des jeunes générations ne se fera pas « en trois jours ».