Poursuite des affrontements au troisième jour des expulsions à Notre-Dame-des-Landes
Poursuite des affrontements au troisième jour des expulsions à Notre-Dame-des-Landes
Le Monde.fr avec AFP
Edouard Philippe a écarté toute interruption des opérations.
Des zadistes dans un nuage de gaz lacrymogènes, mercredi 11 avril 2018, dans la ZAD de Notre-Dame-des-Landes. / LOÏC VENANCE / AFP
Au troisième jour des expulsions dans la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, la confrontation se poursuit entre gendarmes mobiles et zadistes retranchés derrière des barricades.
Reprise des heurts à l’aube
Les heurts ont repris mercredi peu avant 7 heures non loin de la D281, route dite « des chicanes ». Les gendarmes épaulés d’un hélicoptère et d’un drone ont répliqué par des tirs de grenades lacrymogènes et à effet de souffle aux divers projectiles (pierres, mottes de terre, bouteilles) lancés par quelque 70 zadistes massés derrière des barricades de fortune sur la route des « Fosses noires ». Les opposants ont mis le feu à l’une des quatre barricades puis à une carcasse de voiture et à des caravanes pour freiner la progression des gendarmes.
Les heurts se sont ensuite déplacés dans un champ voisin, où un face-à-face opposait toujours à la mi-journée 150 zadistes, armés de boucliers artisanaux et de raquettes pour renvoyer les grenades, aux forces de l’ordre. C’est dans ce petit carré de bocage partiellement boisé, qui jouxte la route des chicanes, que se concentrent les affrontements depuis lundi.
A proximité, au « camp des cheveux blancs », les opposants ont appelé à 13 heures à un « grand pique-nique de protestation ». D’après une porte-parole de la gendarmerie sur Franceinfo, « 150, 200 » personnes « sont venues renforcer » les zadistes.
Mobilisation des opposants historiques
En détruisant les lieux de vie installés autour de la D281, où se cristallisaient les tensions depuis l’abandon du projet d’aéroport, les gendarmes ont détruit au passage des projets agricoles collectifs. D’où la colère de l’Acipa et un sentiment de trahison exprimé mardi par des zadistes qui estiment avoir joué le jeu avec la préfecture et avoir été floués.
L’importance de l’opération a amené les opposants à appeler à la mobilisation. « Si ce soir la préfecture ne retire pas ses troupes, c’est la mobilisation générale », avait lancé mardi Julien Durand, porte-parole de l’Acipa, principale association d’opposants à l’ex-projet d’aéroport.
Bilan
Mardi, les heurts ont été plus violents que la veille, avec vingt-huit gendarmes blessés dont dix retournés sur le terrain, selon un dernier bilan officiel.
Selon le bilan mercredi matin de l’équipe médicale des zadistes, une vingtaine d’opposants ont été blessés, dont un a été hospitalisé, après une trentaine mardi, dont deux hospitalisés. Un photographe de l’Agence France-Presse a été légèrement blessé aux jambes par les éclats d’une grenade.
Selon la cour d’appel de Rennes, plusieurs enquêtes ont été ouvertes à la suite des blessures infligées lundi et mardi à treize gendarmes, essentiellement par des jets de projectiles.
Un mineur interpellé lundi matin pour jets de projectile a été placé en détention provisoire mardi par le parquet d’Angers et une autre personne a été placée en garde à vue mardi pour « participation à un attroupement », a précisé la cour d’appel.
Edouard Philippe répond à deux députés LRM
Edouard Philippe a salué mercredi le « très grand professionnalisme » des gendarmes et des forces de l’ordre qui mènent l’expulsion en écartant toute interruption des opérations. « Les opérations se déroulent conformément au calendrier qui avait été envisagé (…) les opérations vont se poursuivre dans le même esprit, avec la même fermeté et avec la même mesure », a déclaré le premier ministre lors des questions au gouvernement à l’Assemblée nationale.
Matthieu Orphelin et François-Michel Lambert, deux députés La République en marche (LRM) réclament « une pause » dans l’évacuation de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes. Mardi soir, le député des Bouches-du-Rhône François-Michel Lambert (LRM, issu des rangs écologistes) a demandé s’il n’était « pas temps de faire une pause dans l’opération » : « Il ne faudrait pas qu’un homme, une femme tombe », a-t-il déclaré sur Franceinfo. « Certains sont déterminés, je ne les cautionne absolument pas, mais à la fin, ça peut être un gendarme qui tombe, un journaliste… », a-t-il ajouté, soulignant que tout le monde « a en tête le drame de Sivens et de Rémi Fraisse ».
Calendrier
L’intervention pourrait « durer jusqu’à la fin de la semaine », selon le ministre de l’intérieur, Gérard Collomb, qui a mobilisé près de 2 500 gendarmes. Selon la préfecture, 16 sites ont été évacués lundi et mardi. Parmi eux, 15 ont été démolis. La préfète de la région, Nicole Klein, a annoncé mardi que l’objectif était de démanteler « 30 à 40 » sites. Malgré les tensions, Mme Klein a assuré mardi soir que « le dialogue » n’était « absolument pas interrompu » et « reprendra[it] aussi vite que possible ».