Choisi par Trump pour diriger sa diplomatie, Mike Pompeo lisse son profil de « faucon » au Sénat
Choisi par Trump pour diriger sa diplomatie, Mike Pompeo lisse son profil de « faucon » au Sénat
Par Gilles Paris (Washington, correspondant)
La confirmation au poste de secrétaire d’Etat de l’ancien représentant républicain du Kansas, âgé de 54 ans, qui dirigeait la CIA depuis un an, n’est pas acquise.
Mike Pompeo lors de son audition par la commission des affaires étrangères du Sénat américain, jeudi 12 avril. / Alex Brandon / AP
Mike Pompeo est en quête d’une majorité au Sénat pour accéder au poste de secrétaire d’Etat des Etats-Unis vacant depuis le limogeage de Rex Tillerson. Son audition par la commission des affaires étrangères, jeudi 12 avril, a cependant montré que ses marges de manœuvres sont étroites.
Un an plus tôt, lors de la procédure de confirmation au poste de directeur de la CIA qu’il a occupé jusqu’à sa nomination par Donald Trump en mars, l’ancien représentant républicain du Kansas, âgé de 54 ans, avait pu compter sur le soutien de quinze voix démocrates. Tout donne à penser que sa marge sera beaucoup plus réduite cette fois-ci alors qu’un sénateur républicain, Rand Paul (Kentucky) a d’ores et déjà fait savoir qu’il s’opposera à sa nomination, et qu’un second, John McCain (Arizona), ne pourra pas prendre part au vote du fait de son état de santé.
Précédé par une réputation de « faucon » nourrie par de nombreuses prises de position contre l’Iran ou la Corée du Nord, Mike Pompeo a répété que « la guerre est toujours et doit toujours être en dernier ressort », en s’appuyant sur son expérience sous les drapeaux, au début de sa carrière.
Proximité incontestée avec le président
Il a tenté de mettre en évidence deux atouts qui ont cruellement manqué à son prédécesseur. Tout d’abord, une proximité incontestée avec le président des Etats-Unis. « Chaque ancien secrétaire d’Etat avec qui j’ai parlé a souligné l’importance de maintenir une relation étroite avec le président. J’ai travaillé à établir ce genre de relation avec le président Trump au cours des quinze derniers mois grâce à des centaines d’heures de briefings », a-t-il expliqué.
Dans une critique implicite envers Rex Tillerson, il a mis en avant une capacité à gérer une structure administrative dont il a fait la preuve selon lui à la CIA, alors que le département d’Etat a été affaibli par un exode sans précédent de hauts fonctionnaires démobilisés par son prédécesseur. « Il est primordial de renforcer le meilleur corps diplomatique au monde », a-t-il assuré.
Les sénateurs républicains qui ont plaidé pour sa nomination ont mis ces atouts en avant, tout comme son parcours de major de sa promotion de la prestigieuse académie militaire de West Point, devenu par la suite un homme d’affaires prospère, puis un élu pendant six ans à la Chambre des représentants.
Evasif sur l’Iran et la Corée du Nord
D’autres, à commencer par le président républicain de la commission, Bob Corker (Tennessee), qui ne cache pas ses critiques vis-à-vis du président, se sont cependant interrogés sur la nature du lien noué avec Donald Trump. Bob Corker lui ainsi a demandé s’il serait capable de « donner des conseils au président qui lui permettent de voir une situation donnée de manière globale » quitte à le contredire, rappelant que le président n’a pas hésité à écarter les conseillers défendant des vues opposées aux siennes. Le vice-président démocrate de la commission, Robert Menendez (New Jersey) a souligné l’importance de ce rôle face à une présidence « guidée par les coups de tête et pas par une stratégie ».
Autant l’ancien directeur s’est exprimé de manière claire sur le recours, vanté pendant la campagne par Donald Trump, à la torture, qu’il a jugée « interdite par la loi » ou bien sur la nécessité de la fermeté face à la Russie, autant il s’est montré plus évasif sur les deux sujets qu’il aura à traiter en priorité : le maintien des Etats-Unis dans l’accord sur le nucléaire iranien et le sommet annoncé entre M. Trump et le responsable de la Corée du Nord, Kim Jong-un.
Mansuétude d’élus démocrates
Pressé de questions, Mike Pompeo, qui avait milité activement contre l’accord iranien, a assuré que sa priorité consisterait à combler les lacunes supposées du compromis, et qu’un retrait des Etats-Unis à l’échéance fixée par le président, le 12 mai, ne refermerait pas, selon lui, la voie de la diplomatie.
« S’il s’avère qu’il n’y a aucune chance de l’améliorer, je recommanderai au président de faire de notre mieux avec nos alliés pour trouver un meilleur résultat et un meilleur accord. C’est ça l’objectif », a-t-il assuré, alors que les partenaires européens des Etats-Unis signataires du texte ont exclu toute réécriture, tout comme l’Iran, et prônent au contraire des dispositifs annexes pour répondre aux inquiétudes américaines sur l’influence iranienne au Moyen-Orient, ou sur ses activités balistiques.
Conscient de la défiance que ses prises de position passées sur l’islam ou sur le mariage homosexuel ont alimenté chez les démocrates, Mike Pompeo a pris soin de rencontrer les deux anciens secrétaires d’Etat de Barack Obama, Hillary Clinton et John Kerry, pour solliciter leurs conseils. Il mise désormais sur la mansuétude d’élus démocrates engagés dans une campagne de réélection délicate dans des États républicains, en Virginie-Occidentale ou dans le Dakota du Nord, pour obtenir les voix nécessaires pour pouvoir prendre la tête de la diplomatie américaine.