Lucas, 20 ans, étudiant en bio-ingénierie à Bruxelles.

Voix d’orientation. Le Monde Campus et La ZEP, média jeune et participatif, s’associent pour faire témoigner lycéens et étudiants de leurs parcours d’orientation. Cette semaine, Lucas S., 20 ans, étudiant en bio-ingénierie à Bruxelles.

« Après mon bac technologique STI2D, j’ai voulu me diriger vers un DUT informatique. Les technologies me passionnaient et je voulais devenir ingénieur en informatique. Mais je n’ai pas été pris malgré mon dossier, entre 12 et 13 de moyenne sur l’année, et mon bac avec mention assez bien ! J’ai appelé un des DUT, ils m’ont répondu qu’il y avait trop de demandes. Ils annonçaient que ce DUT comptait à peu près un équilibre entre les bacheliers S et STI2D. Mais j’ai appris que ce quota n’était pas respecté sous prétexte que… « les STI2D réussissent moins ». Ils privilégiaient les S pour avoir un meilleur taux de réussite.

J’ai finalement été accepté en licence maths-info. Il y avait de l’informatique et c’était le plus important pour moi, mais après un bac technologique, je n’étais pas préparé pour l’université. Le niveau était bien trop élevé (j’ai dû me mettre à niveau en maths et en physique, en plus des cours qui avançaient assez vite). J’ai décroché en décembre et arrêté les cours. J’étais découragé, mais j’ai quand même postulé à nouveau en DUT informatique pour la rentrée décalée de février. Une fois encore, j’ai été refusé. Ça a été le coup de grâce. Cet échec m’a dégoûté de l’informatique en général et même de continuer un parcours scientifique. Je me sentais très mal, à ne pas savoir quoi faire de ma vie. Depuis notre plus jeune âge, on nous bassine qu’il faut trouver sa voie rapidement sous peine de devenir inutile à la société. Les profs nous « menaçaient » de redoublement si on ne travaillait pas correctement. J’ai donc vu ce refus comme une punition plutôt qu’une nouvelle chance de réussir.

Pression sociale

J’ai alors travaillé en fast-food de février à septembre puis je me suis réorienté, par défaut, en LEA (langues étrangère appliquées) anglais-espagnol. Je me disais : « J’aime bien les langues, on verra bien, peut-être que ça me plaira. » J’ai de nouveau arrêté, parce que, cette fois, ça ne me correspondait pas. Je n’étais pas très littéraire, ce qui pose un peu problème dans cette filière...

Retour à la case départ, à me poser des questions existentielles et à douter de mes capacités. Avec en plus la pression de mes parents qui s’inquiétaient que je ne trouve pas ma voie et de me voir malheureux. Une pression sociale aussi. Voir mes amis quasiment finir leur deuxième année et entamer la troisième. Je savais que je n’étais pas seul dans cette situation, mais ça ne m’aidait pas à me sentir mieux. Ils me soutenaient, mais je me sentais nul à côté d’eux. Eux qui étaient en train de réussir. J’évitais donc le sujet autant que possible.

Pour ne pas rester inactif, j’ai trouvé un job de livreur à vélo. Puis j’ai pris rendez-vous avec une conseillère d’orientation, j’ai fait des tests de personnalités et des recherches internet vraiment approfondies sur différentes filières et débouchés. J’ai finalement « trouvé  » ma voie : l’environnement. Mais je savais qu’après deux échecs j’avais très peu de chance d’être pris dans un DUT ou en BTS, car ils ont des places limitées et sélectionnent sur dossier, et le mien n’était pas fameux. Je suis allé en Belgique en bio-ingénierie. C’est un bachelier [équivalent belge pour une licence] qui mène à un master dans les métiers de l’environnement, l’agronomie, les énergies renouvelables. J’ai repris goût aux sciences et je me sens mieux.

Je n’ai pas choisi un cursus simple

J’ai deux ans de « retard » par rapport aux gens de mon âge mais ce n’est pas un problème. Quitte à redoubler à nouveau si besoin (les sciences ce n’est pas comme le vélo, ça se perd, donc c’est possible...) ! Je ne vois plus ça comme une punition. Il faut s’habituer de nouveau aux horaires de cours, à travailler à la maison ensuite, à retrouver un rythme d’étudiant en fait.

Pour l’instant, j’ai du retard, car je me retrouve avec certains cours dont je n’ai jamais entendu parler au lycée, comme la biologie ou la chimie organique. Et j’ai du retard par rapport aux étudiants fraîchement sortis du lycée et qui ont moins oublié les notions importantes. Je sens que je galère. Vraiment. Je n’ai pas choisi un cursus simple en plus. Mais le fait que cela me plaise et que j’y voie un avenir me motive. Peu importe le temps que je mettrai pour réussir (pas trop si possible, j’aimerais en voir le bout !). En tous les cas, l’échec me fait bien moins peur qu’avant.

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La Zone d’expression prioritaire (ZEP) accompagne la prise de parole des 15-25 ans

La Zone d’expression prioritaire (ZEP) est un dispositif d’accompagnement à l’expression des jeunes de 15 à 25 ans par des journalistes professionnels. Via des ateliers d’écriture dans des lycées, universités, associations étudiantes ou encore dans des structures d’insertion, ils témoignent de leur quotidien et de l’actualité qui les concernent.

Tous leurs récits sont à retrouver sur la-zep.fr, et, pour la plupart, ci-dessous :

« Le Monde » aide les jeunes à s’orienter vers les études supérieures

Alors que les lycéenscommenceront, le 22 mai, à recevoir des réponses concernant leurs voeux d’orientation formulés de janvier à mars sur la nouvelle plate-forme d’admission post-bac, Parcoursup 2018, Le Monde Campus propose reportages, décryptages, tchats, à retrouver dans ses sous-rubriques Parcoursup APB et Etudes supérieures.

Retrouvez également des vidéos, témoignages et enquêtes réalisés dans le cadre de nos conférences « O21/S’orienter au 21e siècle », qui se sont tenues entre novembre et mars à Nancy, Lille, Nantes, Bordeaux et Paris, dans notre rubrique O21.