Patrick Duffy, alias Bobby Ewing dans « Dallas » ou Mark Harris dans « L’Homme de l’Atlantide », présentera à Lille les épisodes préférés de ces deux séries. / SérieMania

Jeffrey Bledsoe et Jeanne Pélissier, directeur et directrice adjointe de production du festival Séries Mania, sont ceux qui, depuis sa naissance en 2010, prévoient et dirigent tous les postes participant à son bon fonctionnement. Entretien à dix jours de Séries Mania, qui, du 27 avril au 5 mai, s’installera pour la première fois à Lille, dans les Hauts-de-France.

Que signifie le terme « production », s’agissant d’un festival ?

Cela consiste avant tout à mettre en place et coordonner une équipe capable de faire face à tout type de problème dans l’urgence : matériel défectueux, recherche d’un invité donnant une masterclass mais introuvable ou exigence non prévue d’un studio. Les responsables de la production doivent faire en sorte que le festival fonctionne au mieux, sans que les rouages soient visibles.

Comment vous y prenez-vous ?

Bien en amont de l’événement, nous bâtissons un budget prévisionnel pour un programme qui n’existe pas encore, et sans connaître la hauteur des financements disponibles. Cette année, pour faire sortir ce festival de terre, nous avons dû très vite recruter une équipe lilloise, d’une dizaine de personnes, en plus de la petite équipe parisienne. Une fois constituée, nous avons commencé le repérage des structures culturelles à même d’accueillir tous les événements de Séries Mania. Ce qui n’a plus rien à voir avec ce que l’on faisait au Forum des images à Paris. A partir de cette édition, nous investissons une ville entière, avec des actions ou des animations dans différentes parties de Lille. Ce qui suppose beaucoup de temps passé sur le terrain.

Le dossier « anti-piratage » des séries fait-il partie de votre mission ?

Nous avons monté, pour la ville et la préfecture, un plan d’occupation de l’espace public, et avons recruté des prestataires en sécurité, qu’il s’agisse du contrôle de passage du public ou de la garde rapprochée de certains de nos invités. Sans oublier bien sûr la sécurité infrarouge : dans la mesure où la plupart des séries que nous proposons sont projetées en première mondiale, certains studios américains exigent des agents de sécurité munis de lunettes à infrarouge afin d’éviter tout piratage de leur série et leur divulgation sur Internet.

Autre invité de marque de Séries Mania : Jeremy Podeswa, réalisateur notamment sur « Game Of Thrones », « True Detective », « Homeland ». / SériesMania

Beaucoup ne se joue-t-il pas pour vous le dernier mois avant l’ouverture du festival ?

Dès qu’une ébauche de programme se dessine, vers février, il s’agit pour nous de transformer ce programme en événement. Et dès que les premiers noms des invités nous sont connus, commence l’aspect plus précisément logistique de leur transport, leur hébergement, etc. Mais il est vrai que ce n’est qu’une fois la programmation définitivement établie, soit un mois avant l’ouverture du festival, que le plus gros du travail débute.

Nous devons alors organiser l’arrivée et le retour de 70 à 80 personnes du monde entier. Chacun devant disposer d’une feuille de route très détaillée (transport, hébergement, interprètes, planning des créneaux presse, coiffure, maquillage, des visites et des dîners). A quoi s’ajoute éventuellement le ou la conjoint(e), ainsi que leur entourage. C’est donc parfois tout un petit groupe qui se déplace et qu’il faut installer, certains invités venant aussi avec leur propre coiffeur ou maquilleur.

Cela vaut surtout pour les invités américains ?

Les talents américains sont souvent hyper-protégés par leur entourage, qui peut comprendre leur représentant pour la presse, leur manager, un assistant, un représentant-presse spécifique à leur série, le studio qui a produit la série, et la direction de communication de ce studio. Sans oublier les représentants de la chaîne de diffusion en France. Si on oublie un ou des membres de cet entourage, ils se rappellent à nous. Or chacun a sa propre idée de ce que l’invité de marque souhaitera pendant son séjour en France. Il est donc souvent délicat, pour nous, de déterminer ce que veut réellement la star, faute d’un coordinateur de l’ensemble de cet entourage. Un exemple : lorsque c’est nous qui leur choisissons un coiffeur et un maquilleur, il faut aussi les convaincre que ces professionnels seront parfaits pour eux, ce qui n’est pas la chose la plus aisée à faire par téléphone ou mail.

Parmi les invité(e)s d’honneur : Charlie Covell, actrice et scénariste, notamment de «The End of the F***ing World ». / SériesMania

Le déplacement des invités de Paris à Lille en plein mouvement social de la SNCF doit être un véritable casse-tête ?

Quatre jours de grève sont prévus, sur les dix jours que dure le festival. Cela bouleverse tous nos plans. Nous devons mettre en place des solutions pour faire venir les invités comme prévu. Notre budget ne permettant pas d’envisager des hélicoptères, nous prévoyons des rotations en car jusqu’à Charles-de-Gaulle et Bruxelles, les aéroports internationaux les plus proches de Lille, et d’autres jusqu’à Paris intra-muros. C’est un énorme travail supplémentaire, alors que le dernier mois est déjà le plus chargé pour la production.

Fort heureusement, nous pouvons compter sur une très belle équipe de 150 bénévoles environ pour nous seconder. Avec l’arrivée de Séries Mania à Lille, nous avons reçu un accueil absolument extraordinaire : extrêmement chaleureux et enthousiaste, avec beaucoup de gens prêts à s’impliquer. Ce qui nous a beaucoup aidés. En fait, nous découvrons une ville qui a la culture du bénévolat.