Inde : un influent gourou condamné à la prison à perpétuité pour viol
Inde : un influent gourou condamné à la prison à perpétuité pour viol
Le Monde.fr avec AFP
Les condamnations de telles personnalités sont hautement sensibles dans le pays et font redouter une explosion de violence dans les rangs des personnes qui les suivent avec dévotion.
La police escortant Asaram Bapu à sa sortie de l’aéroport après son arrestation à Jodhpur, en septembre 2013. / STRINGER / REUTERS
La justice indienne a condamné mercredi 25 avril l’influent gourou Asaram Bapu à la prison à perpétuité pour le viol d’une disciple adolescente en 2013, a annoncé l’un de ses avocats. La défense a annoncé son intention de faire appel de ce jugement.
« Homme-dieu » de 77 ans à la tête de centaines d’ashrams (ces lieux isolés où les disciples d’une communauté vivent autour de leur maître) hindous en Inde et à l’étranger, Asaram était accusé d’agression sexuelle sur une fille de 16 ans sous prétexte de l’exorciser d’esprits maléfiques. Le gourou se targue de compter des premiers ministres et présidents indiens parmi ses adeptes.
Les condamnations de telles personnalités politico-spirituelles sont hautement sensibles dans le pays et font redouter une explosion de violence en Inde, où des millions de personnes les suivent avec dévotion. Aucun trouble n’a été signalé à ce stade, mais les autorités ont placé par précaution plusieurs régions d’Inde en état d’alerte et déployé des milliers de policiers par crainte de troubles des partisans du gourou.
L’année dernière, la condamnation pour viols d’un autre éminent gourou, Gurmeet Ram Rahim Singh, avait déclenché des émeutes de ses fidèles. Trente-huit personnes y avaient perdu la vie.
Plusieurs accusations
Surnommé « Babuji », Asaram a toujours démenti avoir violé cette adolescente et dénoncé les poursuites comme une conspiration politique. Il prêche à ses disciples de vivre dans le renoncement de leurs désirs sexuels. Les sermons de ce maître de yoga attiraient autrefois des foules immenses. Mais son aura a pâli ces dernières années en raison de son incarcération et des nombreuses poursuites contre lui.
Car ce dossier n’est pas le seul dans lequel son nom apparaît. Dans des procédures distinctes, toutes en attente de verdict, il est accusé d’un autre viol ainsi que d’être impliqué dans le meurtre de deux étudiants dans l’un de ses ashrams. Au moins deux de ses anciens proches, qui s’étaient retournés contre lui et étaient devenus des témoins-clés des enquêtes, sont morts assassinés en 2014 et 2015.
Asaram conserve toujours une importante base de disciples dans l’ouest de l’Inde – surtout au Gujarat, au Rajasthan et en Haryana – et son organisation est valorisée à des centaines de millions de dollars.
Pallier les carences de l’Etat
Les gourous, souvent des ascètes hindous, font partie depuis des siècles de la vie quotidienne des Indiens, qui estiment que leurs enseignements ouvrent la voie à l’éveil spirituel. Pour leurs détracteurs, certains de ces « hommes-dieux » modernes ne sont rien d’autre que des charlatans qui se servent de la religion comme moyen d’accéder au pouvoir, à la célébrité et à la richesse. Ces gourous trouvent souvent un auditoire auprès des masses en palliant les carences de l’Etat indien, grâce à des repas gratuits ou des services médicaux.
Mais des experts estiment que ces chefs spirituels, qui comptent aussi des fidèles parmi la classe moyenne citadine, permettent de donner un sentiment d’appartenance à une communauté et un sens à la vie dans une société en rapide mutation.