En Italie, la Ligue et le Mouvement 5 étoiles (M5S) doivent proposer, lundi 21 mai, le nom d’un président du conseil pour le pays, après avoir annoncé être tombés d’accord, dimanche, sur la composition du prochain gouvernement. Les deux partis ont respectivement remporté 17 % et 32 % des voix aux législatives de mars et, si l’accord a été si difficile à trouver, c’est parce que ces deux formations politiques sont très différentes – ce qui ne les empêche pas d’avoir plusieurs points communs.

Le M5S naît en 2009 de l’alliance d’un célèbre humoriste, Beppe Grillo, et d’un informaticien inconnu, Gianroberto Casaleggio, mort en 2016. Le parti découle d’un mouvement social anti-élites et anticorruption agrégé depuis 2005 autour du très populaire blog de l’humoriste. A l’inverse, la Ligue a été fondée en 1989 par Umberto Bossi en fusionnant la Ligue lombarde et dix mouvements régionalistes et autonomistes du nord de l’Italie.

Un parti d’extrême droite contre un OVNI politique

A l’origine, le M5S a pris ce nom pour énoncer cinq priorités : retour au public de la gestion de l’eau, zéro déchet, transports publics, énergies renouvelables et Wi-Fi gratuit. Le 5, écrit en chiffre romain (V), fait aussi référence au vaffanculo fondateur. Dans les faits, il est inclassable politiquement, véritable OVNI politique. Le V-Day (V pour vaffanculo, « va te faire foutre »), les 8 et 9 septembre 2007, joue un rôle fondamental pour le parti. Des rassemblements sont organisés dans toute l’Italie et plus de 300 000 signatures sont recueillies en faveur d’une initiative appelée « Parlamento pulito » (« Parlement propre »). Objectif : interdire l’entrée au Parlement des personnes condamnées par la justice et limiter à deux mandats successifs les carrières parlementaires.

Rien à voir avec les revendications de la Ligue. A ses débuts, elle réclame l’indépendance de la Padanie. Cette région imaginaire correspond à la plaine du Pô. Elle regroupe le Piémont, la Lombardie, le Frioul-Vénétie-Julienne, le Val d’Aoste, la Vénétie et l’Emilie-Romagne. En pratique, les « Padans » n’ont ni langue commune, ni spécificité religieuse, ni unité politique passée. La Ligue du Nord transforme les préjugés préexistants, par exemple sur la supposée fainéantise des Italiens du Sud, en un clivage ethnique. Elle défend depuis longtemps – et en parallèle – le fédéralisme.

A l’automne 2017, un pas de plus est fait vers le fédéralisme, ligne portée par Matteo Salvini, patron du parti depuis 2013. La Ligue change de nom, passant de Ligue du Nord à la Ligue tout court. Objectif : devenir un parti national dans la perspective des législatives de 2018.

L’inspiration initiale du M5S se trouve ainsi plutôt à gauche, dans la lutte contre les politiques d’austérité appliquées dans le pays à la suite de la crise de la dette dans la zone euro. A l’inverse, les discours de la Ligue puisent dans les différences socio-économiques italiennes, cultivant les thématiques d’un pays à deux vitesses dans lequel le Sud serait un poids pour le Nord.

Divergences de programmes et populisme

Côté programme, le M5S entretient le flou. Sur la question migratoire, le fondateur du M5S s’est déclaré plusieurs fois contre le droit du sol ou pour le durcissement du droit d’asile – sans toujours être suivi par sa base. De son côté, la Ligue est résolument xénophobe et anti-immigration. Autre divergence : la Ligue ne voit dans le revenu citoyen (780 euros par mois) proposé par le M5S que de l’assistanat. Le M5S critique quant à lui la « flat tax » sur le revenu défendue par la Ligue.

Néanmoins, le M5S n’en est pas à sa première alliance avec l’extrême droite. En 2014, au Parlement européen, il s’est allié avec le parti d’extrême droite britannique UKIP. Surtout, les deux mouvements pourraient s’entendre sur les retraites, étant tous les deux d’accord pour abroger la réforme qui recule l’âge du départ.

Concernant la sécurité, le M5S comme la Ligue plaident pour une augmentation des effectifs des forces de l’ordre. Le M5S se disait favorable à la sortie de l’euro jusqu’aux législatives 2018 et la Ligue y reste favorable. Les deux formations ont pour principaux points communs d’être antisystèmes et populistes.