Au Maroc, les accusés du « Hirak » boycottent leur procès
Au Maroc, les accusés du « Hirak » boycottent leur procès
Le Monde.fr avec AFP
Les prévenus dénoncent la « partialité » de la justice face au mouvement de protestation qui a agité la région du Rif en 2016 et 2017.
La plupart des accusés du « Hirak », un mouvement de protestation qui a agité entre fin 2016 et mi-2017 la région historiquement frondeuse et marginalisée du Rif, dans le nord du Maroc, ont boycotté, mardi 19 juin, une nouvelle audience de leur procès pour dénoncer la « partialité » de la justice. Cinquante-quatre accusés sont jugés en première instance, depuis mi-septembre, devant la chambre criminelle de la cour d’appel de Casablanca. Les charges pesant sur eux vont du simple délit à l’atteinte à la sécurité de l’Etat, en théorie passible de la peine capitale.
Les prévenus, qui avaient été entendus lors d’audiences précédentes, ont informé le tribunal qu’ils boycotteraient l’audience de mardi et les suivantes via une lettre collective dont l’AFP a eu copie. Les plaidoiries de la partie civile, qui représente l’Etat, ont donc commencé en leur absence. Les avocats ont souligné que les forces de l’ordre avaient « subi des violences » pendant les manifestations qui ont agité la région. Ils ont aussi mis en avant les « efforts de l’Etat pour répondre aux demandes des manifestants » et tenter d’apaiser le mouvement.
Me Brahim Rachidi, qui représente l’Etat, a plaidé pour que « les responsables des agissements commis contre les forces de l’ordre soient punis conformément aux réquisitions du parquet ». Un autre avocat, Me Abdelkabir Tabih, a souligné le caractère « sacré » et « inviolable » des mosquées, en référence aux accusations pesant sur le leader de la protestation, Nasser Zefzafi. Ce dernier est notamment jugé pour avoir interrompu le prêche d’un imam hostile au mouvement dans une mosquée d’Al-Hoceïma, épicentre de la protestation.
« Approche sécuritaire »
Environ 450 personnes, selon des associations, ont été arrêtées pendant les événements déclenchés par la mort d’un vendeur de poissons broyé dans une benne à ordures en tentant de s’opposer à la saisie de sa marchandise, en octobre 2016. La plupart du temps pacifiques, les manifestations qui réclamaient la fin de la « marginalisation » de la région ont parfois été marquées par des heurts entre forces de l’ordre et protestataires, avec des blessés des deux côtés.
Les autorités ont justifié les arrestations par la nécessité de « faire respecter la loi » face aux « violences » qui ont fait, selon elles, plus de 900 blessés chez les forces de l’ordre. L’« approche sécuritaire » adoptée par les autorités a été critiquée par des associations de défense des droits humains, qui ont dénoncé la « répression » du mouvement et les tortures qu’auraient subies certains des meneurs après leur arrestation.