Dessin montrant Redoine Faïd lors de son procès à la cour d’assises de Paris, en février 2018, pour le braquage avorté, la fuite sur l’autoroute et la mort de la policière municipale Aurélie Fouquet à Villiers-sur-Marne (Val-de-Marne) en mai 2010. / BENOIT PEYRUCQ / AFP

Grand amateur de films de gangsters, Redoine Faïd pourra sans doute ajouter un nouveau chapitre à son livre autobiographique, Braqueur. Des cités au grand banditisme (éditions La Manufacture de livres), afin de renforcer sa légende, bâtie avec un soin minutieux. Le célèbre braqueur a réussi dimanche une évasion « extraordinaire » – selon le mot de la ministre de la justice, Nicole Belloubet – en s’exfiltrant de la prison de Réau (Seine-et-Marne) à bord d’un hélicoptère. Rodé aux cavales, il purgeait une peine de vingt-cinq ans de prison pour un braquage qui avait mal tourné et entraîné la mort d’une jeune policière, Aurélie Fouquet, ainsi qu’une peine de dix ans de réclusion pour une précédente évasion.

Lire le récit de cette nouvelle évasion spectaculaire : du braqueur Redoine Faïd

A 46 ans, Redoine Faïd est une figure du grand banditisme français. Né dans une famille nombreuse de Creil (Oise), dans une cité HLM, et fils d’un ouvrier d’origine algérienne, il commet son premier larcin à 6 ans, en sortant un caddie de supermarché rempli de confiseries. La « vocation », dit-il, est venue à 12 ans : il sera voleur. De la petite délinquance, il franchit rapidement les étapes en gagnant le surnom, par la police, de « terreur de Creil ».

« Il a côtoyé et fait partie de ce caïdat de cités HLM, cette nouvelle génération de voyous qui ont inventé les go-fast, vécu sur l’argent et le trafic de drogues, racontait il y a quelques années un policier. Lui s’est spécialisé dans les fourgons, car il aimait l’adrénaline et voulait ressembler aux plus grands qui ont snobé ou été dépassés par ces types dangereux et fêlés. »

Braquer un fourgon, « le top du top »

En janvier 2011, Redoine Faïd était apparu dans un reportage où des « caïds de cités » se flattaient d’en remontrer aux voyous « à l’ancienne ». Fanfaronnant face caméra, il expliquait que braquer un fourgon, « c’est le top du top ». Certaines sources policières affirment qu’il a appris au contact d’anciens militaires en Israël, un pays où il s’était réfugié durant une première cavale et où il rêvait de s’installer un jour.

La période où il se disait repenti, en 2010, lui a valu de nombreuses sollicitations des médias, dont la télévision, alors qu’il se disait cadre commercial. Surnommé « l’écrivain » dans les rangs de la police après la parution de son autobiographie, Redoine Faïd fait alors la tournée des plateaux de télévision en chemise blanche, assurant à son auditoire sous le charme avoir « tourné la page ». Il sera rapidement rattrapé par le banditisme. La justice le considère comme le « cerveau » du braquage avorté qui a entraîné la mort d’Aurélie Fouquet, mitraillée à l’issue d’une course folle sur l’autoroute le 20 mai 2010 dans le Val-de-Marne.

Il doit aussi sa réputation à ses deux spectaculaires évasions, inspirées, de son propre aveu, par le film Heat, de Michael Mann, qu’il a vu des dizaines de fois. Il avait étudié le fonctionnement des héros du film, appris qu’il faut aller au braquage avec minutie, « pas trop nombreux ». Et grimé, comme Robert De Niro.

« Il cachait toujours son jeu »

Le 13 avril 2013, il s’évade en moins d’une demi-heure de la prison de Lille-Sequedin. Il prend quatre surveillants en otages. « Vous n’allez pas vous faire tuer pour 1 500 euros par mois ! » leur lance-t-il, avant de les utiliser comme boucliers humains. Il fait exploser cinq portes au plastic, puis est récupéré en voiture par un complice. Sa cavale dure quelques semaines, avant qu’il ne soit interpellé fin mai 2013.

Selon un surveillant de prison qui l’a fréquenté récemment à Vendin-le-Vieil (Pas-de-Calais), « c’est quelqu’un qui n’est jamais en conflit avec le personnel, mais dont il faut toujours se méfier. Dans un coin de sa tête, il n’a jamais perdu l’idée de s’évader. Derrière ses bonnes manières – c’est quelqu’un de très poli –, il cachait toujours son jeu ».

Redoine Faïd a été condamné deux fois aux assises en 2017 : à dix ans de réclusion pour son évasion de la prison de Lille-Sequedin et à dix-huit ans de prison pour l’attaque d’un fourgon blindé dans le Pas-de-Calais en 2011. Il a fait appel de ces deux condamnations.

La fin du film Heat se termine mal : le gangster et héros, joué par Robert De Niro, est abattu après une longue course-poursuite sur les pistes de l’aéroport de Los Angeles. Celle de Redoine Faïd reste à écrire.