Chaque jour durant la Coupe du monde, Eddy Fleck et Maxime Mianat analysent la compétition à leur façon. Attention : cette chronique peut contenir du second degré.

Le parcours des Français est une bonne nouvelle pour mon rayonnement personnel. Le match face à l’Argentine a marqué un tournant émotionnel et l’engouement provoqué a dépassé le cadre des suiveurs habituels de football. Certains novices se montrent désormais dans les bars, n’hésitant pas à vibrer devant un sport qui ne les intéresse pas le reste de l’année et dont ils connaissent peu les règles. Ce n’est pas mon cas. J’ai une vraie carte à jouer.

Habituellement, je ne suis qu’un anonyme qui vibre devant Amiens-Toulouse et Guingamp-Bordeaux, seul. Passer une heure et demie devant ce type de rencontres et ne pouvoir en parler à personne est une souffrance indescriptible. Quand j’ai cherché à me confier auprès de ma psychologue, elle a réclamé mon placement en hôpital spécialisé parce que mon comportement l’inquiétait. Les compétitions internationales sont une bouffée d’oxygène. Je me balade dans les différents lieux publics de ma ville et je verrouille mes proies. Des hommes seuls de préférence, ne célébrant pas les buts parce qu’ils ne comprennent pas le principe et suffisamment alcoolisées pour accepter ma présence dérangeante.

Lors de France-Argentine, c’était Stéphane. Je l’avais repéré depuis une demi-heure et lorsqu’il a demandé au barman quel était le match du soir, j’ai tout de suite compris qu’il était largué. L’excitation est montée. Je me suis approché de lui et je l’ai abordé de la manière la plus naturelle possible : « Sais-tu qu’en termes d’expected goals, la performance de l’Argentine est très faible ? » Il ne m’a pas repoussé et j’ai pu le travailler au corps durant une bonne partie du match. A chaque action, je lui décrivais les mouvements des joueurs tout en lui expliquant les règles de base du football. Je pouvais enfin étaler l’intégralité de mes connaissances. Je me suis senti extrêmement bien jusqu’à ce que le videur me demande de quitter les lieux, alerté par Stéphane qui finit par me menacer avec son poing américain.

Les épisodes précédents de « Roulette russe »

Episode 1 : comment concilier Coupe du monde et vie de famille

Episode 2 : pourquoi il ne faut pas critiquer l’équipe de France

Episode 3 : pourquoi on ne sait pas encore si Griezmann pourra jouer contre l’Australie

Episode 4 : pourquoi le drapeau du Brésil n’est pas ce que vous croyez

Episode 5 : pourquoi les Anglais n’ont en réalité pas inventé le football

Episode 6 : pourquoi Pologne-Sénégal est un authentique derby

Episode 7 : pourquoi la Coupe du monde est un cauchemar pour les autres sportifs

Episode 8: pourquoi France-Pérou n’aura pas lieu

Episode 9 : pourquoi il y a toujours un drapeau algérien dans un stade

Episode 10 : pourquoi l’Antarctique est le grand absent du tournoi

Episode 11 : pourquoi il n’est pas raisonnable d’aimer à la fois Lionel Messi et Cristiano Ronaldo

Episode 12 : pourquoi on peut suivre la Coupe du monde sans aimer le foot

Episode 13 : pourquoi le dopage n’existe pas dans le football

Episode 14 : pourquoi 0-0 est le score parfait

Episode 15 : pourquoi le match Panama-Tunisie sera l’événement du soir

Episode 16 : pourquoi j’ai renoncé à la nationalité française durant la Coupe du monde

Episode 17 : comment échapper à un mariage le jour de France-Argentine ?

Episode 18: pourquoi les statistiques sont indispensables au football

Episode 19 : pourquoi les joueurs brésiliens choisissent-ils leur nom de famille ?

Episode 20: Comment expliquer la Coupe du monde à son enfant