Actions ou obligations, les gérants des fonds patrimoniaux cherchent des opportunités
Actions ou obligations, les gérants des fonds patrimoniaux cherchent des opportunités
Par Stéphane Le Page
Les fonds flexibles réduisent leur exposition aux actions, se méfient des obligations et gardent des liquidités pour réinvestir si les marchés chutent.
Des traders à la Bourse de New York mardi 10 juillet / Richard Drew / AP
Gestion collective. Dès qu’il y a une mauvaise nouvelle, les investisseurs s’empressent de prendre des bénéfices. Les sorties de Donald Trump, le président américain, et la situation politique européenne, notamment avec l’arrivée au pouvoir des mouvements populistes en Italie, engendrent du stress sur les marchés financiers.
« Le couple croissance mondiale-taux ne peut que se dégrader, s’inquiète Louis Bert, directeur général délégué en charge des gestions de Dorval AM et gérant de Dorval Convictions. Economiquement, nous sommes dans une nouvelle phase, celle de la maturité du cycle. La croissance mondiale, même européenne, n’accélère plus. Tous les banquiers centraux vont devoir relever à terme leurs taux d’intérêt. »
Dans ce contexte, heureux sont les gérants qui peuvent revoir, avec toute latitude, la part des actions, des obligations et des produits monétaires dans leur portefeuille. La gestion flexible ou patrimoniale offre cette souplesse. Et chaque société de gestion a sa propre recette. « Nous sélectionnons les actions et les obligations en fonction de leur valeur intrinsèque, et non en fonction du contexte macroéconomique, des cycles boursiers ou économiques. Si un événement macro ou géopolitique intervient, nous étudions les conséquences sur les sociétés », décrit Benjamin Biard, le directeur général délégué d’Amiral Gestion, qui propose notamment le fonds phare Sextant Grand Large.
La philosophie de Didier Bouvignies, responsable de la gestion chez Rothschild Martin Maurel AM et gérant du fonds R Club est différente : « Ma logique est de valoriser le patrimoine, d’avoir la liberté de ne pas être contraint par un indice de référence. Il faut réfléchir à avoir des fonds qui sont capables de générer de la valeur sur des cycles de cinq à dix ans, et ne pas vouloir limiter les baisses en raison d’éléments de court terme au risque de louper des hausses de long terme. » Selon Morningstar, fournisseur de recherche sur les placements, environ 600 fonds entrent dans la catégorie « allocation flexible », et il existe (presque) autant d’approches.
Fin de la reprise
En dépit de ces différences, les gérants de fonds flexibles s’accordent sur la marche à suivre dans le contexte boursier actuel. Depuis quelques mois, ils réduisent la voilure sur les actions. « Plus les marchés deviennent chers, plus nous alléguons la poche action dans le fonds. Celle de Sextant Grand Large est de 27,6 % », précise M. Biard. France, Japon, Corée du Sud forment le tiercé gagnant de ses placements actions. « Si la fin de la reprise approche sur les marchés mondiaux, l’Europe est toujours en phase de rattrapage », estime M. Bouvignies dont le fonds R Club est encore investi à plus de 50 % dans les actions de la zone euro.
Le Japon a également ses faveurs, ainsi que les secteurs cycliques, comme la construction, les médias et la finance, qui devrait bénéficier de la hausse des taux courts. « Tout en guettant les signaux de retournement, nous restons positifs sur les actions. Elles représentent entre 40 % et 60 % de nos portefeuilles. Nous parions sur la croissance domestique européenne et les valeurs cycliques qui vont en profiter », explique M. Bert.
Depuis plusieurs mois, la part des obligations a été drastiquement réduite dans la perspective d’une remontée des taux. « La poche obligataire ne représente que 11,5 % des encours du fonds. Nous privilégions les durations [durée de vie d’une obligation] courtes », se félicite Jacques Sudre, gérant obligataire chez Amiral Gestion et de Sextant Grand Large. La part des obligations s’élève à 28 % dans le portefeuille du fonds R Club de Rothschild Martin Maurel AM, « essentiellement en titres de la zone euro avec une duration moyenne de quatre ans », signale M. Bouvignies.
Position d’attente
« La moitié du fonds Dorval Convictions est investie en obligations à court terme de moins de neuf mois qui ne sont pas exposées au risque de taux », dit Louis Bert. Autant dire quasiment du cash. Les fonds ont en effet beaucoup de liquidités actuellement. « Nous sommes dans l’attente, avec une position cash importante pour protéger le portefeuille et être en mesure de réinvestir si les marchés chutent, déclare Jacques Sudre chez Amiral Gestion. 58 % de nos encours sont en trésorerie ! »
Les performances annualisées des meilleurs fonds sur cinq ans se situent autour de 10 %. Mais depuis le début de l’année, les scores sont disparates, des gestions s’adaptant mieux à la situation.