Affaire Benalla : le corapporteur LR suspend sa participation à la commission d’enquête de l’Assemblée
Affaire Benalla : le corapporteur LR suspend sa participation à la commission d’enquête de l’Assemblée
« Est-ce que l’Elysée souhaite torpiller les travaux de notre commission ? Je le crois, je le crains », a dénoncé le député Guillaume Larrivé.
Le ton est monté entre Yaël Braun-Pivet, présidente de la commission des lois, et son corapporteur Guillaume Larrivé, député LR. / LAURENCE GEAI POUR « LE MONDE »
Après avoir notamment regretté le refus, mercredi, de la présidente de la commission des lois et corapporteuse La République en marche (LRM), Yaël Braun-Pivet, d’accéder à ses demandes d’audition, le député Les Républicains (LR) Guillaume Larrivé, corapporteur, s’est dit « contraint », jeudi 26 juillet, de suspendre « sa participation » à la commission d’enquête, devenue « hélas qu’une parodie ». « Est-ce que l’Elysée souhaite torpiller les travaux de notre commission ? Je le crois, je le crains », a-t-il déclaré, avant d’accuser :
« Je pense qu’instruction a été donnée aux députés du groupe en marche de bâcler la préparation d’un vrai-faux rapport.
J’appelle une nouvelle fois la corapporteuse et les députés du groupe en marche à cesser de bloquer les travaux de la commission d’enquête dont les pouvoirs (…) expirent le 20 août. Il en va de la dignitié de l’Assemblée nationale, qui ne saurait être aux ordres de l’Elysée. »
Le co-rapporteur LR @GLarrive "suspend sa participation" à la commission d'enquête, devenue selon lui "une parodie"… https://t.co/t3oc0e1Ejz
— LCP (@LCP)
La déclaration de M. Larrivé a été suivie de quelques applaudissements de la part des députés de l’opposition.
« Choquée »
« Choquée », Mme Braun-Pivet lui a ensuite répondu, répétant que « si la majorité n’avait pas souhaité cette commission d’enquête », celle-ci « n’aurait pas eu lieu ». Puis elle a réaffirmé fermement l’indépendance de sa commission, avant de clôturer la séance :
« Nous sommes un Parlement qui remplit ses missions de contrôle, nous ne recevons d’ordre de personne ! »
La co-rapporteure LREM @YaelBRAUNPIVET se dit "choquée" par les propos de @GLarrive et se défend d'être "aux ordres… https://t.co/Isr6vJt2MX
— LCP (@LCP)
Avant la décision de M. Larrivé, le député de La France insoumise (LFI) Eric Coquerel avait critiqué une commission qui « tourne en rond » et incité la corapporteuse à démissionner, avant de suspendre sa participation et de quitter la salle.
Face à une commission qui "tourne en rond" et à "l'obstruction" de la part de la majorité, @ericcoquerel (LFI) inci… https://t.co/cxaChHgo2x
— LCP (@LCP)
« On peut être fiers de nos travaux »
Au sortir de la commission, Yaël Braun-Pivet a tenu à souligner le travail effectué :
« Cette commission a travaillé de façon très correcte, j’ai veillé à ce que toutes les oppositions puissent s’exprimer, que les députés non membres de la commission des lois puissent s’exprimer. Pendant les auditions, nos oppositions ont pu s’exprimer. Elles ne voulaient pas poser de questions, mais en faire une tribune médiatique. Moi, je crois que l’on peut être fiers de nos travaux. »
En revanche, la présidente de la commission a expliqué ne pas savoir si les travaux de la commission d’enquête pourraient se poursuivre après le départ du corapporteur.
De son côté, le député des Alpes-maritimes Eric Ciotti a abondé dans le sens de M. Larrivé, estimant lui aussi que la commission d’enquête est « une parodie », dont « l’objectif est d’étouffer la vérité » :
« Alors que le Sénat fait un traval très exhaustif, l’Assemblée nationale est contrainte par une volonté de l’Elysée. Les auditions ont été orientées. La commission est un échec total, parce qu’elle n’est pas libre, elle est bridée dans son fonctionnement. Elle n’a pas pu travailler parce que le groupe En marche n’a pas voulu qu’elle fonctionne. »
Une ambiance déjà électrique mercredi
Mercredi, l’ambiance au sein de la commission d’enquête était déjà électrique. Les députés de l’opposition, toutes couleurs politiques confondues, s’en sont directement pris à Mme Braun-Pivet pour avoir mis aux voix la liste des prochaines auditions, décidée par son groupe et annoncée une heure avant, lors d’une conférence de presse surprise, sans consulter l’opposition.
A la sortie de la commission d’enquête, des députés d’opposition avaient dénoncé une « mascarade », s’applaudissant les uns les autres pour défendre « les droits du Parlement ». De son côté, Guillaume Larrivé avait déjà dénoncé : « Notre commission est entravée par la volonté d’un homme : Emmanuel Macron, et par ses relais à l’Assemblée nationale aux ordres de l’Elysée. » Avant de « donner vingt-quatre heures à la corapporteuse pour se ressaisir ».
Notre sélection d’articles sur l’affaire Benalla
Retrouvez nos principaux contenus liés à l’affaire Benalla, du nom de l’ex-collaborateur d’Emmanuel Macron que Le Monde a identifié en train de molester un manifestant en marge des manifestations du 1er-Mai.
- Mercredi 18 juillet, Le Monde publie ses premières révélations et écrit avoir identifié Alexandre Benalla sur une vidéo mise en ligne dès le 1er mai sur YouTube.
- Le public découvre alors le visage de cet homme et de sa « bande », qui ne quitte jamais le sillage d’Emmanuel Macron depuis l’élection présidentielle.
- D’une ZUP d’Evreux jusqu’au premier cercle du président : récit d’une ascension mystérieuse.
- Rapidement, l’affaire est devenue un scandale d’Etat : retrouvez le déroulé des cinq premiers jours.
- Benalla, Mizerski, Crase... quels sont les personnages-clés de l’affaire ?
- A l’Assemblée, une commission d’enquête a mené des auditions dont vous pouvez retrouver l’intégralité sur nos suivis en direct du premier jour puis du deuxième jour.
- Le point sur les auditions de : Gérard Collomb, ministre de l’intérieur ; Michel Delpuech, préfet de police de Paris ; Patrick Strzoda, directeur de cabinet de l’Elysée.
- Dommage collatéral, l’examen de la révision constitutionnelle a été suspendu et ne reprendra pas avant la rentrée.
- Après une semaine de silence, Emmanuel Macron s’est finalement exprimé devant des députés en assurant qu’il était le « seul responsable » de l’affaire.
- Les plaignants se sont également exprimés via leur avocat qui les présente comme « des badauds qui venaient assister à une manifestation ».
- Pour Jean-Pierre Mignard, avocat pénaliste, proche du président Emmanuel Macron : « L’Elysée a sous-estimé la faute d’Alexandre Benalla. »
- Plus d’une semaine après les révélations du « Monde », l’ex-chargé de mission de l’Elysée, Alexandre Benalla, a accepté de répondre longuement à nos questions dans un entretien exclusif.