Pagaille dans le métro : la RATP entame son mea culpa
Pagaille dans le métro : la RATP entame son mea culpa
Par Denis Cosnard
Plus de 3 000 passagers ont été bloqués mardi à la suite d’une panne sur la ligne 1. La RATP veut mener des enquêtes internes pour tirer les leçons de cet incident.
Panne du métro parisien : les images des évacuations de passagers à travers les tunnels
Durée : 02:03
La RATP le reconnaît : le métro parisien a connu, dans la soirée du mardi 31 juillet, une situation « rarissime ». Pour ne pas dire une pagaille exceptionnelle. Quelque 3 500 passagers se sont retrouvés bloqués à l’intérieur des tunnels, dans une chaleur épouvantable et sans information précise, avant de devoir évacuer les lieux à pied, dans le noir, en file indienne. Tout en présentant ses excuses, la RATP a annoncé, mercredi 1er août, son intention de mener des investigations en interne pour tirer les leçons de cette affaire. Et sans attendre ce retour d’expérience, elle a commencé à identifier plusieurs points faibles en matière d’information des passagers.
Tout débute mardi soir à 20 h 10. En quelques minutes, la ligne 1 est soudain immobilisée. En temps normal, cette ligne entièrement automatisée, qui traverse Paris d’est en ouest, est déjà l’une des plus fréquentées. Au cœur de l’été, elle joue un rôle plus crucial encore : le RER A, qui suit un parcours proche, étant fermé pour travaux, la ligne 1 doit accueillir davantage de voyageurs, et le nombre de trains est accru. Même en début de soirée, il y en a encore un toutes les 90 secondes, soit plus qu’aux heures de pointe en hiver. Mardi soir, pas moins de 51 trains circulent entre Vincennes et La Défense.
C’est alors que survient un « problème technique » sur une rame, entre les stations Saint-Paul et Bastille. Mercredi, la RATP n’était pas en mesure d’identifier précisément cette avarie. « Il y aura une expertise sur le matériel », annonce simplement la direction, en écartant a priori une conséquence de la canicule. Seule certitude : la navette suivante, toute proche, se retrouve bloquée par le système automatique, par mesure de sécurité. Et peu à peu, tout le trafic est stoppé, à l’exception des trains circulant en bout de ligne, entre Charles-de-Gaulle-Etoile et La Défense.
« Il faisait très, très chaud »
Pour les trains à quai, rien de dramatique : les passagers peuvent descendre. Pour ceux des douze navettes coincées dans les tunnels, le pire commence. A bord, aucune information claire n’est donnée, et l’impatience monte. « C’était difficile, car nous-mêmes, au poste de commandement centralisé, nous ne connaissions pas l’heure de reprise », confie un responsable.
Une équipe technique est bien chargée d’intervenir pour faire repartir le train concerné par l’incident. « Selon la procédure habituelle, un agent vient sur place pour reprendre le train manuellement et essayer de le dépanner », ce qui nécessite d’arrêter le courant dans la zone, explique la RATP. Mais l’opération prend plus de temps que d’habitude. Après 30 minutes d’arrêt, plusieurs voyageurs tirent la sonnette d’alarme, ce qui coupe cette fois-ci l’électricité sur l’essentiel de la ligne, arrête la ventilation et plonge les wagons dans une semi-obscurité.
La situation devient critique. « Il faisait très, très chaud, la clim était coupée, a raconté à l’AFP Aïssatou, une commerciale de 34 ans. Une dame a pété les plombs, et n’arrêtait pas d’appuyer sur le bouton d’appel d’urgence. » Dans les rames, les passagers entendent le même message, répété en boucle pendant une heure. « Des centaines d’appels auprès du poste de commandement ont saturé le système d’information des voyageurs à bord des trains », explique la RATP.
De l’importance d’un conducteur à bord
Le courant étant arrêté, les portes sont automatiquement débloquées. Certains passagers descendent d’eux-mêmes sur les voies afin de rejoindre la station la plus proche. « On a alors décidé de faire évacuer les douze trains », indique la direction. Tache compliquée. Il faut envoyer des agents dans chacune de ces rames sans conducteur, installer une échelle à chaque bout, et aider les passagers à descendre sur la voie, un mètre plus bas. Puis les « naufragés » cheminent les uns derrière les autres, dans un espace étroit, à la lumière de leur téléphone portable.
Ce n’est qu’à 22 h 30 que tous les voyageurs sont évacués. Cinq d’entre eux sont pris en charge par les pompiers, et deux hospitalisés. Le trafic, lui, reprend seulement le mercredi matin, à 5 h 30, après des vérifications et des essais durant la nuit.
Les informations données « étaient probablement insuffisantes », a reconnu Philippe Martin, le directeur général adjoint des opérations de maintenance à la RATP, interrogé sur BFM-TV. « Même si c’est en soirée, même si c’est en juillet, il va falloir qu’on ait une autre manière de mobiliser le personnel », a-t-il admis. Un début de mea culpa. La CGT, elle, en a profité pour souligner l’importance d’avoir un conducteur à bord : il « aurait pu, rapidement et régulièrement, rassurer les voyageurs », a déclaré Frédéric Le Goff, secrétaire de la CGT métro RER. Remettre des conducteurs dans les métros automatiques n’est pas à l’ordre du jour, indique toutefois la direction.