Effondrement du viaduc à Gênes : le groupe autoroutier mis en cause par le gouvernement
Effondrement du viaduc à Gênes : le groupe autoroutier mis en cause par le gouvernement
La catastrophe qui a fait 39 morts mardi a rapidement fait émerger des questions sur la sécurité du pont Morandi. Le gouvernement de Giuseppe Conte a annoncé qu’il envisageait de révoquer la concession d’Autostrade per l’Italia.
Gênes : les images de l’effondrement d’un viaduc qui a fait au moins 38 morts
Durée : 01:12
Vingt-quatre heures après l’effondrement d’une portion d’un viaduc autoroutier à Gênes, dans le nord de l’Italie, les sauveteurs luttaient toujours, mercredi 15 août, pour tenter de trouver des survivants sous les débris.
Interrogations sur les défaillances
La catastrophe qui a fait au moins 39 morts et plusieurs disparus, selon un dernier bilan, a rapidement fait émerger des questions sur les défaillances de la structure du pont Morandi. Selon plusieurs experts, ce pont de l’autoroute A10 long de 1,18 km est un ouvrage en béton de la fin des années 1960 qui a connu des problèmes structurels dès sa construction et faisait l’objet d’un coûteux entretien lié en particulier aux fissures et à la dégradation du béton.
Autostrade per l’Italia, le groupe privé qui exploite les autoroutes italiennes, a rapidement soutenu que « des travaux de consolidation étaient en cours sur la base du viaduc », qui faisait l’objet « d’activités constantes d’observation et de vigilance ». Dans un communiqué, le groupe a affirmé que le pont Morandi faisait l’objet de contrôles trimestriels, comme l’exige la loi. D’importants travaux de rénovation avaient déjà été menés sur le viaduc en 2016, a également rappelé l’opérateur.
« Les premières informations sembleraient indiquer que la maintenance avait été faite », avait déclaré le ministre des infrastructures et des transports italien, Danilo Toninelli. Mais « ces tragédies ne peuvent pas arriver dans un pays civilisé comme l’Italie. La maintenance est prioritaire sur toute autre chose et les responsables devront payer », avait-il ajouté.
« Tout le pont Morandi devra être démoli »
Assurant qu’il allait aider les enquêteurs à déterminer les causes de l’accident, le groupe Autostrade per l’Italia a précisé être en train d’évaluer comment reconstruire le pont.
Le vice-ministre des infrastructures, Edoardo Rixi, s’est toutefois montré très pessimiste sur l’avenir de l’ouvrage. « Tout le pont Morandi devra être démoli », a-t-il déclaré selon l’agence de presse italienne ANSA, prévoyant de graves conséquences pour la circulation et pour la ville de Gênes. Sur le tronçon de l’A10 reliant Gênes à Savone, la circulation est ainsi coupée dans les deux sens entre l’aéroport de Gênes et la jonction pour l’A10 reliant Gênes à Milan, précise le Corriere della sera.
Plus de 400 personnes ont été évacuées par les autorités des bâtiments situés aux alentours ou en dessous du viaduc à Gênes. / Luca Zennaro / AP
L’autoroute A10, dite « autoroute des fleurs », relie Gênes à Vintimille, à la frontière française. En raison du relief très accidenté de la région, entre mer et montagne, son parcours est jalonné de longs viaducs et de tunnels. L’axe est ainsi parcouru par les vacanciers italiens et étrangers, mais aussi, tous les jours, par les habitants de la métropole de Gênes, capitale de la Ligurie, 580 000 habitants. Tout au long de l’année, elle est également un axe principal pour de nombreux camions.
L’effondrement a également poussé les autorités de Gênes à évacuer plus de 400 personnes des bâtiments situés aux alentours ou en dessous du viaduc. Les 200 mètres de pont s’étant effondrés sur des rails de chemin de fer, la circulation ferroviaire a elle aussi été fortement ralentie sur certaines lignes de la région.
Le gouvernement italien menace de révoquer la concession autoroutière
Au lendemain de la catastrophe, le gouvernement italien a annoncé mercredi qu’il envisageait de révoquer la concession d’Autostrade per l’Italia. Les autorités souhaitent en outre la démission des dirigeants de cette société d’autoroute et vont réclamer une amende pouvant atteindre 150 millions d’euros, a annoncé sur Facebook le ministre Danilo Toninelli.
« Les responsables ont un nom et un prénom, et ce sont Autostrade per l’Italia », a insisté Luigi Di Maio, vice-premier ministre et chef de file du Mouvement 5 étoiles (M5S) :
« Pendant des années on a dit que faire gérer les autoroutes par des privés était mieux que par l’Etat. Maintenant on a l’un des plus grands concessionnaires européens qui nous dit que ce pont était en sécurité et que rien ne laissait imaginer l’effondrement. »
« Autostrade devait faire la maintenance et ils ne l’ont pas faite. Ils encaissent les péages les plus chers d’Europe et paient les impôts les plus bas, au Luxembourg en plus. Il faut retirer les concessions et faire payer des amendes. Si un privé n’est pas en mesure de gérer les autoroutes, l’Etat le fera », a-t-il prévenu lors d’un entretien à la radio italienne.
« La révocation des concessions est un minimum, a renchéri Matteo Salvini, patron de la Ligue (extrême droite). En tant que vice-premier ministre, je vais écrire à tous les autres concessionnaires pour demander quelle part de leur budget ils réinvestissent dans la sécurité. »
Mardi soir, le chef du gouvernement italien, Giuseppe Conte, a annoncé un plan extraordinaire de contrôle des infrastructures. « Il s’agit d’installer de banals capteurs sensoriels sur toutes les infrastructures du pays pour une surveillance constante », a expliqué M. Di Maio.