L’ancien président comorien Ahmed Abdallah Sambi lors d’un meeting à Moroni, en janvier 2015. / YOUSSOUF IBRAHIM / AFP

L’ancien président des Comores Ahmed Abdallah Sambi a été inculpé et placé en détention dans le cadre d’une enquête sur des détournements de fonds opérés lors d’une vaste fraude aux passeports, a-t-on appris mardi 21 août auprès de son avocate.

Au pouvoir de 2006 à 2011, M. Sambi, l’un des principaux opposants au régime, était assigné à résidence depuis quatre mois, accusé d’« atteintes à l’ordre public ». Lundi après-midi, un juge d’instruction l’a inculpé de « corruption, détournement de deniers publics, complicité de faux et usage de faux et forfaiture » dans un scandale de fraude aux passeports et a ordonné son placement en détention.

Un récent rapport parlementaire l’a accusé, ainsi que son successeur, Ikililou Dhoinine, d’avoir détourné des millions de dollars dans le cadre d’un programme de vente de passeports à des apatrides. Lancé en 2008 lorsque M. Sambi dirigeait les Comores, ce projet visait à « vendre » la citoyenneté comorienne à des populations apatrides du Koweït et des Emirats arabes unis, connues sous le nom de « Bidouns », en échange d’investissements des deux pays dans l’archipel pauvre de l’océan Indien.

Les députés comoriens ont évalué à 971 millions de dollars (environ 840 millions d’euros) le montant détourné à la faveur de ce programme, soit près de 80 % du PIB annuel du pays. Entendus par la commission d’enquête, les ex-présidents Sambi et Dhoinine ont nié les accusations qui pèsent sur eux.

Un climat politique très tendu

Selon un de ses proches interrogé par l’AFP, M. Sambi, actuellement président du parti d’opposition Juwa, est détenu dans sa résidence de Voidjou, à une quinzaine de kilomètres au nord de la capitale, Moroni. Son avocate, Ahamada Mahamoudou, a dit à l’AFP avoir pu s’entretenir avec lui mardi après-midi. « Mon client m’a reçu sur sa véranda, je crois qu’il peut se déplacer à l’intérieur de sa maison », a-t-elle déclaré, précisant qu’il était privé de téléphone, d’ordinateur et de télévision et que ses gardes du corps lui avaient été retirés.

La mise en détention formelle de M. Sambi, 60 ans, intervient dans un climat politique très tendu aux Comores. L’ancien président est l’un des principaux adversaires de l’actuel chef de l’Etat, Azali Assoumani. Il s’est ainsi opposé à une réforme constitutionnelle, adoptée par référendum le 30 juillet, qui permet à son successeur de briguer deux mandats successifs.

L’opposition dénonce depuis des mois les « abus de pouvoir » du chef de l’Etat, qui envisage d’organiser une élection présidentielle anticipée dès l’année prochaine. Plusieurs adversaires du régime qui avaient appelé au boycott du référendum ont été récemment arrêtés.