A Chemnitz, l’extrême droite à nouveau dans la rue contre la politique migratoire de Merkel
A Chemnitz, l’extrême droite à nouveau dans la rue contre la politique migratoire de Merkel
Un gardien de prison a admis être à l’origine de la fuite d’un document qui a mis le feu aux poudres.
Manifestation de l’extrême droite, à Chemnitz, le 30 août. / ODD ANDERSEN / AFP
Nouvelle soirée agitée à Chemnitz : l’extrême droite allemande s’est à nouveau rassemblée jeudi soir dans cette ville de l’ex-RDA pour protester contre la politique migratoire d’Angela Merkel. Quelques centaines de personnes brandissant des drapeaux allemands ont commencé en début de soirée à se regrouper dans le calme, à l’appel d’un groupuscule local d’extrême droite baptisé « Pro Chemnitz ».
Plusieurs centaines de policiers ont été mobilisés pour l’occasion, dans la crainte d’incidents similaires à ceux qui ont émaillé les précédents rassemblements du même type, dimanche, avec des « chasses collectives » à l’étranger dans la rue, puis lundi lorsque des échauffourées entre sympathisants de l’extrême droite et de la gauche radicale ont fait 20 blessés.
La manifestation se déroule en marge d’un « dialogue citoyen » organisé par les autorités locales avec des habitants de cette cité de Saxe en ébullition depuis le week-end dernier. L’élément déclencheur de cette tension est la mort d’un Allemand de 35 ans, tué à coups de couteau en marge d’une fête locale. La police a arrêté deux suspects, un Irakien et un Syrien de 22 et 23 ans, accusés d’avoir agi après une « altercation verbale ».
Soupçons de collusion
Depuis plusieurs jours, les forces de police et la justice de Saxe sont elles-mêmes accusées de collusion avec la mouvance d’extrême droite. En cause : une fuite de documents judiciaires confidentiels, qui a mis le feu aux poudres dimanche.
Un gardien de prison, employé par le ministère saxon de la justice, a révélé jeudi soir être à l’origine de cette fuite. Dans un communiqué rendu public par son avocat, l’homme, Daniel Zabel, a dit avoir voulu ainsi faire en sorte que « le public sache ce qui s’est passé », accusant les médias de « manipuler » la vérité et les autorités de « mentir » à la population.
Il a précisé avoir photographié le mandat d’arrêt dans la prison où venait d’être envoyé le principal suspect irakien et l’avoir transmis notamment au groupuscule d’extrême droite Pro Chemnitz, qui l’a ensuite diffusé sur les réseaux sociaux. Le document donnait des détails sur l’agression – la victime a été frappée de cinq coups de couteau au thorax –, mais aussi l’identité et l’adresse du suspect ainsi que les noms de témoins.
Stratégie de la tension
L’extrême droite fait depuis des mois campagne sur le thème des crimes commis par des étrangers en Allemagne, accusant la chancelière Angela Merkel d’en être responsable pour avoir ouvert les portes de son pays à plus d’un million de demandeurs d’asile en 2015 et 2016, provenant principalement de Syrie et d’Irak. Elle accuse le gouvernement de relativiser ce phénomène et se saisit de tous les faits divers impliquant des demandeurs d’asile pour marteler son message.
Cette stratégie de la tension semble porter électoralement ses fruits : l’AfD (Alternative pour l’Allemagne, extrême droite) talonne désormais le Parti social-démocrate dans les sondages derrière les conservateurs d’Angela Merkel, dans un contexte d’élections régionales qui se profilent en Bavière et en Hesse en octobre.
Le suspect irakien du meurtre de Chemnitz est arrivé en 2015 en Allemagne en provenance du Kurdistan irakien. Il avait déjà été condamné à plusieurs reprises pour violences et détention de drogues. Censé être expulsé, il avait fait appel de cette décision et obtenu gain de cause en 2016, affirme le quotidien Bild. Samedi, l’extrême droite de Chemnitz prévoit une « marche funèbre » en l’honneur de la victime des coups de couteau.