Journées du patrimoine : cinq architectures « franco-européennes »
Journées du patrimoine : cinq architectures « franco-européennes »
Par Jean-Jacques Larrochelle
Sur le thème de « L’Art du partage », une sélection de projets réalisés en France par des créateurs néerlandais, britannique, grec, italien ou allemand, à visiter ce week-end.
A l’occasion des 35es Journées européennes du patrimoine (JEP), du 14 au 16 septembre, qui ont pour thème « L’Art du partage », nous avons sélectionné cinq édifices conçus par des architectes européens à travers la France. Ils sont ouverts au public ce week-end.
- La Platine de la Cité du design, à Saint-Etienne
La Cité du design, qui intègre l’Ecole supérieure d’art et design de Saint-Etienne, est implantée au sein de l’ancienne manufacture d’armes de la ville qui éditait le fameux catalogue Manufrance. Le principal projet architectural contemporain est la Platine (environ 7 500 m2) livrée en octobre 2009 par les architectes allemands Finn Geipel et Giulia Andi. Il s’agit d’un simple parallélépipède rectangle de plain-pied, long de 193,2 m et large de 31,2 m, à la toiture légèrement bombée. Les architectes disent avoir voulu créer « un espace interclimatique enveloppé d’une peau novatrice et modulable qui s’appuie sur des technologies avancées ». Le bâtiment a obtenu le Prix spécial du jury de l’Equerre d’argent en 2009.
L’édifice, revêtu d’une « peau » aux reflets d’argent, constituée de panneaux triangulaires de 1,20 mètre de côté, opaques, transparents, photovoltaïques ou de photosynthèse, accueille trois salles de séminaires, un auditorium de 300 places, deux salles de 1 200 et 800 m2 réservées aux expositions temporaires, une médiathèque et une boutique. La Tour observatoire, tout proche, complète cet ensemble et s’élève à 32 mètres pour offrir un panorama circulaire sur la ville et ses environs.
Cité du design, 3, rue Javelin Pagon, Saint-Etienne (Loire). Visite libre et visite commentée samedi et dimanche de 10 heures à 18 heures.
- La Fondation Jérôme Seydoux-Pathé à Paris
La Fondation Jérôme Seydoux-Pathé réalisée par Renzo Piano, vue depuis l’avenue des Gobelins dans le 13e arrondissement de Paris. / MICHEL DENANCÉ
La Fondation Jérôme Seydoux-Pathé, reconnue d’utilité publique en 2006, œuvre à la conservation et à la mise à disposition du public du patrimoine historique de la société cinématographique Pathé. Tout près de la place d’Italie à Paris, derrière un porche frappé de hauts-reliefs d’Auguste Rodin sculptés en 1869, l’architecte italien Renzo Piano, né en 1937, Pritzker Prize 1998 et concepteur de nombreux musées (Beaubourg, la Cité internationale de Lyon, la Fondation Beyeler à Bâle ou le musée de la collection Menil à Houston, Texas), a coiffé les cinq étages de la fondation d’une coque réfléchissante composée de 5 000 volets protecteurs. L’ensemble, inauguré en septembre 2014, est à peine perceptible depuis la rue.
« Le bâtiment a été dessiné par la force des choses, conduit par la nécessité de s’accrocher là où c’était possible », indiquait Renzo Piano. D’une superficie d’environ 2 200 m2, il regroupe les bureaux de la Fondation, les archives, un centre de documentation et de recherche, une DVDthèque, un espace consacré aux expositions et une salle de projection. Cent cinquante appareils cinématographiques, conçus entre 1896 et le début des années 1980, sont exposés dans la galerie située au premier étage.
Fondation Jérôme Seydoux-Pathé, 73, avenue des Gobelins, Paris 13e. Accès gratuit exceptionnel au bâtiment avec visite libre de l’ensemble (samedi et dimanche de 9 heures à 19 heures) ; visite commentée de la galerie des appareils par Anne Gourdet-Mares, responsable des appareils et des ateliers pédagogiques à la Fondation (samedi et dimanche de 11 heures à 18 heures) ; projection de films muets en musique avec les élèves de la classe d’improvisation de Jean-François Zygel, en partenariat avec le Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris (samedi et dimanche de 10 h 30 à 18 h 30).
- La Maison-atelier de Philolaos à Saint-Rémy-lès-Chevreuse
Vue extérieure de la maison-atelier du sculpteur grec Philolaos à Saint-Rémy-lès-Chevreuse (Yvelines). / D. HUCHON
Né à Larissa, en Thessalie (Grèce), le sculpteur Philolaos Tloupas (1923-2010) s’installe en France en 1950. Il fréquente l’Académie de la Grande Chaumière et les cours de Marcel Gimond à l’Ecole des beaux-arts de Paris. En 1958, à Saint-Rémy-lès-Chevreuse (Yvelines), il construit son atelier, réalisé à partir de ses propres plans au dessin épuré, où il accorde une large place à la transparence. Il y conçoit sculptures monumentales et maquettes, tableaux reliefs, ainsi que des meubles et des objets en acier, fer, bois, marbre ou terre cuite… Au début des années 1960, Philolaos collabore avec de nombreux architectes (Gomis, Andrault et Parat, Badani) et des paysagistes de renom, dont Jacques Simon.
Pour les zones à urbaniser en priorité (ZUP) d’André Gomis, il crée des sculptures-fontaines à Bagneux (1959) puis le château d’eau de Valence (1971) conçu comme une « sculpture architecture », pour lequel il reçoit en 1981 le Prix du quartier de l’Horloge récompensant la meilleure œuvre d’art urbain des années 1970. Il réalise également de nombreuses commandes de sculptures en acier inoxydable à Lyon, Créteil, Evry, en Grèce et à Salonique.
Maison-atelier de Philolaos Tloupas, 66, route de Milon, Saint-Rémy-lès-Chevreuse (Yvelines). Tél. : 01-30-52-22-49 et renseignements sur www.opcnsaintremy.fr. Ouverture exceptionnelle. Visite commentée dimanche de 14 h 30 à 16 heures et de 16 h 30 à 18 heures (sur inscription).
- La Bibliothèque Alexis de Tocqueville à Caen
Vue extérieure de la bibliothèque Alexis de Tocqueville réalisée par le Néerlandais Rem Koolhaas à Caen (Calvados). / ANTOINE CARDI
Ouverte au public début 2017, la bibliothèque Alexis de Tocqueville est située à Caen (Calvados) en bordure du bassin Saint-Pierre. Le projet a été conçu par l’architecte néerlandais Rem Koolhaas, né en 1944, lauréat du Pritzker Prize en 2000 et Lion d’or dix ans plus tard de la Biennale d’architecture de Venise pour l’ensemble de son œuvre. Le design en forme de croix de la bibliothèque répond au contexte urbain, chacun des quatre plans saillants de la croix indiquant un point de repère dans la ville. La façade vitrée tend à relier visuellement l’intérieur au parc adjacent, au sentier pédestre et la place du front de mer où se croisent marcheurs, cyclistes et kayakistes.
Le programme de la bibliothèque comprend un kiosque de presse, un auditorium de 150 places, un espace d’exposition et un restaurant avec une terrasse extérieure au bord de l’eau. Les étages contiennent une grande variété d’espaces de travail et de lecture (pour adultes et pour enfants) capables d’accueillir 120 000 documents. L’extension numérique des collections physiques est l’une de ses nouvelles fonctionnalités. Les archives et les collections spéciales sont stockées dans le sous-sol et protégées de l’eau grâce à une membrane imperméable innovante, appliquée sur la face interne des murs en béton.
Bibliothèque Alexis de Tocqueville, 15, quai François Mitterrand, Caen (Calvados). Tél. : 02-31-30-47-00. Visite théâtralisée de l’édifice, samedi de 15 h 45 à 17 h 15 et de 20 heures à 21 h 30 ; dimanche de 16 h 15 à 17 h 45.
- Le Tribunal de grande instance à Bordeaux
Le Tribunal de grande instance de Bordeaux réalisé par le Britannique Richard Rogers. / TOURISME BORDEAUX
Le Tribunal de grande instance (TGI) de Bordeaux est un projet singulier, réalisé entre 1992 et 1998 par l’agence du Britannique Richard Rogers, né en 1933, et titulaire de nombreuses distinctions dont le Pritzker Prize en 2007. Le TGI est intégré dans l’« îlot judiciaire » qui comprend également l’Ecole nationale de la magistrature et le bâtiment historique néoclassique du Palais de justice devenu la cour d’appel. Le nouveau bâtiment a bénéficié du label « Patrimoine du XXe siècle », transformé en juillet 2016 en label « Architecture contemporaine remarquable ».
« Le projet présenté envisageait un bâtiment pouvant, grâce à une impression de transparence et d’ouverture, créer une perception positive du caractère accessible du système judiciaire français, expliquait Richard Rogers dans sa note d’intention. Le projet avait visiblement satisfait le maître d’ouvrage : « … en ce qui concerne la fonctionnalité et la qualité esthétique de l’ouvrage, je confirme que ce bâtiment est un grand succès, indiquait René Eladari, le responsable des équipements du ministère de la justice. C’est un ouvrage remarquable qui fait plaisir à voir : il s’acquitte de ses responsabilités envers la rue et ses passants qui le côtoient comme le décor de leur itinéraire quotidien. »
Tribunal de grande instance, 30, rue des Frères Bonie, Bordeaux (Gironde). Ouverture exceptionnelle. Visite commentée autour de l’architecture, expositions et reconstitutions d’audiences, samedi de 10 heures à 18 heures.