Vers un deuxième round ? L’extension de la procréation médicalement assistée (PMA) aux femmes seules et aux couples de femmes envisagée par Emmanuel Macron pourrait réveiller la vive opposition de la droite et de l’extrême droite qui s’était exprimée lors des débats sur le mariage pour tous, en 2012 et 2013. Le parti Les Républicains (LR) comme le Rassemblement national (RN, ex-Front national) ont d’ores et déjà fait savoir qu’ils s’opposeraient à un éventuel projet de loi en la matière. Ce qui ne préjuge pas de leur attitude au cas où La Manif pour tous susciterait une nouvelle mobilisation. Il y a cinq ans, les deux camps avaient majoritairement défilé au côté du mouvement. Un épisode qui a laissé des traces.

La position officielle de LR consiste, quoi qu’il en soit, à rejeter toute modification de la loi au sujet de la PMA.

« Notre parti est contre l’extension de la “PMA sans père”, affirme Laurence Sailliet, porte-parole de LR, qui reprend à son compte l’expression utilisée par La Manif pour tous. Il y a une pénurie de gamètes, cette réforme mènerait à leur marchandisation. »

Le président de LR, Laurent Wauquiez, a répété son opposition à titre personnel. « Un enfant reste le fruit d’une femme et d’un homme. La société qui revient sur cela va vers un monde sans repères », estimait-il dans un entretien à Valeurs actuelles, en septembre 2017. Rien d’étonnant de la part de celui qui s’était retrouvé en première ligne lors des manifestations contre le mariage pour tous. M. Wauquiez a par ailleurs pesé de tout son poids pour que Sens commun, l’émanation politique de La Manif pour tous, puisse trouver sa place au sein de LR.

« On regrette tous un peu »

Le débat concernant la PMA doit néanmoins encore avoir lieu au sein du parti. Le vice-président de LR, Jean Leonetti, spécialiste reconnu des questions de bioéthique, devrait ainsi participer à une réunion du groupe à l’Assemblée nationale pour aborder cette question. « Nous ne sommes pas ici dans le médical, mais le sociétal. L’extension de la PMA n’est pas la réponse à une anomalie mais à un désir, souligne-t-il. C’est un sujet à polémique sur lequel nous n’avons pas la sérénité et le large consensus que pouvait attendre le président de la République. »

« Il faut aborder ce débat avec du respect et beaucoup de tact, car il charrie de la souffrance humaine, ajoute Bruno Retailleau, président du groupe LR du Sénat. Mais cette réforme serait un nouveau pas dans la fabrique d’enfant, la marchandisation n’est pas loin. La marche vers la GPA [gestation pour autrui] est au bout du chemin. »

Signe que l’attitude de la droite est surveillée comme le lait sur le feu, le premier ministre, Edouard Philippe, a échangé avec Jean Leonetti sur le sujet. Pour prendre la température.

Mais rien ne dit, à ce stade, que l’opposition de LR se traduira dans la rue. L’ancien président de l’ex-UMP, Jean-François Copé, confie avoir « mal vécu » les mobilisations contre le mariage pour tous, auxquelles il s’était mêlé en tant que chef de parti. « C’est le seul regret politique que j’ai dans ma vie. Je l’ai fait pour rassembler la droite, mais je ne suis pas à l’aise avec la position que j’ai défendue », explique-t-il. « On regrette tous un peu », abonde un député LR, qui avait lui aussi participé aux manifestations.

Rappeler la ligne officielle

Le parti de Marine Le Pen, lui, serre les rangs. L’extension de la PMA, tout le monde est contre au RN. Dimanche 23 septembre, la présidente du parti d’extrême droite a d’ailleurs tenu à rappeler la ligne officielle : « La PMA doit être réservée aux couples qui ont des problèmes d’infertilité et à ceux qui risquent de transmettre à leurs enfants des maladies graves. »

En octobre 2017, la députée du Pas-de-Calais avait repris un argument de La Manif pour tous en déclarant qu’« avec l’extension de la PMA, on ment à l’enfant. Un enfant est le fruit d’un homme et d’une femme ». De là à accompagner le mouvement conservateur catholique jusque dans la rue… En 2013, sous l’influence de son bras droit de l’époque, Florian Philippot, la fille de Jean-Marie Le Pen avait refusé de se mêler aux manifestations. Elle promettait néanmoins d’abroger le texte si elle arrivait au pouvoir.

Son absence dans le cortège avait été d’autant plus remarquée que certains élus frontistes s’y étaient rendus parés de leur écharpe tricolore, comme les députés Gilbert Collard… et Marion Maréchal-Le Pen, qui n’avait pas encore gommé le nom « Le Pen » de son patronyme. L’ancienne élue du Vaucluse avait même appelé à « l’insoumission » dans un discours remarqué, épisode qui lui a permis d’éclore sur la scène nationale. Depuis, la jeune femme, comme M. Philippot ont quitté le parti lepéniste, laissant Marine Le Pen seule en scène. Il est toujours plus facile de trouver une position commune avec soi-même.