Guerre au Yémen : pressions sur le Conseil des droits de l’homme
Guerre au Yémen : pressions sur le Conseil des droits de l’homme
Par Louis Imbert
La mission des experts chargés d’enquêter sur de possibles crimes de guerre au Yémen a été prolongée d’un an, malgré l’opposition de l’Arabie saoudite et des Emirats arabes unis.
Après un bombardement de la coalition menée par l’Arabie saoudite, dans la province de Saada (Yémen), le 10 août 2018. / - / AFP
Le Conseil des droits de l’homme des Nations unies a finalement prolongé d’un an, vendredi 28 septembre à Genève, le mandat d’un groupe d’experts qui enquêtent sur de possibles crimes de guerre au Yémen. Présentée par les Pays-Bas et soutenue par l’Union européenne, cette résolution a été adoptée par 21 voix sur 47, avec 18 abstentions.
Le gouvernement yéménite et la coalition saoudienne, qui intervient dans le pays à sa demande depuis mars 2015, avaient vivement défendu une résolution déposée par la Tunisie, qui visait à rendre au gouvernement Hadi la seule responsabilité de ces enquêtes : une façon de les enterrer.
Depuis un mois, le chef des experts de l’ONU, le Tunisien Kamel Jendoubi, et leur coordinatrice, la Libanaise Roueida El-Haj, faisaient l’objet de violentes critiques sur la chaîne saoudienne Al-Arabiya et sur Sky News Arabia, aux Emirats arabes unis (membres de la coalition), dans des médias tunisiens, et sur les réseaux sociaux.
« Ces informations déformées ou totalement fausses portent en partie sur nos vies privées, note M. Jendoubi. Les messages sont clairs et menaçants : nous sommes des traîtres au monde arabe, vendus aux houthistes, à l’Iran ou au Qatar ». Ce dernier est le seul Etat arabe, en difficulté avec Riyad, à avoir voté en faveur du prolongement de l’enquête de l’ONU.
Mencades de représailles économiques
L’an dernier, Riyad avait menacé de représailles économiques les pays qui soutiendraient la création d’une commission d’enquête internationale. Un simple groupe d’experts avait finalement été formé, qui ne rapporte pas lui-même ses conclusions au Conseil de sécurité. Leur premier rapport, rendu public en août, a causé un « choc » à Riyad, notait un diplomate occidental, alors que le royaume argue depuis des mois de ses efforts en matière de droit humanitaire, en réponse aux pressions de ses alliés américain et britannique.
Ce rapport accusait la coalition et les rebelles houthistes de s’être rendus coupables de possibles crimes de guerre. Il dénonçait des cas de torture dans des centres de détention contrôlés par les Emirats arabes unis, ainsi que l’enrôlement d’enfants-soldats par leurs alliés yéménites. Les houthistes sont coutumiers de telles violations, ce que Riyad met volontiers en avant. Les experts ont cependant prêté le flanc aux accusations de partialité de la coalition, qui a rejeté leur rapport, en ne mentionnant pas les mines que les houthistes ont disséminé à travers le Yémen.