A l’image de Memphis Depay, l’OL répond souvent présent dans les grands rendez-vous. / JEFF PACHOUD / AFP

Et si l’Olympique lyonnais était une équipe du dimanche soir ? A l’heure où la Ligue 1 offre son affiche du week-end, l’OL séduit, marque et gagne face aux « gros » du championnat de France. Le coup du sombrero de Sergi Darder en pleine surface parisienne en 2016 ou le coup franc excentré diabolique de Nabil Fekir pour tromper Alphonse Areola en janvier dernier, les Lyonnais ont pris l’habitude de briller face au PSG. Monaco et Marseille sont les autres victimes régulières de Lyon de gala, qui redevient trop souvent un tigre de papier face à des équipes moins réputées.

Ligue 1 - OL 2-1 PSG But de Sergi Darder - Canal+
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Depuis l’arrivée de Bruno Genesio sur le banc (le 25 décembre 2015) et en comptant la victoire récente contre l’OM cette saison (4-2, le 23 septembre), Lyon a disputé 16 rencontres de championnat face au PSG, à Monaco et à Marseille. Le bilan est largement positif : neuf victoires dont deux face à Paris, cinq défaites, dont trois face à Paris et deux matchs nuls. Plutôt encourageant avant le déplacement à Paris, dimanche à 21 heures, même si, durant cette période, Lyon a également toujours perdu au Parc des Princes.

Mais alors d’où vient cette faculté lyonnaise à presque toujours répondre présent lors des grands rendez-vous ? Tout ne serait qu’une question de mental avance-t-on au sein du club, cette équipe à la moyenne d’âge très jeune frétille plus facilement contre les cadors. Une simple question de motivation ? Ce début de saison n’échappe pas à ce cycle. Après des défaites contre Nice (0-1) et à Caen (2-2), Lyon s’offre Manchester City à l’Etihad Stadium en Ligue des champions (2-1) et enchaîne avec un succès contre l’OM (4-2). Tout serait dans la tête à entendre alors Bruno Genesio : « On avait un déficit au niveau de l’état d’esprit, mais il y a eu une prise de conscience. Avec le temps, on verra si on est guéri. »

But Nabil FEKIR (2') / Olympique Lyonnais - Paris Saint-Germain (2-1) / 2017-18
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Rebelote, après une légère rechute contre Nantes en championnat (1-1, le 29 septembre) et avant d’affronter Donetsk en Coupe d’Europe, le technicien rhodanien pointe du doigt un manque de maturité de ses troupes : « Il y a eu plus de bonnes choses contre Nantes que contre Caen, mais cette gestion fait partie de mon travail. Et comme nous avons une équipe très jeune et parfois immature, on est là de temps en temps pour recadrer et modifier ce qui ne fonctionne pas. »

Cette explication se tient, mais elle ne suffit pas à éclairer à elle seule cette spécificité locale. « Cette excuse a une part de vérité. Il est vrai qu’à l’époque Juninho, un vrai compétiteur, jouait à fond tous les matchs. Aujourd’hui c’est moins le cas. Mais c’est l’arbre qui cache la forêt. C’est une excuse trop facile », confie Nicolas Puydebois, ancien gardien remplaçant de l’OL des années 2000 et consultant pour le site spécialisé Olympique et Lyonnais.

« Un jeu parfois stéréotypé »

C’est donc du côté de la tactique qu’il faut donc se tourner pour apporter un peu de complexité. Le secret est éventé depuis un moment, L’OL peine à assumer le jeu face à des équipes qui ont un bloc bas, c’est-à-dire qui défendent bien regroupées dans leur moitié de terrain et attendent l’adversaire.

« C’est le cas de beaucoup de formations, mais Lyon est censé être une grande équipe. La plupart du temps, sur 38 matchs de Ligue 1, les Lyonnais vont rencontrer ce genre de difficulté sur 27 à 32 matchs environ », explique Christophe Kuchly, spécialiste de la tactique et coauteur notamment de l’ouvrage Comment regarder un match de foot, Les Cahiers du foot, Solar éditions.

Tous ceux qui analysent le jeu lyonnais depuis l’arrivée de Bruno Genesio dégagent les mêmes conclusions. L’OL a tendance à déployer un jeu stéréotypé qui ne lui permet pas, certaines fois, de mettre hors de position une équipe arc-boutée. « Les circuits de passe sont relativement basiques. On en vient souvent sur ce que l’on appelle l’attaque en U ou en fer à cheval. Il y a uniquement des relations entre les défenseurs centraux, puis avec les latéraux et ensuite entre ces derniers et les ailiers qui centrent pour les attaquants. Il y a un manque de liant au cœur du jeu », décrit Christophe Kuchly.

La faiblesse des défenseurs centraux dans la relance n’arrange rien à cette impasse. Même si la nouvelle recrue, le Belge Jason Denayer, apporte du mieux dans ce secteur par rapport à Marcelo ou à Jérémy Morel. Une des solutions pour améliorer ce déficit réside dans une meilleure utilisation d’un joueur comme Tanguy Ndombélé au milieu de terrain. « Quand ton défenseur central relance sur le latéral, tu te fermes les options de jeu. Tu te retrouves à attaquer à sept contre dix, analyse Kuchly. Il a le profil pour percuter balle au pied et casser les lignes avec la passe. S’il trouve de la régularité, il peut permettre d’aérer le jeu et de libérer des espaces pour Nabil Fekir. »

Une équipe qui excelle à utiliser les espaces

A Lyon, lorsque le capitaine formé au club, Memphis Depay ou Bertrand Traoré brillent, les buts s’enchaînent. « Les individualités, c’est toujours important. Ce sont elles qui te font gagner les matchs », livre Nicolas Puydebois. Mais encore faut-il qu’elles affichent la régularité nécessaire à chaque rencontre. « Quand tes individualités sont bonnes mais pas exceptionnelles, tu t’exposes aux variations de forme. Depay ou Traoré sont capables de matchs moyens à l’inverse des grands joueurs qui sont bons toutes les semaines », ajoute Christophe Kuchly.

Et face aux cadors, Lyon bénéficie de deux phénomènes propres aux qualités de ses joueurs. Parfois fébrile et tête en l’air lorsqu’elle est peu sollicitée, sa défense parvient mieux à rester concentrée lorsqu’elle est mise sous pression durant tout le match. Tandis qu’en phase offensive, contre les clubs dominants, comme le PSG, les Lyonnais excellent dans l’utilisation des espaces laissés par l’adversaire. « Lyon a du mal à créer des espaces, mais les exploite à merveille si on lui en donne », livre Christophe Kuchly.

Si le club du président Aulas n’arrive pas à régler ses problèmes dans l’animation du jeu, Bruno Genesio est, en revanche, parvenu à rendre son équipe prolifique. La saison dernière, l’OL a battu d’ailleurs son record de buts en Ligue 1, soit 87, la deuxième meilleure attaque derrière le PSG. « Malgré un jeu parfois fade, l’OL marque beaucoup de buts. Genesio a rendu ses joueurs plus efficaces. Mais dès que l’efficacité disparaît, contre Nantes par exemple, tu ne t’en sors pas », éclaire Nicolas Puydebois.

Plus que la jouissance éphémère de coups d’éclat contre des adversaires prestigieux, c’est désormais une régularité dans la production d’un jeu de qualité qu’attendent les supporteurs lyonnais, parfois critiques avec leur entraîneur. L’exigence est à ce prix, tout comme l’amélioration de la cote d’amour de Bruno Genesio.