Timbres : hausse des « classiques », baisse des « modernes »
Timbres : hausse des « classiques », baisse des « modernes »
Par Pierre Jullien
Selon la dernière édition du « Catalogue Yvert et Tellier », les cotes des timbres parus au XIXe siècle progressent, à la différence de ceux parus plus récemment.
« Catalogue de cotation Yvert et Tellier. Timbres de France 2019 », 1 344 pages, 23,90 euros. En vente en librairie ou sur Internet : www.yvert.com (rens. : 03-22-71-71-71). / DR / YVERT ET TELLIER
La collection de timbres se porte toujours bien, même si les effectifs de ses adeptes régressent. Il n’en demeure pas moins que la Fédération française des associations philatélique (FFAP) compte près de 25 000 membres (moitié moins qu’à ses plus belles années), que la Chambre syndicale française des négociants et experts en philatélie (CNEP) regroupe près de 180 adhérents et que La Poste édite des timbres par milliards tous les ans, si l’on compte les Marianne d’usage courant.
Hausse des timbres anciens, effritement des timbres modernes, progression significative des timbres des années 2000 : la « Bible » très attendue des collectionneurs de timbres, le Catalogue de cotation Yvert et Tellier des timbres de France paraît tous les ans à la rentrée, offre quelques contrastes.
Tirages en baisse
L’édition 2019, qui grossit de près de soixante pages par rapport à celle de l’an passé, témoigne du nombre important de timbres édités au fil des mois par La Poste. Toujours plus de timbres mais avec des tirages en baisse, la faute à la régression du courrier et du nombre de collectionneurs. Dans les années 1970, les « beaux » timbres aux valeurs faciales « standards » étaient tirés entre 8 et 12 millions d’exemplaires. En 2018, les timbres commémoratifs à 0,80 et 0,95 euro sont tirés à moins d’un million d’exemplaires.
Et si les années 1970 – pour ne pas remonter plus loin - voyaient en moyenne l’émission annuelle d’une quarantaine de timbres (de trente-quatre en 1975 à soixante-neuf tout, de même, en 1978), la centaine est largement dépassée au XXIe siècle (cent huit en 2017, avec un chiffre record de deux cents timbres en 2008, sans compter les bandes-carnets, et autres variantes personnalisées ou autocollantes).
Le 15 centimes vert au type « Cérès » paru en 1850-1853 est coté 27 000 euros. / DR / LA POSTE
Du côté des cotes, les timbres classiques (parus avant 1900) enregistrent des hausses régulières, comme le premier timbre de France, émis le 1er janvier 1849, le 20 centimes noir au type Cérès, qui passe de 600 à 625 euros à l’état neuf. Le 15 centimes vert de 1850, grappille 500 euros, de 26 500 à 27 000 euros. Plus spectaculaire, le 1 franc carmin progresse de 1 000 euros, à 16 000 euros. Le timbre phare de la collection de France, le 1 franc vermillon (1849), ne bouge pas, à 125 000 euros.
Passons à l’Empire, avec le 1 centime bronze à l’effigie de Napoléon III lauré, qui prend 11 %, à 90 euros désormais. On note aussi des hausses significatives aussi pour certaines valeurs du gouvernement provisoire de défense nationale (« émission de Bordeaux ») : le 40 centimes orange Cérès non dentelé de 1870 est à 750 euros au lieu de 650 dans l’édition précédente.
Evolutions constrastés des semi-modernes
Le timbre émis au cours de la Troisième République, type Sage, 5 centimes vert de décembre 1876, passe de 40 à 45 euros, le 2 centimes brun-rouge de mai 1877 de 13 à 15 euros et le 15 centimes bleu d’avril 1892 de 35 à 40 euros. La valeur vedette de cette série, le 1 centime noir sur bleu de prusse (1880), reste à 17 000 euros.
Les cotes des semi-modernes (1900-1939) connaissent des évolutions contrastées modestes, les Mouchon sont stables à l’état neuf, parfois à la baisse pour les oblitérés (10 centimes rose de 11,50 à 11 euros, 20 centimes brun-lilas de 15 à 12,50 euros) ou en légère hausse (25 centimes bleu, de 2,15 à 2,30 euros), de même pour les premières Semeuse (25 centimes bleu Semeuse lignée, de 1,50 à 1,40 euro ou 10 centimes rouge de 0,15 à 0,20 euros).
Pour la période moderne, la tendance générale est à la baisse, ce que confirment les années complètes. En témoigne l’année 1938, qui totalise respectivement 750, 375 et 298 euros de cotes pour les timbres neufs, neufs avec charnière et oblitérés, contre 750, 376 et 301 euros pour l’édition 2018 du catalogue. Même chose pour 1944, en recul de 2 euros en neuf, et de 3 euros pour les oblitérés. Et si l’année 1943 progresse de 8 euros, de 154 à 162 euros en neuf, c’est grâce à la bande « au profit du Secours national » qui passe de 100 à 110 euros.
Prix cassés
Pour la suite, on enregistre des baisses de 3 euros pour 1948 et 1949 (et même - 6 euros pour les oblitérés), de 5 euros (1951), de 6 euros (1953), de 8 euros (1954)… Une tendance qui reflète la réalité du marché puisque l’on trouve ces années complètes, chez les négociants spécialisés à des prix cassés : l’année 1951 est ainsi disponible au prix de vente de 30 euros pour 150 euros de cote, ou l’année 1954 est à 64 euros pour 315 euros de cote…
Rappelons que les cotes fournies par le catalogue Yvert et Tellier ne sont en aucun cas des prix de vente mais une référence, une base d’échange. Néophytes ou héritiers ignorants auraient tort d’évaluer une collection en fonction des cotes !
On passe aux nouveaux francs sans changement de tendance (79 euros au lieu de 83 euros dans l’édition de l’an passé pour les cinquante-trois timbres de l’année 1960 ; de 21 à 18 euros pour 1968, de 92 à 84 euros pour l’année 1986)…
Le non émis « Marianne » créé par Pierre Béquet, de 1975, à 0,80 franc, est coté 2 250 euros. / DR / LA POSTE
Dans cette médiocrité, le timbre non émis, resté à l’état de projet, Marianne de Béquet, de 1975, à 0,80 franc, est coté 2 250 euros et le non émis Marianne d’Excoffon, 1 franc rouge, de 1976, progresse de 2 250 à 2 750 euros…
Le non émis « Marianne » d’Excoffon, 1 franc rouge, de 1976, progresse de 2 250 à 2 750 euros. / DR / LA POSTE
Première et rare – petite – hausse au sein de cette tendance baissière, pour les timbres parus en 1976, l’année complète passant de 43 à 46 euros, précédant de légères progressions en 1988, 1989, 1994, 1995… Les années 1990 confirment cette alternance de hausses et de baisses (1997 passant, par exemple, de 144 à 157 euros pour 85 timbres grâce aux timbres d’usage courant et de la série artistique). Et là encore, si l’année 1993 est cotée 126 euros (129 euros l’an passé), elle se négocie aux alentours de 30 euros seulement (alors que la valeur faciale totale atteint les 206 francs de 1993 !…).
Tendance haussière à partir de 2000
Les « moutons à cinq pattes donnent de bon prix, comme ces non dentelés qui n’étaient pas répertoriés dans l’édition précédente (série des personnages célèbres de 1997, à 1 500 euros, par exemple).
Retour d’une tendance haussière à partir de 2000, année qui progresse de 28 euros (de 87 à 115 euros pour 71 timbres), confirmée dès l’année suivante (de 86 à 118 euros), puis 2002 passant de 124 à 155 euros (pour 97 timbres), 2006 de 246 à 290 euros pour 135 valeurs, 2008 de 418 à 469 euros (pour 200 timbres).
Pour les timbres les plus récents, il est nécessaire de voir au cas par cas. En 2013 par exemple, le bloc sur les chemins de Compostelle passe de 8 à 10 euros, le feuillet sur « La Ve République au fil du timbre » régresse, de 36 à 24 euros dans sa version oblitérée, les douze timbres à l’unité perdant 0,50 euro chacun. Et si le timbre de la Fête du timbre « Marianne verte et montgolfière « passe de 4 à 3,80 euros, le bloc « Kitsurfer dans les airs » est à 8 euros au lieu de 5 euros l’an passé.
Cote de 10 euros pour ce timbre en vente à l’automne 2017, tiré à 240 000 exemplaires.. / DR / LA POSTE
Parmi les valeurs récentes spéculées, le timbre sur les Jeux olympiques de Paris 2024 est à 5 euros dans sa version « normale » et à 10 euros dans sa version surchargée (pour une valeur faciale de 0,73 euro). Le bloc « Meilleurs vœux » de 2003 (rouge-gorge), à l’époque vendu 3 euros à La Poste, coté 100 euros en 2017, redescend à 90 euros.
Le timbre Marianne d’usage courant vert surchargé « 2013-2018 » vendu exclusivement durant le salon philatélique Paris-Philex en juin 2018 qui pointe à 5 euros (pour 0,80 euro de valeur faciale) méritera l’attention des collectionneurs les prochaines années.
Timbres sociaux-postaux
Cette nouvelle édition du catalogue Yvert et Tellier compte quelques innovations marquantes, parmi lesquelles un nouveau chapitre dédié aux « Bureaux de quartier », dits « Bureaux de Paris », ces oblitérations des timbres spécifiques à la capitale, créées durant la Seconde République et perdurant sous le Second Empire, qui précédèrent les étoiles chiffrées, qui faisaient déjà l’objet d’un chapitre, marques postales emblématiques de la ville de Paris en usage entre 1863 et 1876.
Tirage de 2 500 feuilles de 100 seulement pour ce timbre déjà coté 5 euros. Les feuilles étaient vendues « indivisibles ». / DR / LA POSTE
Autre innovation, les timbres socio-postaux, qui n’avaient pas d’usage postal mais étaient vendus dans les bureaux de poste au début du XXe siècle. « Ces timbres ont été créés pour faciliter l’acquittement des cotisations d’assurance et de retraite par les employeurs et les salariés ou la souscription d’épargnes », dans le cadre du système de retraite vieillesse instauré en France par la loi du 5 avril 1910 « au profit des travailleurs faiblement rémunérés du secteur privé » sous le nom de « retraites ouvrières et paysannes », explique le catalogue de la Société française de philatélie fiscale, Les Timbres fiscaux et socio-postaux, édité par Yvert et Tellier en 2016. Le catalogue Yvert et Tellier des timbres de France 2019 présente des timbres surchargés « annulé » et » spécimen » dans le cadre de leur utilisation dans les cours d’instruction des PTT, au même titre que les timbres-poste.
« Catalogue de cotation Yvert et Tellier. Timbres de France 2019 », 1 344 pages, 23,90 euros. En vente en librairie ou sur Internet : www.yvert.com (rens. : 03-22-71-71-71).