Cela fait trente ans, lundi 29 octobre, que la Mega Drive est arrivée sur les étals des marchands de jeux vidéo – du moins au Japon. Trente ans que sont célébrés les Sonic, les Shinobi et les Streets of Rage.

La Mega Drive de Sega, la première grande console 16 bits, deux fois plus puissante que la plupart de ses concurrentes d’alors, était pourtant pourvue d’une ludothèque bien plus large, composée de perles japonaises méconnues et de jeux occidentaux bizarres, aujourd’hui oubliés.

A l’occasion de cet anniversaire, Pixels a rebranché sa Mega Drive pendant une quinzaine d’heures, à la recherche de ces jeux, dont les possesseurs de Super Nintendo n’ont jamais entendu parler. L’heure est désormais au bilan.

  • « Shining Force II », grosses batailles et pixels fins

A l’époque de la Mega Drive, Shining Force et surtout Shining Force II (un troisième opus sortira sur Saturn) était pour Sega une véritable vitrine. Qu’on ait joué ou pas à ce jeu de rôle, alternant des phases d’exploration et des combats tactiques au tour par tour (on pense à Fire Emblem), on se souvient encore avec émotion des magnifiques écrans illustrant chaque affrontement.

« Shining Force II ». / SEGA

  • « Landstalker » et « Soleil », les deux réponses à « Zelda »

C’est une guerre secrète que se mènent depuis un quart de siècle les fans de Sega, le grand combat de notre temps : quel est le meilleur jeu d’action-jeux de rôle de la Mega Drive ? Soleil, clone pacifiste et antispéciste de Zelda ? Landstalker et sa vue de trois quarts, qui flatte la rétine autant qu’il fait des cloques aux mains (ces phases de plates-formes impossibles…) ? En fait, seul un ennemi commun est capable de réconcilier les tenants de ces deux grands jeux : les amateurs de La Légende de Thor, tellement moins charmant, tellement plus bourrin.

« Soleil ». / Atlus

  • « Aladdin » et « Batman », comme sur Super Nintendo (mais en mieux)

Quelle meilleure version pour Aladdin ? La très belle version américaine, développée pour la Mega Drive, ou la plus efficace version japonaise, développée pour Super Nintendo ? Alors que le débat n’a pas fini de diviser, jetons de l’huile sur le feu : quelle meilleure version pour Batman & Robin ?

La problématique est exactement la même. La version Mega Drive, américaine, bizarre, incroyablement mal foutue (impossible d’espérer s’en sortir aujourd’hui sans code) est, cependant, une expérience graphique à la hauteur de l’ambition du dessin animé, dont il est adapté. Un jeu doté d’animations inouïes, d’un style graphique audacieux, et d’une des meilleures bandes originales de la console. La version Super NES, peut-être meilleure, est, en tout cas, définitivement plus sage.

  • Au Japon, « Light Crusader » et les jeux Treasure

Ce n’est pas un secret : les meilleurs jeux de la Mega Drive sont japonais. Et le studio de l’Archipel qui connaît le mieux la Mega Drive (peut-être même mieux que Sega lui-même), à l’époque, c’est Treasure.

Du jeu de plates-formes Dynamite Headdy au jeu de tir survitaminé Gunstar Heroes, en passant par le jeu de combat de « boss » Alien Soldier, Treasure transforme en or tout ce qu’il touche. Sans oublier d’imposer sa marque de fabrique, comme un fil rouge entre des jeux très différents : la gestion des armes et la possibilité de les combiner entre elles.

Mention spéciale à Light Crusader, sorte d’ancêtre de Diablo, jeu de rôle mâtiné d’action dans lequel le joueur s’enfonce toujours plus profondément dans les sous-sols d’une ville manifestement maudite.

« Light Crusader ». / Sega

  • Aux Etats-Unis, « General Chaos » et les jeux Electronic Arts

Ce n’est pas un secret : les jeux les plus expérimentaux de la Mega Drive sont américains.

Electronic Arts s’en est alors fait une spécialité. A l’image de The Haunting, dans lequel le joueur doit hanter les meubles et appareils électroménagers d’une maison pour en faire fuir les occupants. Ou encore de Rolo to the Rescue, curieux jeu de plates-formes, dérivé de James Pond, une série de jeux de plates-formes plutôt connotée PC.

Mais surtout, Electronic Arts édite General Chaos, titre de stratégie agrémenté d’action et jouable à deux. On doit ce jeu innovant, unique, à la même paire (Brian Colin et Jeff Nauman) responsable une décennie plus tôt de Rampage, récemment adapté à Hollywood.

« General Chaos ». / Electronic Arts

  • Au Royaume-Uni, Puggsy et les jeux Psygnosis

Ce n’est pas un secret : les Anglais, à la fin des années 1980 et au début des années 1990, font sur micro-ordinateurs des jeux techniquement impressionnants mais parfois à la frontière du bon goût. Pendant quelques années, l’éditeur britannique Psygnosis trouve intéressant de les adapter sur Mega Drive. Notre préféré : le bizarre Puggsy, personnage entre la poire et l’étron, héros d’un jeu mêlant plates-formes et énigmes.

Des énigmes elles-mêmes très curieuses, exploitant une simulation physique balbutiante. On se retrouve ainsi à jouer avec des ventilateurs, des ballons, des armes à feu, cherchant à provoquer l’improbable réaction en chaîne qui permettra de mettre la main sur la clé du niveau suivant. Plus tard, Psygnosis fera surtout les beaux jours de la PlayStation avec la série Wipeout.

Puggsy. / Psygnosis

  • « Earnest Evans », pour faire plaisir aux fans

On n’avait pas nécessairement prévu de l’inclure dans cette sélection, mais un rapide sondage mené auprès d’un échantillon de 104 personnes qui perdaient leur temps sur Twitter, à ce moment-là, a révélé l’existence d’une étrange niche de fans : ceux des jeux Wolf Team (studio depuis absorbé par Bandai Namco).

En l’espace de deux ans, le studio enchaîne un nombre record de sorties pour la Mega Drive et son extension, le Mega CD. Tous ou presque sont inédits en Europe. La trilogie initiée par Earnest Evans bénéficie pourtant d’un petit culte : dans ce premier épisode, un Indiana Jones en caoutchouc, féru de grappin, semble loucher entre Castlevania et Rick Dangerous

Nos excuses, par avance, aux fans, mais à trop regarder ailleurs, il finit surtout par aller droit dans le mur.

« Earnest Evans ». / Wolf Team

  • « Empire of Steel », le « shoot’em up » qui n’a pas pris une ride

Empire of Steel a un peu piqué la musique de la série Supercopter, mais c’est bien là sa seule faute de goût. Doté d’une impeccable direction artistique steampunk, ce jeu de shoot dans lequel on contrôle, au choix, un biplan ou un dirigeable, a très bien vieilli. Au point d’avoir été adapté en septembre dernier sur PC.

Une nouvelle version dotée de graphismes plus fins, bien sûr, mais qui ne manque pas de rendre hommage à l’exceptionnelle finesse du design d’origine.

« Empire of Steel ». / Flying Edge

  • « Zero Tolerance », le jeu de tir incongru

On sait, à condition d’avoir développé une certaine obsession pour le fond de catalogue de la Mega Drive, que la console de Sega a connu une seconde vie au Brésil, où a été développée une très tardive version du jeu de tir Duke Nukem 3D.

Mais la console de Sega a aussi connu au moins un jeu de tir à la première personne exclusif, inédit, auquel personne ou presque n’a joué : Zero Tolerance. Dans ce clone de Wolfenstein 3D, le joueur contrôle successivement cinq héros aux armes et aux caractéristiques différentes. Le twist : le but n’est pas de trouver la sortie du niveau, mais d’abattre tous les vilains.

« Zero Tolerance ». / Accolade

  • « ToeJam & Earl », décalé et en avance sur son temps

Peut-on évoquer la Mega Drive sans parler de ToeJam & Earl ? De toute évidence, oui, d’ailleurs, tout le monde le fait.

C’est pourquoi Pixels se fait un devoir de saisir la moindre occasion pour rappeler à quel point ce jeu funky n’est pas seulement une parodie au vitriol de la culture pop et de l’american way of life du début des années 1990 : c’est aussi un titre précurseur, l’un des premiers à ripoliner les mécaniques sans concession de l’austère Rogue (mondes générés aléatoirement, caractéristiques des équipements différentes à chaque partie) au sein d’un jeu grand public.

Etrange titre sans arme et plein d’humour, ToeJam & Earl connaîtra deux suites : la troisième, Back in the Groove, sortira cet hiver sur PC, PlayStation 4, Xbox One et Switch.

« ToeJam & Earl » / SEGA