Bien que le nom de Donald Trump ne figure pas sur les bulletins de vote, de nombreux Américains perçoivent le scrutin comme un référendum pour ou contre le président avant l’échéance présidentielle de 2020. / ROBYN BECK / AFP

Deux ans après le choc qu’a représenté l’élection de Donald Trump, le 8 novembre 2016, les électeurs américains retournent aux urnes, mardi 6 novembre, pour les élections de mi-mandat. Bien que le nom de Donald Trump ne figure pas sur les bulletins de vote, de nombreux Américains perçoivent le scrutin comme un référendum pour ou contre le président, avant l’échéance présidentielle de 2020.

Après deux ans au pouvoir, sa présidence hors norme a divisé les Etats-Unis comme rarement dans leur histoire récente : démocrates et républicains ne sont d’accord sur rien, et ce sont deux visions du monde qui s’affrontent suivant des clivages entretenus et exacerbés dès la campagne de 2016 par Donald Trump lui-même.

  • Les femmes au cœur de l’élection

Un an après la vague #metoo, Donald Trump est toujours en délicatesse avec l’électorat féminin. Ecœurées par le discours agressif du président, les menaces qu’il fait peser sur les droits des femmes ou ses positions rétrogrades, sur l’avortement ou par la confirmation à la Cour suprême des Etats-Unis du juge conservateur Brett Kavanaugh, les Américaines semblent particulièrement décidées à faire entendre leur voix.

La cheffe des démocrates à la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, lors d’une manifestation, le 20 janvier 2018. / Cliff Owen / AP

Parmi celles-ci, un groupe d’électrices, les femmes blanches diplômées pourraient faire basculer des scrutins serrés en faveur des démocrates. Vivant souvent dans des zones urbaines à la périphérie des grandes agglomérations, ces électrices sont 62 % à se prononcer pour un candidat démocrate contre 45 % pour les hommes blancs ayant suivi des études, rapporte le Washington Post.

Enfin, jamais autant d’Américaines n’avaient été candidates aux élections de mi-mandat : 257 femmes ont décroché une investiture pour le Congrès, relève le Center for American Women and Politics de l’université Rutgers.

  • La violence dans la dernière ligne droite

La fin de campagne a été endeuillée par le pire attentat antisémite de l’histoire des Etats-Unis, qui a fait onze morts dans une synagogue de Pittsburgh (Pennsylvanie), le 27 octobre. Selon Scott Brady, le procureur général de l’ouest de l’Etat, l’auteur de la tuerie, Robert Bowers, a évoqué « son désir de tuer des Juifs » pendant l’attaque contre le lieu de culte.

Cet attentat a été précédé par plusieurs jours d’une chasse à l’homme tendue pour retrouver celui qui avait envoyé des colis piégés à plusieurs hautes personnalités démocrates, comme l’ancien président Barack Obama, l’ex-secrétaire d’Etat et candidate à la présidentielle Hillary Clinton et l’investisseur George Soros. Elle a débouché sur l’arrestation, en Floride, de Cesar Sayoc propriétaire d’une camionnette blanche aux vitres couvertes de photographies de Donald Trump et autres personnalités républicaines.

Cette explosion de violence, à moins de deux semaines des scrutins, a ouvert le débat sur le discours agressif du président américain et son possible effet d’incitation dans un pays profondément divisé. Pour la presse américaine, le président et son parti jouent le rôle de pompiers pyromanes, Donald Trump jugeant les « médias bidon » responsables du climat de violence politique, imputant la « grande colère » aux Etats-Unis au « traitement souvent malhonnête de l’information ».

Colis piégés : le complotisme de l’extrême droite américaine
Durée : 02:43

  • L’épouvantail de l’immigration

Mise en garde contre les démocrates qui veulent accueillir « caravanes sur caravanes », envoi de troupes à la frontière avec le Mexique pour contrer la « caravane » de migrants comparés à une « invasion », remise en cause du droit du sol, tweet scabreux d’une vidéo montrant Luis Bracamontes, immigré en situation irrégulière condamné pour le meurtre de deux policiers en Californie en 2014 et vantant ses crimes lors de son procès : Donald Trump et les républicains ont placé l’immigration au cœur de leur fin de campagne.

Rien de plus logique : l’immigration arrive au sommet des préoccupations des électeurs républicains, selon le Pew Research Center. Les pousser à voter sera décisif pour l’issue d’un scrutin.

Immigration : l'arme électorale de Trump aux midterms
Durée : 02:39

  • L’économie florissante

Donald Trump peut jubiler : la croissance a progressé plus que prévu au troisième trimestre, au rythme de 3,5 %, après 4,2 % au deuxième trimestre, et l’économie devrait finir l’année sur une croissance supérieure à 3 %, sa meilleure performance depuis 2005. Le taux de chômage est au plus bas depuis 1969, passé de 4,8 % à 3,7 %, avec plus de quatre millions d’emplois créés depuis janvier 2017.

La Bourse de Wall Street, en dépit de la correction actuelle, a bondi de plus d’un tiers pour le Nasdaq et le Dow Jones et d’un quart pour le S&P 500 depuis l’élection de M. Trump. Les salaires progressent au rythme annuel de 3,5 % (avec une inflation de 2,2 %) et les inégalités se réduisent.

Dans les bassins miniers et les régions industrielles, les « cols-bleus » apprécient les politiques protectionnistes de Donald Trump. Mais les agriculteurs, eux, ont souffert assez rapidement des mesures de représailles imposées par les partenaires commerciaux des Etats-Unis. Juste avant les élections, certains dans les régions rurales n’en ont pas retiré pour autant leur soutien au président américain, car ils croient l’homme d’affaires quand il dit que les difficultés ne seront que passagères, avant l’embellie.

  • Le débat sur les armes à feu occulté, puis relancé

Neuf mois après que dix-sept camarades de classe et enseignants ont été abattus dans leur école en Floride, c’est l’heure de vérité pour les élèves du lycée Marjory Stoneman Douglas de Parkland, en Floride. Après des mois de marches, des débrayages scolaires et une tournée pour inciter les électeurs à travers le pays la génération « mass shooting » verra quelle est la portée de son message.

En juin, ils ont pris la route pour une tournée intitulée Road to Change (route vers le changement) pour convaincre les jeunes de s’inscrire sur les listes électorales et les informer sur les candidats qui se présentent. Les lycéens de Parkland s’adressent à quelque 4 millions de leurs concitoyens et espèrent contrer leur apathie.

Le débat sur les armes à feu a ressurgi après l’attentat de Pittsburgh, le président Trump affirmant que si des gardes armés avaient été présents, ils auraient pu empêcher la tuerie. / Allen G. Breed / AP

Début octobre, la pop star Taylor Swift a annoncé qu’elle voterait démocrates et a exhorté ses fans à s’inscrire sur les listes électorales.

« S’il vous plaît, s’il vous plaît, renseignez-vous sur les candidats qui se présentent dans votre Etat et votez pour celui qui représente le plus fidèlement vos valeurs. »

Son appel a provoqué une brusque augmentation du nombre d’inscriptions sur les listes électorales, rapporte le site Vote.org.

Le débat sur les armes à feu a ressurgi après l’attentat de Pittsburgh, le président Trump affirmant que si des gardes armés avaient été présents, ils auraient pu empêcher la tuerie. Le maire démocrate de Pittsburgh, Bill Peduto, a lui répondu : « J’ai entendu le président dire qu’il faudrait armer des gardes dans nos synagogues. Notre approche devrait plutôt être : comment retirer les armes à feu qui sont le dénominateur commun de toutes les fusillades en Amérique des mains de ceux qui veulent exprimer leur haine raciste avec des meurtres ? »

  • Le face-à-face entre Trump et Obama

Ils ne se sont jamais affrontés. Et pourtant, au cours des dernières heures de la campagne le président Donald Trump et son prédécesseur, Barack Obama, échangent les coups. Côté républicain, le président est descendu dans l’arène depuis quelques semaines déjà, parcourant les Etats clés, où les candidats républicains sont en ballottage défavorable. Mais il ne s’est pas trompé sur l’enjeu de l’élection – un référendum pour ou contre lui – et exhorte ses sympathisants à se rendre aux urnes.

Sans leader naturel depuis la défaite d’Hillary Clinton, c’est Barack Obama qui est le soutien le plus recherché par les candidats démocrates. L’ancien président n’a eu de cesse de condamner la politique mise en œuvre par son successeur et sa « rhétorique de la peur ». Il s’agit aussi, pour lui, de défendre le bilan que Donald Trump s’efforce de détruire depuis son arrivée à la Maison Blanche.

Midterms : duel entre Obama et Trump
Durée : 02:12