Football : la Mauritanie prête pour un exploit historique à la CAN
Football : la Mauritanie prête pour un exploit historique à la CAN
Par Alexis Billebault
L’équipe nationale, qui affronte le Botswana dimanche, pourrait se qualifier pour la première fois pour la phase finale de la Coupe d’Afrique des nations.
Le milieu de terrain mauritanien Khassa Camara lors d’un match de qualification pour la CAN 2017, à Nelspruit, en Afrique du Sud, le 2 septembre 2016. / STRINGER / AFP
Les Mourabitounes touchent au but, et c’est tout un pays qui est prêt à fêter ce qui serait vécu comme un événement. Dimanche 18 novembre, une victoire face au Botswana, ou même un simple match nul, au cas où le Burkina Faso s’imposerait en Angola, suffiraient à faire de la Mauritanie, qui occupe la première place du groupe I, un futur participant à la CAN 2019 qui se déroulera du 15 juin au 13 juillet au Cameroun. « Il y a une énorme ferveur autour de ce match. On a l’impression que tous les Mauritaniens, y compris ceux qui ne s’intéressent pas particulièrement au football, se sentent concernés », explique Ahmed Ould Abderrahmane, le président de la Fédération de football de la République islamique de Mauritanie (FFRIM).
Des écrans géants à Nouakchott
A Nouakchott, l’engouement est tel que 100 000 personnes pourraient se diriger vers le stade Cheik Ould Boidya dimanche, alors que l’enceinte ne peut accueillir que 9 000 spectateurs. Les autorités et la FFRIM ont lancé des appels à la population pour éviter que des mouvements de foule ne provoquent des incidents : « Pour essayer de satisfaire nos supporters, des écrans géants seront installés dans plusieurs quartiers de Nouakchott. » Pour un match de qualification, c’est une première. Cela avait été le cas pour les phases finales du Championnat d’Afrique des nations (CHAN, une compétition réservée aux joueurs locaux) en 2014 et 2018. « Mais cette rencontre face au Botswana est devenue le principal sujet de conversation, que ce soit à Nouakchott ou en province », poursuit le dirigeant.
Dans le pays, l’intérêt pour la sélection nationale ne cesse de croître, à tel point que des clubs de supporters se créent régulièrement. Le milieu de terrain Khassa Camara (FC Xanthi, Grèce), international depuis 2013, a constaté le renforcement des liens entre la sélection et le public ces dernières années. « On voit que les gens sont fiers de ce qui est fait. Ils s’identifient à cette équipe composée de locaux ou de binationaux comme moi. Chaque année, on progresse. Les locaux se sont qualifiés deux fois pour le CHAN. Là, c’est l’équipe A qui est en passe de disputer la CAN. Les Mauritaniens adorent le foot mais, pendant longtemps, ils étaient un peu frustrés car la sélection jouait très peu et n’avait donc pas de résultats. Pour eux, c’est aussi une façon de prouver aux pays voisins, comme le Sénégal ou le Mali, que la Mauritanie est également capable d’exister au niveau du foot. », précise le joueur.
Faire vivre la sélection nationale
Pendant des décennies, les Mourabitounes avaient surtout brillé par leur discrétion, se contentant d’apparitions erratiques lors des qualifications pour la CAN ou la Coupe du monde. Après son élection en juillet 2011, Ahmed Ould Abderrahmane (42 ans aujourd’hui), alors président du FC Nouadhibou, le club de sa ville natale, a entrepris un travail en profondeur pour donner une nouvelle impulsion au football mauritanien. La nomination en janvier 2012 du Français Patrice Neveu au poste de sélectionneur a constitué une étape importante. Avec ce technicien qui connaît bien l’Afrique pour avoir entraîné la Guinée et la République démocratique du Congo, la fédération avait décidé de faire vivre la sélection nationale, afin qu’elle joue régulièrement des matchs de compétition ou amicaux.
Les résultats aidant, le public mauritanien, sevré de football de haut niveau pendant de longues années, s’est progressivement réapproprié son équipe. Le remplacement de Patrice Neveu par Corentin Martins (50 ans) en octobre 2014 s’est inscrit dans la continuité. L’ancien international français (14 sélections) voit le football local continuer à se structurer et le public adhérer. « Les choses bougent à tous les niveaux. La sélection nationale est la vitrine du football mauritanien. Mais, derrière, tout évolue. Les sélections de jeunes sont actives, les championnats de Ligue 1 et de Ligue 2 reposent sur un calendrier régulier. Il y a des compétitions pour les jeunes et les féminines ont leur propre championnat. Et de plus en plus de jeunes rejoignent des clubs », explique-t-il.
Les efforts consentis par la fédération et l’aide apportée par l’Etat pour le fonctionnement de la sélection nationale ont des répercussions sur l’ensemble du football mauritanien. « Il n’y a pas que les Mourabitounes qui intéressent les gens. On voit que cela suit au niveau de l’affluence dans les stades pour les matchs de championnat », poursuit Corentin Martins. Un stade de 30 000 places sera bientôt érigé à Nouakchott. « On parle peu de la Mauritanie. Beaucoup de gens sont restés sur les attentats terroristes qui l’ont frappée, mais depuis plus de six ans, le pays est stable, précise Ahmed Ould Abderrahmane. Et une qualification pour la CAN serait très positive pour son image. »