« Le Grinch » : le miteux croquemitaine revient gâcher Noël
« Le Grinch » : le miteux croquemitaine revient gâcher Noël
Par Jacques Mandelbaum
Dénué de personnalité propre, le film d’animation de Yarrow Cheney et Scott Mosier mange un peu à tous les râteliers.
Créature en forme de poire à poil vert complètement absurde, aussi laide que mal embouchée, le Grinch est né sous le crayon du célèbre Dr. Seuss (alias Theodor Seuss Geisel), prolifique auteur et illustrateur d’histoires pour enfants aux Etats-Unis. Apparu en 1957 dans l’album How The Grinch Stole Christmas (« Comment le Grincheux vola Noël »), le miteux croquemitaine connut un tel succès que sa légende est désormais associée, outre-Atlantique, à la fête de Noël. On doit à Chuck Jones (ténor des Looney Tunes à la maison Warner) une première version animée qui fit date en 1966, avec l’horrifique Boris Karloff à la voix. Puis, en 2000, un essai beaucoup moins concluant de Ron Howard en prises de vue réelles, avec Jim Carey dans le rôle-titre.
C’est aujourd’hui le Studio Universal, par le biais de sa filiale Illumination Entertainment (Moi, moche et méchant), qui nous en propose une version, mise en images par Yarrow Cheney et Scott Mosier. On y retrouve l’épure originelle. Chouville, paradisiaque petit village des montagnes, caractérisé par son sens de la gentillesse, de la solidarité et de la fête, se surpasse dans toutes les vertus précitées lorsque vient Noël. Et au-dessus du village, le Grinch, retiré dans sa grotte, maugréant à longueur d’année en compagnie de son fidèle compagnon Max, le poil hérissé l’année durant par toute cette bonté et cette bonne humeur, mais rendu quasiment malade quand Noël arrive.
Une débauche d’effets visuels
Or il se trouve que cette année-là, le maire de Chouville met les bouchées doubles pour la fête. Plus de lumières, plus de décorations, plus de joie, plus de célébration. Plus, en un mot, que le Grinch n’en peut supporter. Lequel décide en conséquence, déguisé en Père Noël tracté par un renne obèse, de ruiner la fête en défaisant ce que le vrai est censé y avoir accompli, volant tous les cadeaux des enfants, tous les sapins décorés, toutes les illuminations de la ville. Mais voilà, Chouville, à l’image de l’intrépide Cindy-Lou, fillette sans peur et sans reproche, est une ville si gentille qu’elle désarme jusqu’à la méchanceté de ceux qui, tel le Grinch, n’ont pas eu la chance, étant enfants, d’être élevés dans ce merveilleux esprit du Noël chrétien.
Pastellisée au dernier degré, cette nouvelle version se signale, davantage que par son génie, par sa fidélité à l’histoire originale, remise au rythme trépidant du jour dans une débauche d’effets visuels qui semble témoigner de sa propre peur du vide. Dénué de personnalité propre, le film mange un peu à tous les râteliers, depuis la mécanisation de la vie quotidienne du maître et de son chien qui démarque Wallace et Gromit, de Nick Park, jusqu’à la cruauté burtonienne vainement convoquée par la musique d’un Danny Elfman qui « elfmanise » à qui mieux mieux.
Il est toutefois une raison qui pourra ici discrètement divertir les parents en même temps que leurs très jeunes enfants. C’est évidemment l’actualité des Etats-Unis, actuellement gouvernés par une sorte de super-Grinch. Situation peu enviable puisque, contrairement aux vertus humanistes du conte, c’est ici Chouville, soudain oublieuse de l’esprit de Noël, qui semble s’être convertie à la fatale aigreur du Grinch.
Le Grinch / Bande-annonce officielle VOST [Au cinéma le 28 novembre]
Durée : 02:26
Film d’animation américain de Yarrow Cheney et Scott Mosier (1 h 26). Sur le Web : www.legrinch-lefilm.com et www.universalpictures.com/movies/dr-seuss-the-grinch
Les sorties cinéma de la semaine (mercredi 28 novembre)
- A Bread Factory, Part 1 : Ce qui nous unit, film américain de Patrick Wang (à ne pas manquer)
- Derniers jours à Shibati, documentaire français de Hendrick Dusollier (à ne pas manquer)
- Diamantino, film brésilien, français et portugais de Gabriel Abrantes et Daniel Schmidt (à voir)
- La Permission, film iranien de Soheil Beiraghi (à voir)
- Les Héritières, film paraguayen de Marcelo Martinessi (à voir)
- Les Veuves, film américain de Steve McQueen (à voir)
- Le Grinch, film d’animation américain de Yarrow Cheney et Scott Mosier (pourquoi pas)
- Voyage à Yoshino, film français et japonais de Naomi Kawase (pourquoi pas)
- Gutland, film allemand, belge et luxembourgeois de Govinda Van Maele (on peut éviter)
A l’affiche également :
- Casse-Noisette et les quatre royaumes, film américain de Lasse Hallström et Joe Johnston
- Les Contes merveilleux, programme de courts-métrages américain de Ray Harryhausen
- Frig, film français d’Antony Hickling
- Lola et ses frères, film français de Jean-Paul Rouve
- Sauver ou périr, film français de Frédéric Tellier (pourquoi pas)
- Portrait d’une jeune femme, film français de Stéphane Arnoux
- Robin des bois, film américain d’Otto Bathurst