Sahara occidental : le Maroc et le Polisario se rencontrent à Genève
Sahara occidental : le Maroc et le Polisario se rencontrent à Genève
Le Monde.fr avec AFP
Horst Kohler, l’émissaire de l’ONU, organise une « table ronde » à laquelle participent également l’Algérie et la Mauritanie.
L’Allemand Horst Kohler, envoyé spécial de l’ONU au Sahara occidental, visite le camp de réfugiés d’Aousserd, le 18 octobre 2017. / RYAD KRAMDI / AFP
L’émissaire de l’ONU au Sahara occidental, Horst Kohler, réunit à Genève, mercredi 5 et jeudi 6 décembre, le Maroc, le Front Polisario, l’Algérie et la Mauritanie pour une « table ronde initiale », avec l’espoir de relancer les négociations sur ce territoire disputé, au point mort depuis 2012. « Il est temps d’ouvrir un nouveau chapitre dans le processus politique », souligne la lettre d’invitation adressée en octobre par Horst Kohler, décidé à trouver une solution pour le dernier territoire du continent africain en attente d’un statut postcolonial.
Le Polisario, qui a proclamé en 1976 une République arabe sahraouie démocratique (RASD), réclame l’organisation d’un référendum d’autodétermination pour régler le conflit né au moment du départ des colons espagnols. Le Maroc contrôle dans les faits 80 % de ce territoire désertique de 266 000 km2 et traite comme ses dix autres provinces cette région dotée d’un millier de kilomètres de littoral atlantique poissonneux et d’un sous-sol riche en phosphates. Rabat rejette toute solution autre qu’une autonomie sous sa souveraineté, invoquant la nécessité de préserver la stabilité régionale.
Le dernier cycle de négociations directes lancé par l’ONU en mars 2007 s’est enlisé en mars 2012, le Maroc et le Polisario campant sur des positions inconciliables concernant le statut et le référendum. Dans l’attente d’un règlement, de 100 000 à 200 000 réfugiés – selon les sources, en l’absence de recensement officiel – vivent dans des conditions précaires dans des camps près de la ville algérienne de Tindouf, à 1 800 km au sud-ouest d’Alger, près de la frontière avec le Maroc.
L’Algérie, « pays observateur »
Chargé du dossier depuis 2017, l’ex-président allemand Horst Kohler a déjà rencontré plusieurs fois, mais séparément, les différentes parties, notamment lors d’une tournée régionale. Ses efforts ont permis d’asseoir à la même table le Maroc, le Polisario, l’Algérie et la Mauritanie, même si le format de la réunion ne fait pas l’unanimité parmi les invités : Alger assure venir en tant que « pays observateur » alors que Rabat considère son voisin comme « partie prenante ».
La réunion, prévue au Palais des nations de Genève, se veut « le premier pas d’un processus renouvelé de négociations » pour une « solution juste, durable et mutuellement acceptable qui permette l’autodétermination du peuple du Sahara occidental », selon une note d’information de l’ONU. L’ordre du jour reste très vague : « situation actuelle, intégration régionale, prochaines étapes du processus politique », selon cette note.
L’approche est de ne pas mettre « trop de pressions et d’attentes » sur cette première rencontre, considérée plutôt comme un « échauffement » visant à « rompre la glace », décrypte une source diplomatique proche du dossier, soulignant les mauvaises relations entre Alger et Rabat. Sur le terrain, « la situation est restée généralement calme des deux côtés du mur de sable » érigé par les Marocains sur 2 700 km, et ce « malgré la persistance des tensions » survenues en début d’année, selon le dernier rapport publié par l’ONU.
Pour le Polisario, la récente réduction de douze à six mois du mandat des casques bleus de la Minurso, notamment chargés de surveiller le cessez-le-feu, fait partie de la « dynamique » créée par la nomination de M. Kohler. C’est sous la pression des Etats-Unis qu’un mandat de six mois a été voté au Conseil de sécurité, en avril puis en octobre, avec en ligne de mire le coût du dispositif pour un processus de paix qui n’avance pas.
« Négociation directe, franche et loyale »
Avant la réunion de Genève, chacun est resté sur ses positions, tout en clamant sa bonne volonté.
Partisan d’une solution politique « durable » marquée par un « esprit de compromis », le Maroc ne transigera pas sur son « intégrité territoriale » et sur la « marocanité du Sahara », comme l’a récemment répété le roi Mohammed VI. Pour le Polisario, « tout peut être négociable, sauf le droit inaliénable et imprescriptible de notre peuple à l’autodétermination », a déclaré à l’AFP Mhamed Khadad, membre du secrétariat national du Front Polisario et président de la commission des affaires extérieures.
Principal soutien du Polisario, Alger appuie dans les mêmes termes « l’exercice, par le peuple du Sahara occidental, de son droit inaliénable et imprescriptible à l’autodétermination ». L’Algérie, qui ira à Genève « en qualité d’Etat voisin », prône une « négociation directe, franche et loyale » entre le Maroc et le Polisario, pour une « solution définitive », selon un récent communiqué. Officiellement, c’est le point sur « la situation au Maghreb » qui « explique la présence de l’Algérie et de la Mauritanie » à Genève, selon une source algérienne proche du dossier.