A trois jours de Noël, les « gilets jaunes » comptent de nouveau mobiliser leurs troupes dans toute la France pour un sixième samedi consécutif de manifestations, à Versailles notamment, alors que la fronde a nettement marqué le pas.

Sur le pavé versaillais, juste en face du château visité par des millions de personnes chaque année, ils pourraient être « plusieurs centaines », voire « un millier », à faire entendre leurs revendications liées pour beaucoup au pouvoir d’achat, selon le préfet des Yvelines, Jean-Jacques Brot. Son directeur de cabinet Thierry Laurent a avancé vendredi les chiffres de 1 400 personnes qui se sont déclarées « participantes » et 8 000 « intéressées » par l’événement Facebook, organisé entre autres par Eric Drouet, l’une des figures du mouvement.

La manifestation sera confinée sur l’avenue de Paris, « dans un périmètre très important », qui représente environ un kilomètre, selon M. Brot. Par crainte de débordements, le domaine et le château de Versailles seront fermés « de manière préventive ».

Vigilance à Paris

D’autres « gilets jaunes » comptent se rendre à Paris, théâtre de violents affrontements lors de manifestations précédentes. Difficile cependant de mesurer la mobilisation dans la capitale et de déterminer les lieux de rassemblement. Un seul rassemblement a été déclaré à la préfecture de police, à partir de 14 heures sur la place de la République à l’appel du « collectif les sans étiquettes ».

Samedi « c’est Paris, forcément », affirmait un « gilet jaune » lorrain, qui souhaitait rester anonyme. « La colère monte. (...) On se tâte à se mettre à crier sérieusement. » Les commerces parisiens, qui devraient accueillir de nombreux clients avant Noël, ont été « invités à faire preuve de vigilance » par la préfecture de police. « Nous espérons que nous allons enfin pouvoir avoir un samedi complet d’ouverture en décembre », indiquait vendredi soir au Parisien Jean-Noël Reinhardt, président du comité des Champs-Elysées qui regroupe la quasi-totalité des enseignes de l’avenue. « Mais on reste très prudents », ajoutait-il aussitôt.

« Un dispositif de sécurité proportionné et adapté sera mis en place » privilégiant la « mobilité et la réactivité », a affirmé, de son côté, le ministère de l’intérieur sans préciser le nombre de forces mobilisées. La semaine dernière, environ 69 000 membres des forces de l’ordre avaient été déployés, dont 8 000 à Paris, appuyées par des véhicules blindés à roues de la gendarmerie qui seront à nouveau mobilisés samedi, a fait savoir la Place Beauvau. Ils seront « positionnés » en province, à Toulouse, Bordeaux et dans les Bouches-du-Rhône et « en alerte » à Paris. Dans la capitale, toutes les stations de métro qui desservent les Champs-Elysées seront fermées, tout comme la station Miromesnil, non loin du ministère de l’intérieur et de l’Elysée.

Blocages annoncés aux frontières

Des manifestations sont aussi prévues à Lyon, à Toulouse, à Orléans ou en Bretagne, notamment. En Gironde, une source au sein du mouvement a expliqué que certains « gilets jaunes » envisageaient des « actions économiques », comme le blocage de centres commerciaux, en pleines courses de Noël.

Certains « gilets jaunes » préparent aussi une « action » au péage du Boulou (Pyrénées-Orientales) à la frontière franco-espagnole. L’une des figures du mouvement, Priscillia Ludosky, a annoncé qu’elle y serait samedi. D’autres iront du côté des frontières belge (Maubeuge-Bettignies, Tourcoing...), allemande (Strasbourg-Khel, Gambsheim...), et italienne (Menton-Vintimille). Des ports bretons pourraient aussi être impactés.

Mobilisation en baisse

Mais l’inconnue de ce samedi réside surtout dans la participation. Car depuis le pic du 17 novembre et les 282 000 manifestants recensés, la mobilisation est en baisse. Ils étaient 166 000 « gilets jaunes » à manifester le 24 novembre, 136 000 les 1er et 8 décembre et 66 000 le 15 décembre. Et le ministère de l’intérieur a décompté 3 680 « gilets jaunes » jeudi, soit l’étiage le plus bas depuis le début de ce mouvement né en réaction à une hausse prévue des taxes sur les carburants – que le gouvernement a depuis annulée.

Quelque deux cents ronds-points font encore l’objet d’occupations et doivent être évacués, a aussi précisé une source proche du dossier. « On attend d’autres propositions sur l’augmentation du pouvoir d’achat, la revalorisation des retraites, les handicapés, il n’en a pas parlé, et surtout l’emploi », expliquait vendredi Christian, un « gilet jaune » toulousain, pas convaincu par les mesures de l’exécutif pour apaiser la crise.

Vendredi, le Parlement a donné son feu vert à des mesures d’urgence économiques et sociales: défiscalisation des heures supplémentaires, exonération élargie de hausse de CSG pour des retraités et possibilité pour les entreprises de verser une « prime exceptionnelle » de mille euros, exonérée de toutes cotisations sociales et d’impôt sur le revenu, pour leurs salariés rémunérés jusqu’à 3 600 euros.