Violentes manifestations au Soudan contre la hausse du prix du pain
Violentes manifestations au Soudan contre la hausse du prix du pain
Le Monde.fr avec AFP
Le pays est en proie à une vague de protestations qui a fait au moins huit morts en cinq jours.
De nouvelles manifestations ont été organisées dimanche 23 décembre dans plusieurs villes soudanaises, y compris dans la capitale, ont rapporté des témoins, au cinquième jour d’une vague de protestations contre la hausse du prix du pain.
A Omdurman, partie ouest de la capitale, Khartoum, une manifestation a eu lieu en soirée à l’issue d’un match de football, réunissant des centaines de personnes. « Après le match (...), des centaines de supporters ont crié : “Liberté, paix et justice” », a indiqué un témoin. Selon un autre, les forces anti-émeutes ont tiré des gaz lacrymogènes sur les protestataires.
La récente décision du gouvernement d’augmenter le prix du pain de 1 à 3 livres soudanaises (de 2 à 6 centimes d’euros) suscite depuis mercredi des manifestations. Elles ont entraîné au moins huit morts – six à Al-Gadaref (est) et deux à Atbara (est) – lors de heurts avec les forces anti-émeutes, selon des responsables et des témoins. Le principal dirigeant de l’opposition, Sadek al-Mahdi, tout juste rentré d’exil, a dénoncé samedi une « répression armée », et évoqué un bilan supérieur, de 22 morts, impossible à vérifier de source indépendante.
Le Soudan connaît des difficultés économiques croissantes avec une inflation de près de 70% et une plongée de la livre soudanaise face au dollar. La colère de la population s’est peu à peu répandue à tout le pays.
Des centaines de manifestants à travers le pays
Dimanche, des centaines de personnes se sont réunies sur le marché d’Oum Rawaba, dans l’Etat du Kordofan du Nord, scandant pour certains « le peuple veut la chute du régime », a indiqué par téléphone un habitant à l’agence France-Presse (AFP). Des « centaines » de manifestants se sont également rassemblés, selon un témoin, à Atabara (est), ville dans laquelle le mouvement est né et où deux personnes sont mortes jeudi.
Parallèlement, un groupement de travailleurs de différents secteurs d’activités a appelé dans un communiqué à mener diverses actions de grèves, à commencer par les hôpitaux lundi. « Les médecins n’interviendront que dans les cas d’urgence », a précisé à l’AFP Mohamed al-Assam, membre de ce groupement.
Dimanche, mise à part la manifestation à Omdurman, les grandes artères de Khartoum sont, elles, restées calmes. Les écoles et les universités sont fermées pour une période indéterminée sur décision des autorités. Des policiers anti-émeutes, équipés de matraques et de gaz lacrymogènes, étaient postés aux abords des bâtiments universitaires.
« Cellule de saboteurs »
Ailleurs, des habitants ont fait la queue devant les boulangeries, qui refusaient de vendre plus de 20 miches de pain par personne. « J’ai une grande famille et ce pain ne nous suffit pas pour les trois repas » quotidiens, a déploré l’un d’eux. « Il ne m’autorisera pas à t’en donner plus », a répondu un employé en désignant un agent de sécurité.
Dans le même temps, les autorités ont annoncé, via l’agence officielle Suna, l’arrestation d’une « cellule de saboteurs qui souhaitaient commettre des actes de vandalisme dans la capitale ». Elles ont ajouté que ce groupe comprenait des « membres de partis d’opposition », sans les nommer. Sadiq Youssef, un cadre de la coalition d’opposition des Forces du consensus national, a affirmé samedi que 14 membres de ce mouvement, dont le président Farouk Abou Eissa, avaient été arrêtés « à la sortie d’une réunion ».
Le ministère soudanais des Affaires étrangères a convoqué l’ambassadeur du Koweït à Khartoum après que cet Etat du Golfe a appelé ses ressortissants à quitter le Soudan.