« Rembob’INA » : Alexandre Soljenitsyne et Bernard Pivot, faiseurs d’histoire
« Rembob’INA » : Alexandre Soljenitsyne et Bernard Pivot, faiseurs d’histoire
Par Catherine Pacary
L’émission de LCP, animée par Patrick Cohen, fait revivre trois rencontres entre l’écrivain russe et le présentateur d’« Apostrophes ».
« Ce n’est pas tous les jours que l’on rencontre quelqu’un qui a changé le cours de l’histoire ! » Bernard Pivot, créateur des émissions littéraires « Apostrophes » (1975-1990) et « Bouillon de culture » (1991-2001), a eu « la chance » de vivre une telle expérience à quatre reprises, face à l’écrivain russe dissident Alexandre Soljenitsyne (1918-2008). « Rembob’INA », l’émission de LCP animée par Patrick Cohen, nous fait revivre trois de ces « directs » par la magie des archives de l’Institut national de l’audiovisuel. Au commentaire, Bernard Pivot n’a rien perdu de sa faculté d’étonnement à 83 ans.
Lorsqu’il reçoit pour la première fois l’auteur de L’Archipel du goulag (Seuil, 1974) sur le plateau d’Antenne 2, le 11 avril 1975, la présence de ce dernier, expulsé d’URSS, est un événement en soi. L’opposant à Staline s’exprime sans exubérance. Oui, il a appris « par cœur » ses livres écrits en détention ; non cela n’a rien d’extraordinaire. L’émission fait toutefois l’effet d’une bombe et provoque la scission des intellectuels de gauche.
« Le communisme sera vaincu »
La deuxième rencontre a lieu le 9 décembre 1983 à Cavendish, dans le Vermont, où l’écrivain vit alors en reclus, avec sa femme, leurs trois fils et sa belle-mère.
Alexandre Soljenitsyne apparaît agité, agacé par les critiques, mais d’un optimisme déconcertant : « Le communisme sera vaincu (…) de l’intérieur. » Ainsi pourra-t-il rentrer chez lui, en Russie. « La certitude du retourne me quitte pas. » Six ans plus tard, la chute du mur de Berlin lui donnera raison.
C’est ainsi en Russie que Bernard Pivot retrouve en 1998 le Nobel de littérature, quatre ans après son installation dans la banlieue de Moscou. Ses fils, naturalisés américains, sont restés aux Etats-Unis. Affaibli, Soljenitsyne remercie Pivot de sa présence, une inversion des rôles qui déstabilise le présentateur. L’idéaliste s’est aigri. Il parle de démocratie « comme [de] la gestion effective du peuple par lui-même, de la base au sommet », mais n’y croit plus : « Eux [les dirigeants russes] l’entendent comme une gestion exercée par la classe instruite. » Des mots qui s’inscrivent étrangement dans notre actualité de fin d’année.
BANDE ANNONCE-REMBOB'INA-Apostrophes
Durée : 00:33
Rembob’INA, présenté par Patrick Cohen. presse.lcp.fr et lcp.fr/collection/rembobina