« Gilets jaunes » : plusieurs journalistes agressés lors de l’acte IX
« Gilets jaunes » : plusieurs journalistes agressés lors de l’acte IX
Le groupe TF1 a notamment annoncé vouloir « porter plainte contre les agresseurs » d’une équipe de journalistes de LCI à Rouen.
Manifestation de « gilets jaunes » à Paris, samedi 12 janvier. Sur une pancarte, on peut lire : « Médias = propagande d’Etat ». / LUDOVIC MARIN / AFP
Plusieurs journalistes ont été agressés, samedi 12 janvier, lors de « l’acte IX » de la mobilisation des « gilets jaunes » qui a rassemblé 84 000 manifestants partout en France.
A Rouen, une équipe de LCI composée de deux journalistes et deux agents de protection a été violemment prise à partie par plusieurs agresseurs présents dans la manifestation des « gilets jaunes ». L’un des agents de sécurité a été roué de coups et blessé au visage. Soufrant d’une fracture du nez, il a été transporté à l’hôpital. Le groupe TF1 a condamné ces actes de violence « avec la plus grande fermeté » et va « porter plainte contre les agresseurs », a fait savoir, sur Twitter, Valérie Nataf, directrice de la rédaction de LCI.
Sur une vidéo diffusée par le quotidien régional Paris Normandie, on voit cet agent être entouré et roué de coups par plusieurs personnes, dont certaines portant un gilet jaune, alors qu’il était à terre :
VIDÉO @paris_normandie. Une équipe de journalistes de la chaîne @LCI ciblée par des manifestants à #Rouen. Les deux… https://t.co/h5pUs3JRHP
— paris_normandie (@paris_normandie)
Claques dans le dos et insultes
A Paris, une équipe de journalistes de LCI a aussi été prise à partie par des manifestants et une journaliste a été jetée à terre avant d’être protégée par d’autres manifestants. Egalement ce samedi, à Toulon (Var) cette fois, deux journalistes vidéo de l’AFP ont été poursuivis par une dizaine de personnes et ont reçu « des claques dans le dos, dans la caméra » et un « coup de pied (…) dans la hanche », a raconté l’un d’eux, avant de trouver refuge dans un restaurant.
A Marseille, une journaliste vidéo de France 3 et deux photographes locaux ont été empêchés de travailler par une dizaine de « gilets jaunes » qui les ont contraints à s’éloigner, en insultant « les journalistes qui ne font que mentir ». A Toulouse, c’est une journaliste de La Dépêche du midi qui a été prise pour cible. Seule et réfugiée dans sa voiture, elle a vu les manifestants lui hurler : « On va te sortir et te violer », a rapporté Lionel Laparade, rédacteur en chef adjoint du journal sur Twitter. Elle a pu leur échapper grâce à l’aide de deux « gilets jaunes ».
Par ailleurs, dans la nuit précédant le 12 janvier, un dépôt de La Voix du Nord a été bloqué par des « gilets jaunes », empêchant la distribution de 20 000 exemplaires du journal, tandis que d’autres manifestants empêchaient la sortie des camions du centre d’impression du quotidien L’Yonne Républicaine, à Auxerre.
Ce n’est pas la première fois depuis le début de cette mobilisation que des professionnels de l’information couvrant les manifestations sont pris à partie, accusés, entre autres, d’être à la « botte » du pouvoir. Au point que les chaînes d’information ont dû prendre des mesures pour protéger leurs reporters. Une trentaine de journalistes depuis le début du mouvement ont, par ailleurs, été victimes de violences policières.
« Dictature »
Le ministre de la culture, Franck Riester, a dénoncé dans un tweet l’« ignoble lynchage » des journalistes de LCI à Rouen, tandis que le ministre de l’intérieur, Christophe Castaner, a prévenu que les agresseurs devront « rendre des comptes devant la justice ».
Dans notre démocratie, la presse est libre.Dans notre République, la liberté d'informer est inaliénable.Violenter… https://t.co/ekmV7lEtkR
— CCastaner (@Christophe Castaner)
« Critiquez-nous tant que vous voulez, c’est bien normal. Mais n’oubliez pas qu’un pays sans journalistes s’appelle une dictature », a lancé sur son compte twitter le journaliste Thomas Sotto. « Il y a les dictatures où le pouvoir enferme, torture et tue les journalistes. Et il y a les démocraties comme la France, où c’est le “peuple” auto-proclamé qui s’en charge », a réagi de son côté l’écrivain et philosophe Raphaël Enthoven. « Ce sont souvent les journalistes, photographes, vidéastes les plus précarisés qui mouillent leur chemise pour faire remonter gestes et paroles du terrain. En sus d’être d’une infinie tristesse, les images d’hier sont plus qu’inquiétantes », a également déploré l’historienne Laurence de Cock.
Le tweet de Noëlle Lenoir, ministre des affaires européennes dans le 2e gouvernement Raffarin (2002-2004) - affirmant que « les journalistes de LCI agressés par les gilets jaunes sont responsables de ce qu’ils subissent, mais aussi de ce qu’ils font subir aux forces de l’ordre jour après jour » -, a suscité de nombreux commentaires. Certains internautes la taclant d’« irresponsable et indigne », d’autres la défendant. « Ceux qui pensent que je légitime la violence et ne défends pas ardemment la liberté de la presse n’ont pas compris mon souci de ramener les gilets jaunes à leur dimension réelle pour protégre les journalistes qui en sont victimes », a ensuite posté l’ancienne ministre sur son compte Twitter.
« Gilet jaunes » : d’où vient la défiance envers les médias ?
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