Les Etats-Unis veulent creuser l’écart dans la défense antimissile
Les Etats-Unis veulent creuser l’écart dans la défense antimissile
Par Gilles Paris (Washington, correspondant)
Donald Trump a annoncé une stratégie visant à une maîtrise sans partage de l’espace.
Donald Trump, le 17 janvier à Washington. / MANDEL NGAN / AFP
Un système de défense infaillible reposant notamment sur une maîtrise de l’espace sans partage, voilà la promesse faite par Donald Trump, jeudi 17 janvier, à l’occasion de la présentation de la nouvelle stratégie de défense antimissile des Etats-Unis. Cette dernière était attendue. Depuis la précédente, qui remontait à 2010 et à l’administration démocrate de Barack Obama, la course a été relancée par la Chine et la Russie, qui se sont notamment engagées dans la voie des missiles hypersoniques.
De son côté, l’Iran n’a pas renoncé à développer son programme balistique, comme l’a montré un tir raté de lanceur spatial, le 15 janvier. Et la Corée du Nord a multiplié les tests de missiles intercontinentaux avant de s’engager dans une négociation avec Washington à propos de son programme nucléaire.
Alors qu’un émissaire nord-coréen est en visite à Washington pour préparer manifestement une seconde rencontre entre le président des Etats-Unis et le dirigeant de Corée du Nord, Kim Jong-un, Donald Trump a évité de critiquer publiquement Pyongyang jeudi. Le document du Pentagone estime cependant que le pays « continue de représenter une menace extraordinaire » et que « les Etats-Unis doivent rester vigilants ».
« Notre objectif est simple (…), détecter et détruire tout missile lancé contre les Etats-Unis, partout, à tout moment, a assuré le président. Il ne suffit pas de rester à la hauteur de nos adversaires ; nous devons les dépasser à chaque fois. Nous devons poursuivre la recherche et la technologie de pointe pour garantir que les Etats-Unis ont toujours plusieurs longueurs d’avance sur ceux qui nous feraient du mal », a-t-il dit. « L’espace est un nouveau domaine de combat », a poursuivi le président des Etats-Unis, qui s’était opposé à son précédent secrétaire à la défense, James Mattis, à propos de la création d’une « force spatiale » spécifique à laquelle ce dernier était peu favorable, redoutant manifestement ses implications en termes d’organisation.
Critiques contre l’Allemagne
« Mon prochain budget investira dans un niveau de défense antimissile basée dans l’espace. C’est une nouvelle technologie. En fin de compte, cela constituera une partie très importante de notre défense et, bien entendu, de notre attaque », a promis Donald Trump. Les moyens considérables requis pour développer un tel réseau de satellites de détection démontrent la priorité accordée à ce domaine. « Nous mettrons fin à tout lancement de missile par des puissances hostiles, ou à des tirs par erreur. Ça n’arrivera pas. Quels que soient le type de missile, ou l’origine géographique de l’attaque », a affirmé le président.
Pour Quentin Lopinot, chercheur associé au Center for Strategic and International Studies, un cercle de réflexion de Washington, ce discours « traduit une ambition plus forte et plus assumée qui s’inscrit dans le droit-fil des autres documents stratégiques » publiés depuis plus d’un an par l’administration Trump. Une inflexion mise sur le compte du contexte, et notamment le sentiment à Washington que « la compétition se durcit et que les développements technologiques des adversaires sont plus importants que prévu », juge-t-il.
L’une des évolutions notables est à ses yeux l’intégration plus grande « entre ce qui est défensif et ce qui est offensif parce qu’un système de défense peut aussi reposer sur l’attaque du missile adverse avant qu’il soit tiré ». « La distinction est plus ténue, il y a plus de passerelles » permises par la technologie et par le refus de contraintes sur le développement de systèmes de défense antimissile, ajoute-t-il.
Quentin Lopinot note que le document décrivant cette stratégie, publié jeudi, « met l’accent sur l’interopérabilité » avec les systèmes de défense antimissile des partenaires de Washington. Jeudi, Donald Trump a cependant profité de la tribune qui lui était offerte pour se plaindre une nouvelle fois d’alliés réticents, selon lui, à participer aux dépenses de défense à la hauteur de leurs moyens, ciblant spécifiquement l’Allemagne.