« L’Incroyable Histoire du facteur Cheval » : un portrait dénué de fantaisie
« L’Incroyable Histoire du facteur Cheval » : un portrait dénué de fantaisie
Par Clarisse Fabre
Jacques Gamblin incarne de manière trop figée celui qui a construit de ses mains, entre 1879 et 1912, l’extraordinaire Palais de la Drôme.
Adapter au cinéma l’épopée de la construction du Palais idéal du facteur Cheval à Hauterives (Drôme), de 1879 à 1912, est une belle idée. Belle idée car son bâtisseur, Ferdinand Cheval (1836-1924), fut un homme hors norme, ancien boulanger devenu facteur qui parcourait chaque jour, tout en rêvant, une quarantaine de kilomètres à pied pour sa tournée dans la Drôme rurale des petits chemins. Et qui un jour, trébuchant sur un drôle de caillou, eut l’idée de bâtir un « Palais » de pierres avec la seule force de son courage et de son imaginaire débordant – en 1969, l’extraordianire construction a été classée au titre des Monuments historiques.
N’étant ni architecte, ni maçon, le facteur Cheval apprit tout seul et inventa des formes inédites, au moment même où l’Espagnol Antoni Gaudi (1852-1926) travaillait nuit et jour à élever la Sagrada Familia à Barcelone – tout en étant très différents, les deux hommes sont considérés comme les précurseurs de l’architecture organique et utopique.
Le réalisateur Nils Tavernier s’est emparé de cette histoire, en y intégrant les éléments biographiques du fameux facteur, un taiseux que certains disaient « borné » et d’autres « fou ». Il connut beaucoup de malheurs dans sa vie privée : la perte de sa première femme, le décès de sa fillette issue de son deuxième mariage, la mort de sa seconde épouse, etc. Jacques Gamblin joue le facteur et Laetitia Casta la seconde épouse, aimante, dévouée, patiente.
Jeu figé
Les ingrédients étaient là pour pimenter le récit et Nils Tavernier ne s’en prive pas. Le film est lesté par une atmosphère pesante au fil des enterrements, des soirées de labeur et des saisons qui passent. Les quelques passages d’éclaircie sont les moments de complicité entre le facteur et sa fille Alice (Zélie Rixhon, formidable), avant que celle-ci ne meure d’une forte fièvre.
Jacques Gamblin s’est donné sans compter pour incarner son personnage. Mais le choix d’un jeu figé, traits immobiles sous le maquillage et regard de taupe d’où ne filtre pas grand-chose, conduit à la caricature. La fantaisie qui devait habiter l’incroyable facteur, au fond de lui, n’apparaît guère ici.
L'INCROYABLE HISTOIRE DU FACTEUR CHEVAL - Bande-annonce
Durée : 01:44
Film français de Nils Tavernier. Avec Jacques Gamblin, Laetitia Casta, Bernard Le Coq (1 h 45). Sur le Web : www.nilstavernier.com/facteur-cheval,335,fr.html et www.facebook.com/sndfilms