Au Soudan, le président Al-Bachir accuse les médias d’exagérer l’ampleur de la contestation
Au Soudan, le président Al-Bachir accuse les médias d’exagérer l’ampleur de la contestation
Le Monde.fr avec AFP
Depuis le 19 décembre, le pays est secoué par des manifestations qui auraient causé la mort de plus de 40 personnes, selon des ONG de défense des droits humains.
Manifestation antigouvernementale à Omdourman, près de Khartoum, le 20 janvier 2019. / Mohamed Nureldin Abdallah / REUTERS
La police soudanaise a réprimé avec des tirs de gaz lacrymogènes de nouvelles manifestations antigouvernementales dimanche 27 janvier, le président Omar Al-Bachir accusant les médias d’exagérer l’ampleur de la contestation au Soudan. Miné par une crise économique et des pénuries, le Soudan est secoué depuis le 19 décembre 2018 par des manifestations quasi quotidiennes déclenchées par la décision du gouvernement de tripler le prix du pain.
Les protestataires appellent au départ du président Al-Bachir, arrivé au pouvoir il y a près de 30 ans, en 1989, à la suite d’un coup d’Etat. Selon un bilan officiel, 30 personnes ont trouvé la mort lors de ces manifestations, les ONG de défense des droits humains évoquant de leur côté au moins 40 morts.
Dimanche, des manifestants sont sortis dans les rues de Khartoum et de sa ville jumelle d’Omdourman, répondant à l’appel de l’Association des professionnels soudanais (SPA), fer de lance de la contestation. Mais un important déploiement des forces de police et d’agents de sécurité a empêché les protestataires de se rassembler, ont rapporté des témoins.
Les manifestants ont malgré tout réussi à se réunir dans des quartiers résidentiels de Khartoum et d’Omdourman, selon la même source. « Vous êtes la police, vous devez nous protéger », ont crié les manifestants, alors que des policiers bouclaient plusieurs places où étaient prévus des rassemblements. La police a déversé de l’eau boueuse sur certains de ces lieux dans le but d’empêcher les manifestants d’y accéder, ont indiqué des témoins.
Des « conspirateurs »
Les forces de l’ordre ont ensuite tiré des gaz lacrymogènes sur des manifestants qui tentaient de se rassembler dans le quartier d’Al-Thawra à Omdourman et dans deux autres quartiers à Khartoum, ont rapporté des témoins. Quatre journalistes ont par ailleurs été arrêtés dimanche par les forces de sécurité, a indiqué un réseau informel de journalistes soudanais. La SPA a appelé à des manifestations antigouvernementales à travers le pays jusqu’à mercredi.
M. Al-Bachir a toujours fermement rejeté les appels à sa démission. Le président soudanais a accusé dimanche les médias d’exagérer l’ampleur des manifestations, lors d’une visite en Egypte pour rencontrer son homologue Abdel Fattah Al-Sissi. « On ne peut pas nier qu’il y a un problème, mais il n’a pas l’ampleur et les dimensions qu’en donnent les médias », a déclaré M. Al-Bachir devant la presse.
Le mouvement de protestation auquel il fait face est une « tentative de reproduire » au Soudan ce que l’on appelle « le printemps arabe », a-t-il affirmé. Le président soudanais avait imputé la responsabilité des violences meurtrières à des « conspirateurs » infiltrés parmi les manifestants. Le Soudan fait face à un grave déficit en devises étrangères et les habitants sont confrontés à des pénuries régulières d’aliments et de carburants, tandis que les prix de certaines denrées subissent une forte hausse.