Roger Federer ou l’histoire d’un « centenaire » du tennis
Roger Federer ou l’histoire d’un « centenaire » du tennis
Par Alexandre Pedro
Victorieux en finale du Greg Stefanos Tsitsipas, le Suisse remporte le 100e tournoi de sa carrière. Retour sur une série débutée à Milan en 2001 contre le Français, Julien Boutter.
A 37 ans, Roger Federer entre encore un petit plus dans l’histoire du tennis. Oui, c’est possible. Samedi 2 mars, le Suisse a remporté le tournoi de Dubaï (Émirats arabes unis) en dominant en finale le Grec Stefanos Tsitsipas (6-4, 6-4), son tombeur en huitième de finale du dernier Open d’Australie. Une victoire pour un chiffre rond : 100 comme le nombre de tournois remportés. Retour en cinq dates et cinq victoires sur cette incroyable série débutée il y a dix-huit ans.
Milan 2001 : Une première et une improbable erreur d’arbitrage
Entre Roger Federer et la France, c’est souvent une question de premières fois. Le 28 octobre 1998, le Balois de 17 ans remporte ainsi son tout premier match sur le circuit ATP à Toulouse contre Guillaume Raoux. Le 7 février 2000, il dispute et perd sa première finale lors de l’Open 13 de Marseille contre son compatriote et « grand frère », Marc Rosset.
Le 29 janvier 2001, le Suisse affronte Julien Boutter en finale du tournoi de Milan. Difficile de faire plus opposé que les deux hommes. Il y a d’un côté l’ancien junior prodige, de l’autre le Lorrain débarqué sur le circuit à 21 ans après des études d’ingénieur en biomécanique. Le match, lui, est équilibré. Mais au début du troisième set un événement rarissime se produit. Boutter est breaké et est alors pris d’un doute. « Pendant tout ce jeu-là, je me dis que ce n’était pas à moi de servir. L’arbitre s’était trompé ! », racontait-il dans L’Equipe en 2018.
Consultant télé et directeur de l’Open de Moselle, Boutter croise souvent Roger Federer et n’hésite jamais à le chambrer à propos de cet épisode milanais. « On en rigole. Je lui ai dit : “Roger, si j’avais gagné ce match, t’imagines, nos carrières auraient été inversées !”»
Wimbledon 2003 : première victoire en Grand Chelem du « nouveau Federer »
Le 23 juin 2003, Roger Federer surclasse l’Australien Mark Philippoussis en finale de Wimbledon (7-6, 6-2, 7-6) pour remporter son neuvième tournoi, et surtout son premier majeur. Ce jour-là, l’ancien briseur compulsif de raquettes éteint les derniers doutes sur sa capacité à être un champion.
Un mois plus tôt, ce n’était pas encore gagné pourtant. Tête de série numéro 5 à Roland-Garros, Federer est programmé sur le central contre le Péruvien Luis Horna (88e mondial). Une formalité, normalement. Mais le Suisse perd le fil de son tennis, s’énerve et mord la poussière en trois sets. Dans le vestiaire, il brise une par une ses raquettes et se fait une promesse : il n’affichera plus jamais un tel comportement sur un court. « Cette défaite a considérablement endurci mon caractère. Elle m’a notamment appris la ténacité et la patience », dira-t-il. Le « Federer nouveau » était né.
Roger Federer remporte Wimbledon en 2003 / ODD ANDERSEN / AFP
Miami 2005 : Nadal déjà !
Le 22 mars 2005, Roger remporte le Masters 1000 de Miami et ajoute un 27e titre à son palmarès de numéro un mondial incontesté. La routine. Mais face à lui ce jour-là se dresse un gamin de 18 ans en pantacourt, tee-shirt sans manches et qui hurle des « vamos » sonores après le moindre point gagnant. Rafael Nadal est déjà un coriace et céde en cinq sets (2-6, 6-7, 7-6, 6-3, 6-1).
Federer – qui connaît un peu le tennis – pressent déjà la menace que représente l’Espagnol. « C’est un super joueur. Son avenir ? Oh non, s’il vous plaît, je ne préfère même pas imaginer la progression de ce gars-là ! ». Deux mois et demi plus tard, Nadal prendre sa revanche en demi-finale de Roland-Garros.
Roland-Garros 2009 : Enfin roi sur terre
A la différence d’un Peter Sampras, Federer n’a rien d’un allergique à la terre battue. Non, son problème a lui s’appelle Rafael Nadal – son bourreau depuis quatre ans à Roland-Garros. Mais le Majorquin ayant été sorti à la surprise générale par Robin Soderling, les planètes s’alignent enfin pour le Suisse en 2009.
Passé par loin de la défaite contre Juan-Martin Del Potro en demi-finale, il retrouve Soderling en finale et ne laisse pas passer sa chance. Federer déroule en trois sets (6-1, 7-5, 6-4). La seule frayeur ne viendra pas du son adversaire suédois, mais des tribunes. Le dénommé Jimmy Jump – bien connu pour ses apparitions fortuites dans les enceintes sportives – s’est rué sur Federer pour tenter de lui mettre un chapeau rouge. Une fois oubliée cette mauvaise blague, le vainqueur du jour savourera sa 14e victoire en Grand-Chelem faisant de lui l’égal de Peter Sampras.
Roger Federer savoure enfin sa victoire à Roland-Garros en 2009 / PATRICK KOVARIK / AFP
Melbourne 2017 : la résurrection
A 35 ans, le déclin frappe peut-être à la porte en ce début d’année 2017. Roger Federer n’a plus soulevé de trophée depuis treize mois et son cher tournoi de Bâle. Absent des courts pendant six mois, il n’est que tête de série 17 de cet Open d’Australie.
Mais l’obsolescence programmée ne semble pas dans le logiciel du Suisse. Celui-ci trace sa route jusqu’à la finale où il croise un autre revenant : Rafael Nadal. La rencontre est un nouveau sommet de tennis entre les deux hommes. Mené 3-1 lors de la cinquième manche, Federer aligne cinq jeux de suite et lâchera après la rencontre n’avoir « jamais aussi bien joué que dans ce set ».
Avec ce 89e titre, il prouve que son histoire avec le tennis était encore à écrire. Depuis, il a rajouté onze tournois à son palmarès. Devant lui, il n’aperçoit plus que Jimmy Connors (109). Reste à savoir si Federer se laissera le temps de rattraper l’Américain. En décembre dernier, il évoquait la possibilité d’arrêter sa carrière à l’automne 2019.
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