Jean Hinchliffe : « A mon âge, je ne devrais pas avoir à m’occuper du climat »
Jean Hinchliffe : « A mon âge, je ne devrais pas avoir à m’occuper du climat »
Par Isabelle Dellerba (Sydney, correspondance)
La jeune Australienne de 15 ans, à la pointe de la mobilisation des jeunes pour le climat, entend suppléer les reponsables politiques jugés inactifs.
Manifestation pour le climat, à Sydney, le 15 mars. / SWATI PANDEY / REUTERS
A tout juste 15 ans, Jean Hinchliffe ne se fait plus d’illusions. Enfant, elle croyait que les « politiciens étaient là pour régler les problèmes du monde ». Adolescente, cette pétillante jeune fille aux grands yeux noirs estime que si elle n’agit pas, personne ne le fera à sa place.
Dès lors, quand fin octobre 2018 des élèves de Melbourne, inspirées par l’activiste suédoise Greta Thunberg, lancent la « Strike 4 Climate Action » (« grève pour le climat »), la lycéenne propose immédiatement d’organiser la mobilisation à Sydney. « Le climat, c’est le plus grand défi auquel doive faire face l’humanité. Bien sûr, à mon âge, je ne devrais pas avoir à m’occuper de ce genre de choses. Mais je ne pouvais pas rester les bras croisés », lance-t-elle.
Le 30 novembre, 15 000 écoliers, collégiens et lycéens ont battu le pavé dans plus d’une trentaine de villes de l’île-continent pour dénoncer l’inaction du gouvernement conservateur face au réchauffement climatique – l’Australie est l’un des premiers pollueurs de la planète par habitant – et réclamer des mesures d’urgence.
Militante du mariage pour tous
A Sydney, ils étaient 7 000. « Chaque manifestation demande un énorme travail de logistique, de communication. J’apprends au fur et à mesure », explique Jean Hinchliffe, qui dès 13 ans a mené sa première action militante en appelant à voter oui lors du référendum sur le mariage pour tous.
En amont du rassemblement, cette fille de cadres, également actrice professionnelle, s’est entretenue avec Greta Thunberg, à l’origine du mouvement mondial de jeunesse pour la défense du climat, en qui elle voit une « immense source d’inspiration pour avoir réussi à lancer une mobilisation à l’échelle planétaire ».
Chaque semaine, l’Australienne participe à des réunions en ligne avec d’autres jeunes des cinq continents : « Notre génération a une chance incroyable. Grâce à internet, nous pouvons traverser virtuellement les frontières afin de nous rencontrer et de mener un combat commun. » A Sydney aussi, c’est sur la Toile qu’elle retrouve la poignée d’autres adolescents avec qui elle organise la manifestation du 15 mars. Ils ont tous entre 14 et 17 ans.
« Nous sommes les plus mobilisés car nous ne pouvons pas voter. C’est la seule façon de nous faire entendre. Et pour nous, l’environnement est un sujet de préoccupation majeur. Nous avons grandi en entendant parler de la hausse des températures », explique la lycéenne, qui fait la fierté de ses parents – heureux de découvrir une jeunesse engagée, un peu moins enthousiastes en ce qui concerne les grèves hebdomadaires qu’elle est la seule à suivre dans son établissement. « Avec d’autres élèves dans le pays, nous utilisons ce temps pour alerter les élus », justifie-t-elle.
Le premier ministre, Scott Morrison, ne s’est guère montré réceptif. « Ce que nous voulons, c’est plus d’apprentissage dans les écoles et moins d’activisme dans les écoles », a-t-il déclaré le 26 novembre devant le parlement. Ces mots excèdent Jean Hinchliffe : « C’est notre génération qui va payer les pots cassés. Si la classe politique assumait ses responsabilités, nous n’aurions pas à descendre dans la rue. »