La Nouvelle-Zélande interdit les fusils d’assaut
La Nouvelle-Zélande interdit les fusils d’assaut
Le Monde.fr avec AFP
La première ministre Jacinda Ardern a annoncé jeudi que le pays va interdire la vente de fusils d’assaut et d’armes semi-automatiques de style militaire.
La première ministre de Nouvelle-Zélande Jacinda Ardern le 20 mars à Christchurch. / EDGAR SU / REUTERS
La première ministre de Nouvelle-Zélande a annoncé jeudi 21 mars l’interdiction des armes semi-automatiques et fusils d’assaut alors qu’étaient inhumées des nouvelles victimes du tueur des mosquées, dont un adolescent qui rêvait d’être gardien de but à Manchester United.
Cinquante fidèles ont été abattus il y a près d’une semaine par le suprémaciste blanc Brenton Tarrant dans deux mosquées de la plus grande ville de l’île du Sud, un massacre qu’il a filmé et diffusé en direct sur Facebook.
La police a annoncé que la totalité des victimes étaient désormais identifiées, permettant de soulager la frustration des familles alors que la coutume musulmane veut que les morts soient enterrés le plus rapidement possible, généralement dans les 24 heurs suivant le décès.
Panoplie de mesures
Jacinda Ardern avait promis immédiatement après le carnage un durcissement d’une législation qui avait permis au tueur d’acheter en toute légalité l’arsenal ayant servi à l’attaque, y compris des armes semi-automatiques. « Toutes les armes semi-automatiques utilisées dans l’attaque terroriste de vendredi seront interdites dans ce pays », a déclaré la cheffe du gouvernement en détaillant toute une panoplie de mesures qui concrétisent sa promesse. Les chargeurs à grande capacité et autres dispositifs qui permettent des tirs plus rapides seront également hors la loi.
La réforme de la législation sera présentée au Parlement début avril mais dans l’intervalle, des mesures provisoires empêcheront toute ruée sur les armes, ce qui signifie qu’une interdiction de facto est déjà en vigueur. « C’est une bonne chose, pourquoi aurions nous besoin de telles armes dans nos maisons ? », a déclaré à l’AFP Kawthar Abulaban, 54 ans, qui a survécu à l’attaque contre la mosquée al-Noor, la première visée par l’extrémiste australien de 28 ans. « Pourquoi est-ce qu’on aurait chez soi des armes semi-automatiques ? Ce n’est pas bien ».
« Arrêter la violence des armes »
L’attaque a provoqué de nombreux débats, tant en Nouvelle-Zélande qu’à l’étranger, sur l’accès aux armes et l’utilisation des réseaux sociaux par les extrémistes.
Le bannissement par Wellington des armes de type militaire ne devrait pas manquer d’alimenter la controverse. Sur Twitter, des internautes américains rendaient hommage à la réaction rapide de Mme Ardern tandis que d’autres montaient au créneau pour défendre leur droit constitutionnel à s’armer. « C’est à ça que ressemblent de vraies mesures pour arrêter la violence due aux armes », a réagi le sénateur américain Bernie Sanders, candidat démocrate à la présidentielle américaine. « Il faut suivre l’exemple néo-zélandais, confronter la NRA (National Rifle Association) et interdire la vente et la distribution des armes d’assaut aux Etats-Unis ».
Pour la deuxième journée consécutive, des centaines de personnes se sont rassemblées sous un ciel gris pour faire leurs adieux à de nouvelles victimes du tueur, y compris une habitante de Christchurch convertie à l’islam et un homme âgé mort en tentant de saluer celui qui allait le tuer.
Parmi les personnes rassemblées, des musulmans, des non musulmans, des écoliers et même des bikers. Des élèves pleuraient en accompagnant Sayyad Milne, 14 ans et Tariq Omar, 24 ans, en leur dernière demeure. Le père de Sayyad, John Milne, a déclaré que son fils avait été abattu alors qu’il priait à la mosquée Al-Noor. M. Milne avait expliqué à l’AFP que son fils, « son tout petit », voulait un jour jouer pour le club du nord de l’Angleterre.
Parmi les présents, beaucoup sont scolarisés au lycée Cashmere, l’établissement que fréquentaient Sayyad mais aussi Hamza Mustafa, un réfugié syrien enterré la veille.
Tombes fraîches
Un « Allah Akbar » retransmis par haut-parleur a donné le signal du départ de la cérémonie. Après des prières, les victimes ont été inhumées.
Tariq Omar entraînait des équipes de football junior à la Christchurch United Academy. D’après la presse locale, sa mère l’avait déposé à al-Nour le jour du massacre et a survécu car elle cherchait une place de parking pour se garer. « C’était ce genre de personne que tout le monde connaissait », a raconté Bailey Jordan, 15 ans, élève à Cashmere. Ces funérailles « serrent le cœur, c’est un moment difficile pour tout le monde ». Colin Williamson, directeur de la United Academy, a décrit Omar comme « un être humain magnifique, avec un cœur gigantesque et un grand amour pour le coaching ».
Une voisine de la famille Milne se désole en regardant le nombre de tombes fraîches synonymes des inhumations à venir. « Ce qui m’a frappé, c’est toutes ces tombes qui attendent, et la place qu’elles prennent », a déclaré cette femme à l’AFP sous couvert de l’anonymat.
Dans un « manifeste » sur le « grand remplacement », théorie complotiste populaire dans les milieux d’extrême droite qui considère que les populations blanches européennes sont « remplacées » par des populations immigrées, le tueur avait dit vouloir attiser le conflit entre l’islam et l’occident. Mais à Christchurch, les fidèles de toutes les religions se sont réunis pour témoigner de leur solidarité, la ville étant recouverte de gerbes de fleurs et de messages d’unité.
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