La première ministre britannique, Theresa May, après la conférence de presse, le premier jour d’un sommet européen consacré au Brexit, à Bruxelles, le 22 mars 2019. / EMMANUEL DUNAND / AFP

Le risque d’un Brexit sans accord étant encore une option sur la table, les autorités britanniques s’y préparent activement. Non sans inquiétudes. Un document secret du cabinet de Theresa May, auquel a eu accès le quotidien The Guardian et publié vendredi 22 mars, imagine une « phase critique » qui pourrait durer trois mois. Il évoque de possibles perturbations au niveau des transports, comme des risques de pénuries de nourriture ou encore de papier toilette.

Les ministères devront résoudre eux-mêmes la plupart des problèmes rencontrés, prévient le document, sans quoi cela provoquerait l’effondrement de l’« Opération Yellowhammer », le plan préparé en cas de « no deal ». « La structure… tombera rapidement si trop de décisions sont inutilement transférées aux échelons supérieurs qui auraient pu raisonnablement être traités en interne », peut-on lire.

Un travail 24 heures sur 24, 7 jours sur 7

Le document prévient que les agences et les ministères concernés doivent prévoir de travailler sans arrêt pendant « au moins 12 semaines », en estimant que « certains impacts peuvent être ressentis jusqu’à 24 semaines ». « Il pourrait nécessiter un travail 24 heures sur 24 et 7 jours 7 pour tous les ministères et agences concernés ».

Un organigramme imagine également une journée type post-Brexit sans accord dans le quartier ministériel de Whitehall, qui commencerait à 7 heures du matin avec l’envoi aux ministres et aux hauts fonctionnaires de « rapports de situation » concernant l’ensemble du Royaume-Uni. Cette journée se poursuivrait avec des évaluations et des réunions sans arrêt jusqu’au lendemain, à 5 h 30 du matin.

Les autorités locales sont invitées par le document confidentiel à relever tout signe d’augmentation des tensions entre communautés, de crimes ou encore de manifestations. Différentes sources disent au Guardian que cette organisation est insuffisante, trop tardive, voire encore floue. Le gouvernement craindrait d’avoir du mal à déterminer les missions prioritaires des autorités locales. Une source proche du dossier fait enfin savoir au quotidien britannique que, même si la planification s’était intensifiée, le tableau général restait « chaotique ».

L’exécutif semble d’ores et déjà concéder qu’il y aura probablement des problèmes et des impacts imprévus en cas de Brexit sans accord que « l’Opération Yellowhammer » n’aura pas été en mesure de prédire.

Un bunker anti-atomique en plein cœur de Londres

Voilà pour les préparations officieuses. Mais d’un point de vue officiel, le gouvernement de Theresa May montre aussi qu’il s’active. Jeudi, le ministre de la défense a fait savoir qu’il avait installé un centre opérationnel dans un bunker anti-atomique au centre de Londres dans l’optique d’un éventuel Brexit sans accord. Celui-ci, situé sous le ministère de la défense, à Whitehall, aura pour but de coordonner toute réponse militaire au Brexit.

Ce centre est muni de toutes « les infrastructures nécessaires » et dispose d’une « équipe prête à soutenir n’importe quelle action en cas de besoin », a déclaré le porte-parole du ministère. « Au fur et à mesure que nous nous rapprochons d’une possible sortie (de l’UE) sans accord, c’est l’endroit d’où la réponse pourrait être coordonnée », a-t-il ajouté. Selon les médias britanniques, l’armée pourrait être utilisée pour aider à transporter de la nourriture, du carburant et autres marchandises en cas de difficultés à la frontière.

Bien qu’il ait été rejeté par la Chambre des Communes, un Brexit sans accord au 29 mars (« no deal »), aux conséquences imprévisibles, reste une option par défaut si aucun terrain d’entente n’est trouvé entre Britanniques, ou avec l’Union européenne.

En décembre, le ministre de la défense, Gavin Williamson, avait annoncé que 3 500 militaires pourraient être mobilisés pour soutenir les services gouvernementaux qui en exprimeraient le besoin. Ces troupes sont « prêtes », a assuré le porte-parole. L’opération militaire de gestion de crise pour le Brexit, baptisée « Opération Redfold », a, en outre, été activée au début de semaine.