Mobilité urbaine, l’ère de la cohabitation
Mobilité urbaine, l’ère de la cohabitation
Par Laetitia Van Eeckhout, Claire Legros
Trottinette, vélo, scooter, autopartage, VTC… Ces usages alternatifs à la voiture individuelle, souvent basés sur des applications numériques, interrogent le partage de l’espace public, mais aussi l’accessibilité et les libertés individuelles.
A Rennes, le 13 novembre 2018. / Michel GAILLARD/REA
Comment se partager la ville ? La question est à la fois plus passionnante et plus passionnelle que jamais, avec la spectaculaire diversification des modes de déplacement et la multiplication des acteurs des transports urbains – ainsi que tous les enjeux de sécurité afférents.
Le trottoir, jadis domaine réservé et protégé du piéton, est ainsi devenu l’un des espaces les plus convoités de la ville, où l’on peut désormais suivre les traces de nos mobilités quotidiennes. C’est là que l’on abandonne sa trottinette ou son vélo en libre-service. C’est également sur sa bordure que s’adossent les livreurs pour décharger, les VTC pour prendre en charge leurs passagers. Là encore que sont implantées les bornes de recharge des véhicules électriques.
L’essor de ces nouveaux usages exacerbe la rareté de l’espace public et l’impuissance des collectivités à réagir, faute de leviers de régulation. La plupart des activités des plates-formes ne font en effet pas l’objet de délégation de service public. La future loi d’orientation sur les mobilités, soumise ce mois-ci au Parlement, devrait apporter des réponses et pourrait soumettre les nouveaux acteurs à un régime d’autorisation attribuée par les collectivités.
Mais de toute évidence, l’urgence climatique oblige à voir plus loin. S’il faut développer les mobilités douces, on ne pourra pas « saucissonner les rues avec autant de voies qu’il y a de modes de transport », estime la géographe et anthropologue Sonia Lavadinho que nous avons interviewée dans ce dossier. Pour elle, le partage de l’espace public impose une logique de cohabitation qui passe par un ralentissement des vitesses, pour que la rue ne soit plus « pensée comme un simple axe de transit », mais redevienne un lieu de rencontre.
La place et la protection de l’usager
Une autre bataille, moins visible mais bien réelle, se livre sur le terrain numérique. Au cœur des stratégies de multimodalité, le partage des données de mobilité porte la promesse d’une ville plus fluide, équitable, inclusive et écologique, où il devrait être plus facile de combiner les modes de transports et d’éviter l’usage de la voiture individuelle.
Mais le numérique pose aussi des questions essentielles de gouvernance. Quelle sera la place de l’usager dans ce dispositif ? De quelles façons sera-t-il associé et consulté, lui qui aujourd’hui reste trop souvent considéré comme un smartphone ambulant ? Le Règlement européen sur la protection des données est-il suffisant pour garantir à chacun le respect de sa vie privée, alors qu’en échange de services de plus en plus efficaces, acteurs publics et privés amassent des informations sur ses trajets et ses habitudes ? Comment faire en sorte, enfin, que ces dispositifs ne laissent pas de côté les personnes fragiles ?
Autant de questions qui interrogent notre quotidien mais aussi l’économique, le technologique et le politique. Elles seront au cœur des rencontres inOut organisées par la métropole de Rennes du 28 au 31 mars. « Le Monde » y organise une conférence sur les enjeux sociaux et écologiques de la mobilité quotidienne, jeudi 28 mars, de 8 h 30 à 10 h 30, au Couvent des Jacobins.
« Le Monde » organise une conférence sur les enjeux sociaux et écologiques de la mobilité quotidienne, intitulée « Une mobilité durable pour tous ? » jeudi 28 mars, de 8 h 30 à 10 h 30, au couvent des Jacobins à Rennes. Inscriptions en ligne (gratuit)
Dossier réalisé dans le cadre d’un partenariat avec la métropole de Rennes.