Dans les studios de BFM-TV, le 20 mars 2019. / KENZO TRIBOUILLARD / AFP

La querelle entre Altice et Free (dont le fondateur, Xavier Niel, est actionnaire à titre individuel du Monde) sur la distribution des chaînes du groupe de Patrick Drahi (BFM-TV et Business, RMC Découverte et Story) s’envenime. Vendredi 5 avril, la maison mère de SFR a décidé, faute d’accord, de suspendre, dès 7 heures du matin, la diffusion de ses quatre chaînes aux 6,5 millions d’abonnés à la Freebox. Mais coup de théâtre, le trublion des télécoms a rétabli le signal par ses propres moyens moins de deux heures plus tard, déclenchant l’ire d’Altice, qui accuse l’opérateur de pirater la livraison du signal de ses chaînes.

Au cœur du conflit, l’accord de diffusion signé entre les deux groupes, et qui est arrivé à échéance le 20 mars. Altice souhaitait profiter du renouvellement du contrat pour en revoir les termes, et faire payer Free un montant de 5 à 6 millions d’euros pour l’accès à ses chaînes et à leurs services ajoutés tels que la télévision de rattrapage. Le groupe de médias s’est cependant heurté à une fin de non-recevoir de la part de l’opérateur, peu disposé à rémunérer des chaînes gratuites et jugeant les services ajoutés insuffisamment pertinents pour justifier une rétribution. « Malgré notre position d’ouverture et la prolongation de la période de discussions, Free a refusé de négocier un accord de distribution des chaînes et services associés de BFM-TV, BFM Business, RMC Découverte et RMC Story », s’est fendu la maison mère de SFR dans un communiqué.

Des conflits antérieurs

La coupure par Altice, puis le rétablissement du signal par Free, a exacerbé les tensions au sein des deux camps. La maison mère de SFR a indiqué que des « mesures juridiques, réglementaires et judiciaires » étaient en cours « face à cette situation illégale ». De son côté, Free dénonce « la communication mise en œuvre depuis plusieurs semaines » par Altice, contraire à la réalité selon lui.

Ce conflit n’est pas le premier du genre. En 2018, une bataille avait éclaté entre les opérateurs de téléphonie et les groupes audiovisuels, dont notamment TF1 et M6, qui avaient réclamé une rétribution pour la diffusion de leurs chaînes et de leurs services ajoutés. Les opérateurs avaient finalement abdiqué. La situation s’enlisant, Altice a demandé lundi 1er avril l’ouverture d’une procédure de règlement des différends au Conseil supérieur de l’audiovisuel. Le régulateur avait déjà proposé mi-mars une médiation aux deux parties, sans succès. L’instruction de l’affaire est désormais en cours chez le gendarme de l’audiovisuel.

Derrière ce bras de fer avec Free se profile celui à venir avec Orange. L’accord de distribution qui lie l’opérateur historique à Altice doit prendre fin cet été. Et les négociations pour un nouvel accord s’annoncent d’ores et déjà ardues. « Ça discute mollement », confie-t-on sobrement chez Orange. Mi-mars, la directrice générale d’Orange France, Fabienne Dulac, avait indiqué trouver le montant réclamé par Altice à Free exagéré au vu des audiences de ses chaînes.