Manifestation de « gilets jaunes » à Rouen, le 6 avril 2019. / KENZO TRIBOUILLARD / AFP

Cinq mois après leur naissance, les « gilets jaunes » ont commencé à se rassembler dans plusieurs villes, samedi 6 avril, pour la vingt et unième fois sans discontinuer. Ce nouveau samedi de mobilisation précède la synthèse du grand débat national prévue la semaine prochaine, sur la base de l’immense masse de contributions des citoyens sur laquelle travaillent depuis des semaines plusieurs organismes.

La semaine dernière, l’acte XX avait rassemblé 33 700 personnes (dont 4 000 à Paris), selon les chiffres du ministère de l’intérieur contestés par les « gilets jaunes », qui ont, de leur côté, revendiqué 105 084 manifestants pour 225 actions recensées.

  • A Paris, deux manifestations déclarées ; le périmètre des Champs-Elysées interdit

A Paris, deux manifestations sont prévues et déclarées en préfecture. L’une, relayée notamment par Eric Drouet, l’une des figures désormais célèbre du mouvement, va du centre est de Paris, place de la République, jusqu’à au quartier des affaires de la Défense, tout à l’ouest, et veut dénoncer « l’art de l’optimisation fiscale ».

L’autre, à l’appel notamment de Sophie Tissier, autre personnalité des « gilets jaunes », part du sud, de la gare Montparnasse, et doit rallier le bassin de la Villette, dans le nord-est de la capitale. Samedi en fin de matinée, les « gilets jaunes » commençaient à investir ces deux lieux de départ, entourés d’un important dispositif policier.

Les interdictions de manifester sur les Champs-Elysées, la place de l’Etoile, ainsi que dans un vaste périmètre comprenant l’Elysée et l’Assemblée nationale, ont été reconduites par le préfet de police pour la troisième semaine de suite, après les débordements de samedi 16 mars, qui avait vu 1 500 manifestants « ultraviolents », selon le gouvernement, saccager la célèbre avenue et ses abords.

Dans le reste de la capitale, « le droit de manifester, qui est une liberté fondamentale, pourra s’exercer librement », assure la préfecture, qui n’exclut pas « des déambulations erratiques dans Paris ou des départs en cortèges sauvages pendant ou à l’issue de la dispersion ». Elle invite les participants « à suivre impérativement l’itinéraire fixé, à se désolidariser des groupes de personnes se masquant et s’apprêtant à commettre, ou commettant des violences et/ou des dégradations ».

Jeudi, l’article-clé de la loi dite « anticasseurs », permettant de prononcer des interdictions administratives de manifester contre toute personne présentant une « menace d’une particulière gravité pour l’ordre public » a été censuré par le Conseil constitutionnel. Les dispositions validées – fouilles de sacs et de véhicules aux abords des cortèges, délit de dissimulation volontaire du visage – ne seront pas non plus appliquées ce samedi, car le texte n’a pas encore été publié au Journal officiel.

  • Un appel à un rassemblement national à Rouen

A Rouen, où un appel à un rassemblement national a été lancé, quelques centaines de manifestants se sont déjà retrouvés samedi en milieu de matinée, parmi lesquels quelques syndicalistes, notamment de la Confédération générale du travail (CGT). Les manifestants tournent autour du périmètre interdit dans le centre-ville aux cris de « Macron, dégage pour de bon ! ».

Selon la préfecture, la foule correspond à une « jauge classique pour un samedi matin » de mobilisation des « gilets jaunes ».

Ailleurs en France, d’autres manifestations sont relayées sur les réseaux sociaux, comme à Lyon, Dijon, Nice, Nantes, Montpellier, Bordeaux ou encore Toulouse. A Bort-les-Orgues, en Corrèze, une manifestation est prévue pour protester contre la privatisation de barrages dans la région. Des arrêtés d’interdiction de manifester dans les centres-villes d’Auxerre et de Bourg-en-Bresse ont par ailleurs été pris.

  • Une « assemblée des assemblées » à Saint-Nazaire

Deuxième « assemblée des assemblées » du mouvement des « gilets jaunes » dans un bâtiment rebaptisé « Maison du peuple » à Saint-Nazaire, le 5 avril 2019. / LOÏC VENANCE / AFP

Plus de deux mois après une première assemblée à Commercy (Meuse), le 27 janvier, plusieurs dizaines de délégués « gilets jaunes » venus de toute la France se sont retrouvés pour la seconde « Assemblée des assemblées » à Saint-Nazaire (Loire-Atlantique), dans les anciens locaux de l’Assedic devenus « Maison du peuple ». « Nous souhaitons que l’Assemblée des assemblées soit un bouillonnement des idées qui circulent sur les ronds-points, les lieux occupés et dans les manifestations », écrit le groupe sur Facebook.

Parmi les contributions versées au débat par plusieurs groupes figurent un projet de « charte commune », un « appel à l’action pour les élections européennes dans toute l’Europe » ou encore la convocation et l’organisation d’Etats généraux. Certains ont évoqué l’idée – loin de faire l’unanimité parmi eux – de construire des listes pour les municipales d’ici à 2020, pour « enraciner le mouvement » et « redevenir des citoyens à part entière ».

« On n’arrive peut-être pas à gicler Macron, mais les maires », ceux qui refusent de laisser les « gilets jaunes » s’installer, « ceux-là on peut les gicler », clamait vendredi soir Claude, venu de la Meuse pour l’événement.

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