Carlos Ghosn à Paris, le 1er octobre 2018. / RÉGIS DUVIGNAU / REUTERS

Les actionnaires de Nissan, réunis lundi 8 avril à Tokyo, ont voté la révocation du mandat d’administrateur de Carlos Ghosn, qui a dirigé le groupe pendant près de deux décennies. La direction du constructeur s’était empressée de destituer de la présidence le tout-puissant magnat de l’automobile juste après son arrestation initiale le 19 novembre, mais il fallait l’aval des actionnaires pour le démettre de son poste d’administrateur.

L’assemblée générale (AG) a également approuvé le renvoi de l’ex-bras droit de M. Ghosn, Greg Kelly, inculpé sur un volet de l’affaire, et a entériné l’élection comme membre du conseil d’administration du président de Renault, Jean-Dominique Senard. Ce dernier s’est dit « très honoré » et a assuré qu’« à partir de maintenant, [il] consacrera [son] énergie à renforcer Nissan ».

« Sérieux problèmes » de gouvernance

Cette assemblée générale extraordinaire, qui a duré trois heures, s’est ouverte sur les « regrets » du patron exécutif, Hiroto Saikawa, et une longue révérence d’excuses de l’ensemble de l’équipe, selon la tradition japonaise.

« Il s’est passé quatre mois depuis l’événement de novembre, Nissan est à un moment critique (…) pour tirer un trait » sur cet épisode « et franchir une nouvelle étape dans la réforme de gouvernance », a lancé M. Saikawa devant près de 4 200 participants, évoquant à plusieurs reprises « un important jalon ».

Cet ancien fidèle de Carlos Ghosn a redit son « choc » quand il a pris connaissance des résultats de l’enquête interne de Nissan, qui a mis au jour les malversations présumées, détaillées une nouvelle fois lundi. Mais des actionnaires ont émis des doutes. « Je suis sûr que vous étiez au courant. Vous devez être tenu pour responsable ! », s’est offusqué l’un d’eux.

M. Saikawa a reconnu « de sérieux problèmes » de gouvernance, « la peur des employés » qui n’osaient s’opposer à M. Ghosn, et a promis de passer la main une fois qu’il aurait « remis la compagnie sur la voie de la croissance ».

Ghosn se dit victime d’un « complot »

L’AG se déroulait quelques jours après une nouvelle interpellation de l’ex-PDG de Renault-Nissan, désormais réduit au silence alors qu’il avait annoncé une conférence de presse pour le 11 avril. Déjà inculpé à trois reprises, M. Ghosn est actuellement entendu par les enquêteurs du parquet de Tokyo sur des soupçons de détournement de fonds de Nissan.

Avant d’être renvoyé dans la prison du quartier de Kosuge (nord de Tokyo) où il avait déjà passé plus de cent jours, M. Ghosn n’a pas épargné Nissan. Il s’est redit victime d’un « complot » orchestré par des dirigeants du groupe nippon souhaitant empêcher un projet d’intégration plus poussée avec Renault. Une vidéo « désignant les responsables de ce qui lui est arrivé », selon son épouse, sera diffusée mardi.

« L’autre partie [de l’explication], c’est la détérioration de la performance de Nissan depuis deux ans », a souligné le magnat déchu de 65 ans lors d’un entretien accordé la semaine dernière à TF1 et LCI.