Paris a annoncé, vendredi 3 mai, un renforcement de sa coopération militaire avec Bagdad. C’est le point le plus visible de la « feuille de route stratégique » signée par la France et l’Irak vendredi à Paris, à l’occasion de la visite du premier ministre, Adel Abdel-Mahdi, qui a rencontré le président Emmanuel Macron, le ministre des affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, et la ministre des armées, Florence Parly.

« Plusieurs demandes ont été faites de la part de l’Etat irakien en matière de formation des forces et de protection des frontières », a précisé l’Elysée au Monde. Des équipements de surveillance devraient pouvoir être vendus pour les frontières, même si, au-delà, les perspectives d’exportation d’armes françaises sont faibles.

« Nous ne sommes pas tellement dans cette logique », précise-t-on, une façon d’admettre que l’Irak demeure en la matière une chasse gardée américaine. Quant à la formation, davantage de personnels français seront envoyés en soutien de l’armée irakienne. Deux nouveaux domaines de formation sont privilégiés, le combat de montagne et les opérations en milieu désertique. Ce nouvel effort n’est pas encore quantifié.

Huit mille soldats irakiens déjà formés, en quatre ans

La coopération militaire directe avec Bagdad permet déjà à Paris d’afficher des résultats significatifs, avec un investissement modeste. Elle comprend cent cinquante militaires dans la Task Force Narvik, qui soutient depuis mars 2015 l’Iraki counter-terrorism service (ICTS), unité d’élite de l’armée irakienne. L’état-major français précise que 8 000 soldats irakiens ont ainsi été formés en quatre ans, ainsi que trois cents instructeurs.

Par ailleurs, Paris compte cinquante militaires à Bagdad au titre du « soutien national » à l’appareil de défense irakien – état-major et forces chargées de la protection de la capitale –, soit 3 600 soldats et officiers ainsi que 1 700 formateurs instruits par les Français. Des stages spécialisés ont été délivrés, sur l’infiltration, le secourisme de combat, la lutte contre les engins explosifs improvisés ou les snipers.

Cette coopération restera bilatérale. Paris n’envisage pas de la placer sous l’étiquette de l’Union européenne, qui déploie des missions sécuritaires elle aussi, ou de l’OTAN, qui a proposé à Bagdad d’accroître son aide en matière de formation.

L’état-major français affiche au total 1 100 personnels pour les opérations en Irak et Syrie, dont les trois cents aviateurs de Jordanie, cinquante personnels aux Emirats arabes unis, cent autres dans les états-majors de la coalition anti-Daech, deux cents marins sur la frégate naviguant en permanence en Méditerranée orientale, et cent soldats pour des renforts ponctuels (récemment un avion Awacs a été mis au pot).

Il faut cependant enlever les cent cinquante servants des canons Caesar, qui, depuis l’Irak, ont appuyé les dernières opérations contre l’Etat islamique à Baghouz, en Syrie. Les matériels sont encore présents sur le sol irakien mais leur mission est terminée depuis la mi-avril – le ministère l’a confirmé officiellement vendredi. Le gouvernement irakien ne réclame pas ces équipements, qui n’ont pas vocation à être cédés aux forces locales, précise-t-on à l’Elysée.