es 34 manifestants placés en garde à vue après avoir tenté de fuir la charge des forces de l’ordre dans l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière ont livré leur récit des événements. Le 4 mai 2019 à Paris / KENZO TRIBOUILLARD / AFP

Les 34 manifestants placés en garde à vue après avoir été interpellés, le 1er mai, sur un escalier menant à un service de réanimation de l’hôpital parisien de la Pitié-Salpêtrière ont assuré samedi 4 mai qu’ils n’avaient fait que « fuir les ultra-violences policières ». Une version des faits corroborée par les nombreux témoignages concordants reçus par Le Monde après les événements du 1er mai.

Lors d’une conférence de presse à Paris, une dizaine de ces personnes - hommes et femmes - ont lu, à plusieurs voix, une déclaration d’un collectif qu’ils ont créé, pour raconter ce qu’ils avaient « vécu ensemble ». Cette déclaration a été « validée » par l’ensemble des interpellés, ont-ils souligné.

« Subir des coups ou se réfugier »

L’un d’entre eux, Johann Maheut, avait par ailleurs livré un récit édifiant quelques heures plus tôt sur son compte Facebook. Le 1er mai vers 16 heures, alors que la manifestation est calme et que le cortège est bloqué en attendant de continuer vers la place d’Italie, « une pluie de palets lacrymogène s’abat sur l’ensemble de la foule compacte », « sans aucune explication, ni sommation », écrit-il. « Autour de moi, pas de casseurs ni de supposés “Blacks-Blocs”, seulement des gens ordinaires de tous âges ».

Le récit que fait le collectif des gardés à vue ne dit pas autre chose. Alors que le cortège du 1er mai, scindé en deux par les forces de l’ordre, était noyé sous « une pluie de lacrymogène et de LBD » boulevard de l’Hôpital et que « tout le monde était visé, y compris un grand nombre d’enfants et de personnes fragiles », « seules deux options s’offraient à nous : subir des coups (...) ou se réfugier dans un espace aéré », ont-ils expliqué.

« Pour fuir ces ultra-violences policières », ces manifestants, « terrifiés », se sont engouffrés par une « grille ouverte » de l’hôpital, où ils se sont « réfugiés sous l’effet de la panique ». Mais, « brusquement », des CRS les ont « chargés », expliquent-ils, alors que « des voltigeurs » sont arrivés de l’autre côté. C’est alors qu’ils ont pris un escalier pour demander « le droit d’asile ».

« À aucun moment nous ne savions qu’il s’agissait du service de réanimation », ont-ils assuré, insistant sur le fait qu’ils n’étaient « jamais rentrés dans le bâtiment » et qu’il ne s’agissait de leur part ni d’une « attaque, ni d’une intrusion violente », mais que « le but » était « bien de se réfugier ».

Des membres du collectif « les 34 de la Pitié » lors de leur conférence de presse à Paris, le 4 mai 2019. / KENZO TRIBOUILLARD / AFP

Des événements « incompréhensibles et inadmissibles »

Ils ont été interpellés peu après par les CRS auxquels ils n’ont opposé « aucune violence ». Johann Maheut raconte la suite sur Facebook : « Un CRS fera redescendre tout le monde, alors que j’arrive au bas de l’escalier, une partie de notre groupe ainsi formé est allongé au sol face contre terre, les mains sur la tête. Commence alors notre interpellation et toutes les humiliations qui vont avec. Nous remettons nos pièces d’identité, puis la palpation commence, un par un. La fouille ne donne rien, pas même un masque à gaz ».

« Dans le bus, l’ambiance est détendue même si chacun se demande ce qu’il va nous arriver, nous n’imaginons pas encore la garde à vue. Comme vous le voyez sur ma photo de l’intérieur du bus, le profil des interpellés est loin de la description faite par M. Castaner », poursuit-il.

Le collectif a ensuite dénoncé des « violences » à leur encontre au dépôt de police et raconté les conditions difficiles de leurs « 28 » à « 30 heures » de garde à vue, avec une « pression psychologique intense », sans pouvoir voir leurs avocats.

C’est au Palais de justice qu’ils se sont rendu compte, en découvrant la polémique entourant leur histoire, qu’ils avaient été « victimes d’un engrenage politique » qui les « dépassait ». Une manifestation « déclarée et autorisée » s’est « transformée en cauchemar », ont-ils poursuivi, en évoquant des « événements incompréhensibles et inadmissibles ».

Auparavant, ces manifestants, « encore sous enquête préliminaire », avaient remercié les « travailleurs et travailleuses de l’hôpital de la Salpêtrière qui ont fait émerger la vérité ».

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