« Fugue » : les vertus de l’oubli partiel en famille
« Fugue » : les vertus de l’oubli partiel en famille
Par Jean-François Rauger
Agniezska Smoczynska reprend le thème de l’amnésique en quête de son identité pour en déplacer, au moins dans sa première partie, les enjeux.
Une jeune femme, Alicia, est retrouvée, errante et amnésique dans le métro de Varsovie. Une émission de télévision permet à sa famille de l’identifier. Elle rejoint donc les siens : son mari, son petit garçon, ses parents, incapable pourtant de se souvenir de sa vie antérieure. Si Fugue reprend un thème déjà balisé (l’amnésique en quête de son identité) c’est pour en déplacer, au moins dans sa première partie, les enjeux. L’hostilité butée dont fait preuve l’héroïne du film (remarquablement interprétée par Gabriela Muskala par ailleurs scénariste du film) apparaît comme une interrogation habile et pertinente sur la part de liberté que contiennent les choix de la vie sociale. Soudain, l’amnésie devient le catalyseur paradoxal d’une prise de conscience, celle du caractère arbitraire et aliénant de l’idée de famille elle-même et soudain, par les vertus de l’oubli partiel, ce qui relevait d’une donnée peu questionnée de l’existence révèle sa nature particulièrement artificielle. Il est dommage que dans sa dernière partie le film retrouve, avec son explication appuyée de la fuite de la jeune femme, un terrain plus convenu.
Fugue. Film polonais de Agniezska Smoczynska. Avec Gabriela Muskala, Malgorzata Buczskowska, Lukasz Simlat. (1h40). Sur le web : www.arizonafilms.fr/films/fugue/