Ouverture d’une enquête pour « harcèlement moral » et « discrimination » à la mairie de Montreuil
Ouverture d’une enquête pour « harcèlement moral » et « discrimination » à la mairie de Montreuil
Par Jérémie Lamothe
Sept agents ou ex-agents municipaux avaient porté plainte mi-février contre la municipalité, dirigée par le communiste Patrice Bessac, et contre plusieurs cadres de la mairie.
Le maire de Montreuil (Seine-Saint-Denis), Patrice Bessac, en octobre 2017. / MARTIN BUREAU / AFP
Le parquet de Bobigny a ouvert une enquête, le 28 mars, pour « harcèlement moral » et « discrimination » contre la ville de Montreuil (Seine-Saint-Denis), a appris Le Monde de source judiciaire, vendredi 10 mai. Elle a été confiée à la Brigade de répression de la délinquance contre les personnes (BRDP).
L’ouverture de cette enquête intervient après le dépôt de plaintes, révélé par Le Monde mi-février, par six agents et un ex-agent de la ville, pour « harcèlement moral » – et « discrimination » pour deux d’entre eux – contre la municipalité, dirigée par le communiste Patrice Bessac, et contre plusieurs cadres de la mairie.
Contacté par Le Monde, la Ville de Montreuil fait savoir vendredi « qu’elle n’a toujours pas été notifiée de ces plaintes« . « Nous n’avons aucune information, nous ne savons pas qui est visé donc il est compliqué pour nous de réagir », précise la municipalité.
Six des plaignants (qui souhaitent garder l’anonymat) étaient employés au service municipal de la jeunesse (SMJ), aujourd’hui rebaptisé « direction de la jeunesse et éducation populaire » (DJEP). Ils étaient notamment chargés de l’animation et de projets à destination des jeunes Montreuillois. Mais, aujourd’hui, aucun d’eux ne travaille ; ils sont, pour la plupart, en arrêt longue maladie depuis plusieurs mois, voire plusieurs années, pour dépression ou surmenage.
Harcèlement, intimidation, pressions… tous accusent la municipalité, alertée à plusieurs reprises de la situation, d’être à l’origine de leurs souffrances à la suite, notamment, d’une réorganisation du service, appliquée à marche forcée à partir de 2015. Le septième plaignant, Salim Leghmizi, qui a notamment été directeur du Théâtre Berthelot (2010-2016), a également connu plusieurs mois d’arrêts longue maladie pour dépression, requalifiée par la suite en maladie professionnelle.
« Des erreurs et des maladresses »
En conflit ouvert avec la mairie, il a été contraint de changer de poste et a été muté « sur un poste fin 2016 qui n’était pas encore créé », déplore-t-il au Monde. A la suite d’un recours devant le tribunal administratif de Montreuil pour excès de pouvoir, le juge administratif lui avait donné raison en annulant, en avril 2018, l’arrêté municipal affectant l’agent à ce nouveau poste, estimant que la procédure était « entachée d’illégalité ».
Si le juge administratif a demandé à la ville de « réintégrer M. Leghmizi dans le délai d’un mois » dans ses anciennes fonctions, lui assure être toujours « sans missions et sans affectations », plus d’un an après cette décision. De son côté, la ville fait savoir que des postes lui ont été proposés et qu’il les aurait refusés. Ce que conteste M. Leghmizi.
Concernant le SMJ, M. Bessac a été alerté à plusieurs reprises sur la situation des anciens employés du service, qui lui ont notamment écrit en juin 2016. Dans cette missive, ils dénonçaient « un climat de suspicion et une atmosphère psychologiquement pesante. (…) Il en résulte donc une démotivation des équipes et un mal-être. »
Leur cas est évoqué à plusieurs reprises en conseil municipal par des élus d’opposition, mais la majorité est toujours restée silencieuse. M. Bessac réagira finalement à l’été 2018 en recevant tous les agents de service et en apportant des changements à la tête de la DJEP. A la suite des dépôts de plainte, l’édile communiste avait ainsi reconnu, dans Le Parisien et de sur France 3, « des erreurs et des maladresses » dans la réorganisation du service. « Ces plaintes me procurent un sentiment d’échec, elles veulent dire que le dialogue s’est rompu », regrettait-il.